Associations - Touché par des financements en baisse, le monde associatif lance sa campagne
"Quelle société voulons-nous pour demain ?", a lancé le 25 janvier André Leclercq, président de la Conférence permanente des coordinations associatives (CPCA), lors de la présentation de sa double campagne, en direction, d'une part, des acteurs politiques à la veille des échéances électorales, présidentielles et législatives, et d'autre part, du grand public. "Dans une société brutalisée par la crise, nous, acteurs associatifs, citoyennes et citoyens engagé-e-s [sic], souhaitons rappeler que les associations sont le ferment indispensable d’une société démocratique et solidaire. Les projets associatifs, à tous les niveaux des territoires, sont essentiels à la vie quotidienne de nos concitoyens." Le ton est donné, la CPCA, qui regroupe 16 coordinations nationales représentant plus de 600.000 associations, souhaite marquer les esprits avec des actions de communication pour rendre plus visibles ces associations. Et de rappeler que trois Français sur quatre sont concernés par les associations qui sont, en France, au nombre de 1,3 million. Quelques chiffres encore : on dénombre 16 millions de bénévoles, 220.000 associations emploient près de 1,8 million de salariés, les associations représentent 80% des emplois de l'économie sociale et solidaire et leur budget pèse 70 milliards d'euros, soit 3,5% du PIB.
Logo, site web, rencontre avec les candidats...
En déclinaison de cette nouvelle campagne, la CPCA propose différents supports. Elle a décidé de créer, à destination des associations, un logo unique avec comme nom "Associations, reconnues d'intérêt citoyen depuis 1901". Logo qui "rappelle deux points communs : la loi de 1901 et l'intérêt qu'elle représente pour la société", a expliqué Jonathan Debauve, chargé de communication de la CPCA. Une série de trois affiches sera disponible afin de mieux faire connaître aux Français ce que représente le secteur associatif. A partir du 27 janvier, le site web www.depuis1901.fr présente au grand public l'appel des associations "démocratie, initiative, solidarité". Le site détaille également les "12 propositions pour une politique de développement de la vie associative", auxquelles six candidats à l'élection présidentielle pourront répondre le samedi 30 mars 2012 à Saint-Denis, "lieu symbolique du travail des associations sur le terrain". Les candidats pourront à tour de rôle "développer leur vision du dialogue des pouvoirs publics avec les associations". L'objectif est donc d'obtenir des réponses des politiques à des questions essentielles et concrètes, a résumé Jonathan Debauve : "Si vous êtes élus, comment allez-vous dialoguer avec les associations ? Les associations vont-elles pâtir de la crise ? Que va devenir le bénévolat ? Etc." La campagne de la CPCA sera aussi relayée sur les réseaux sociaux, Facebook, Twitter et Dailymotion.
Catherine Ficat
Les associations face à la baisse des financements… et au carcan des marchés publics
Quelques jours avant le lancement de sa double campagne, la CPCA, associée pour l'occasion à France active, rendait publics les résultats d'une enquête nationale sur le financement des associations menée avec l’appui du CNRS auprès de 877 responsables associatifs. Avec une grande question toute trouvée… "Associations, comment faites-vous face à la crise ?"
Le constat est clair : les financements publics – qui représentaient en moyenne 57% de leur budget – ont globalement baissé sur les deux dernières années. "69% des associations interrogées indiquent qu’au moins un de leur financeur a baissé sa contribution de façon significative", indique en effet l'étude. Mais tous les financeurs ne sont pas à loger à la même enseigne : si la baisse de soutien de l'Etat est citée par 59% des responsables associatifs, les collectivités sont moins souvent mises en cause. En tout cas le bloc local. Des baisses sont évoquées dans 41% des cas pour les régions, 39% pour les départements et seulement 25% pour les communes. Avec, forcément, des écarts selon les secteurs d'activité des associations – et avec certains recentrages "en fonction des priorités ou des domaines de compétences de chaque niveau de collectivités locales" (tendance, par exemple, des régions à se désengager des associations oeuvrant dans le champ du social). Heureusement, les conventions pluriannuelles d'objectifs (CPO) sont parfois là pour assurer une certaine stabilité. Un tiers des associations bénéficient ainsi de CPO avec les communes, les intercommunalités et/ou les départements. Un quart d'entre elles en ont signé avec une région.
L'enquête s'intéresse aussi au recours visiblement croissant des financeurs aux marchés publics, décrit par la CPCA et France active comme "un frein à l'initiative associative, souvent par méconnaissance de la réglementation européenne". On saura que "plus de 21% des associations ont conclu au moins un marché public, avec les communes et intercommunalités (46%), les départements (35%), les régions (25%), l'Etat (21%) ou d'autres organismes publics (28%). Un recours qui varie forcément en fonction de la taille de l'association et de son champ d'intervention.
Au total, 45% des associations interrogées évoquent des difficultés de trésorerie. Quant aux relations avec les banques, elles semblent finalement plutôt bonnes, sachant que seules 42% des associations ont eu recours à un emprunt bancaire pour financer leurs investissements.
Face à ces divers chiffres et enseignements, France active et la CPCA détaillent une série de propositions et demandes. A commencer par "le maintien des financements publics, garants de l'intérêt général". En ajoutant qu'il "conviendrait de prévoir dès aujourd'hui les cadres d'une péréquation qui viendrait compenser les inégalités territoriales induites par les désengagements de l'Etat au profit des collectivités locales". Les initiateurs de l'enquête souhaitent en outre que soient privilégiés "les modes de contractualisation permettant un financement partenarial, pluriannuel et respectueux de l’initiative associative". Autrement dit, que les financeurs publics limitent "le recours au marché public, qui ne se justifie pas toujours". France active et la CPCA craignent en effet que la logique de la commande publique entraîne carrément "la disparition" des moyennes et petites associations non rattachées à des réseaux, "dénature la spécificité des associations", les "déstabilise" et aboutisse parfois à une "appropriation" par les collectivités locales du savoir-faire associatif. Mieux vaudrait privilégier les CPO "euro-compatibles" et favoriser, "en complément de la subvention, l'appel à projets sous réserve d'un cadre juridique respectueux de la production d'innovation". Ce qui, précise le recueil de propositions, implique plusieurs mesures : simplification du modèle de CPO annexé à la fameuse circulaire Fillon du 18 janvier 2010, mieux informer collectivités et associations sur ces CPO mais aussi sur la notion d'"acte de mandatement"…
Claire Mallet