Economie sociale et solidaire - Vers un statut européen pour les associations
Mission accomplie ! Le 10 mars, cinq députés européens sont parvenus à faire signer par plus de la moitié du Parlement une déclaration écrite, appelant à proposer des statuts européens pour les associations, les fondations et les mutuelles. In extremis… Il leur restait une semaine à peine pour rassembler les 368 précieuses signatures. Voilà désormais le président du Parlement européen officiellement chargé de transmettre la déclaration écrite "à la Commission, au Conseil, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des Etats membres".
Que stipule précisément ce texte, déposé par les représentants de cinq groupes politiques, de droite comme de gauche ? Que les associations, fondations et mutuelles participent de la "diversité" de l'entrepreneuriat en Europe. Et que ces trois structures de l'économie sociale et solidaire (ESS) doivent désormais "améliorer leur ouverture transfrontalière". Une stricte "égalité de traitement" impose donc de les autoriser, elles aussi, à prendre une dimension européenne – comme peuvent déjà le faire les sociétés commerciales, ou encore les coopératives… Le Parlement engage en conséquence "la Commission à faire le nécessaire pour présenter des propositions de statuts européens".
Symbole
Certes, cette déclaration "ne va pas révolutionner la situation de l'ESS en Europe", reconnaît l'une des cinq députés à l'initiative du texte, la Française Marie-Christine Vergiat (Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique). Notamment, "ces statuts européens n'auraient pas vocation à se substituer aux différents statuts nationaux… Mais c'est un symbole. Ils seraient un moyen de faire reconnaître l'ESS au niveau européen".
Président du Forum civique européen, Jean-Marc Roirant se bat lui-même pour ce symbole depuis une quinzaine d'années. "Le traité de Lisbonne prévoit un dialogue régulier des institutions avec les associations - mais sans dire ce qu'elles sont... Il faut donc reconnaître le fait associatif européen." D'autant que "dans un pays comme la Bulgarie, par exemple, on ne compte qu'une association pour 30.000 habitants" - contre une pour 65 habitants, au bas mot, en France... La reconnaissance européenne pourrait aussi dynamiser la culture associative dans les pays de l'ancien bloc soviétique.
Implications concrètes
Mais un statut européen aurait aussi des implications très concrètes pour les associations et fondations à vocation transfrontalière : "Elles n'auraient plus à choisir le statut d'un pays donné", souligne Jean-Marc Roirant, par ailleurs secrétaire général de la Ligue de l'enseignement. "Et celles opérant à Bruxelles n'auraient pas nécessairement à s'enregistrer en Belgique."
Quant aux mutuelles, un tel statut leur permettrait de "faire des fusions par-dessus les frontières, et acquérir une dimension européenne", se satisfait Jean-Luc de Boissieu, secrétaire général du Groupement des entreprises mutuelles d'assurances (Gema). De quoi les "solidifier" et leur donner "une vision européenne" – même si en contrepartie, un tel changement d'échelle "risquerait de distendre le lien originel des mutuelles avec leurs sociétaires".
"Nous avons gagné une bataille, mais pas la guerre, prévient toutefois Marie-Christine Vergiat. Il faut désormais que la Commission entende le Parlement." Le contexte paraît néanmoins favorable : l'économie sociale tend aujourd'hui à trouver sa place dans les politiques de Bruxelles. Le commissaire Michel Barnier l'a encore montré cet automne, en intégrant le secteur dans ses 50 propositions pour un Acte pour le marché unique. Et aux dernières nouvelles, la vice-présidente de la Commission, Viviane Reding, ne serait pas hostile à ces trois statuts européens.