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Social - Surendettement : le gouvernement introduit le fichier positif par amendement

Après plusieurs années d'hésitation sur le sujet, la question du "fichier positif" - base de données regroupant toutes les personnes ayant un ou plusieurs crédits en cours - devrait être tranchée dans le cadre du projet de loi relatif à la consommation. En permettant à tous les organismes de s'y reporter au moment de consentir un prêt, cet outil devrait apporter une contribution importante à la lutte contre le surendettement.

Le "malendettement" plutôt que le surendettement

La création du fichier positif aurait dû figurer dans le projet de loi présenté au Conseil des ministres du 2 mai 2013. Il s'agissait là de la mise en œuvre de l'un des engagements du Premier ministre, annoncé en conclusion de la Conférence nationale de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale des 10 et 11 décembre derniers. Le président de la République avait renouvelé cet engagement lors de son intervention devant le congrès de l'Uniopss, le 25 janvier 2013. Mais cette disposition avait été retirée au dernier moment du texte présenté en Conseil des ministres, en raison des observations du Conseil d'Etat sur la fragilité juridique du texte dans sa rédaction initiale et sur le risque d'une censure du Conseil constitutionnel. Les services de Bercy ont donc retravaillé leur copie et le gouvernement a réintroduit - comme annoncé - les dispositions correspondantes par le biais d'un volumineux amendement (12 pages !), déposé le 10 juin.
Plus que le surendettement proprement dit, cet amendement entend traiter la question du "malendettement", stade préalable présenté comme "une porte vers le surendettement". Le fichier positif - qui s'appellera en réalité le "registre national des crédits aux particuliers" (RNCP) - recensera l'ensemble des "crédits à la consommation accordés aux personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels". Mais, à côté de cette approche "positive", le registre aura aussi une dimension "négative", en reprenant le rôle du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), géré par la Banque de France. Le registre recensera donc aussi les "informations relatives aux incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux consommateurs, ainsi que les informations relatives aux situations de surendettement [...]".

Une obligation de déclaration et de consultation

Le RNCP sera géré par la Banque de France, qui sera assistée d'un "comité de suivi du registre national des crédits aux particuliers". Une fois le registre mis en place, celui-ci fournira aux établissements de crédit et aux établissements de monnaie électronique "un élément d'appréciation de la solvabilité des personnes physiques qui sollicitent un crédit, et, le cas échéant, des personnes physiques qui se portent caution". Ces établissements auront obligation de consulter le registre avant toute décision effective d'octroyer un crédit à la consommation. L'accès sera également ouvert aux commissions départementales de surendettement et aux greffes des tribunaux compétents (dans le cadre de la procédure des situations de surendettement, afin de dresser l'état d'endettement du débiteur). Pour alimenter le RCNP, les établissements prêteurs seront tenus de déclarer tous les crédits accordés à des particuliers, à partir d'un seuil - qui semble très bas - de 200 euros.
L'amendement - qui comprend un corpus de 21 articles à insérer dans le Code de la consommation et plusieurs articles modificatifs - détaille les types de crédits concernés par l'obligation de déclaration et les crédits sur lesquels les éventuels incidents doivent être déclarés. Il liste également les informations contenues dans le RNCP (dont les informations d'état civil) et celles restituées aux établissements et organismes qui consultent le registre. Il s'agit en l'occurrence des mêmes informations, à l'exception de "celles relatives à l'identification des établissements et organismes à l'origine des déclarations".

Un risque juridique ?

Le texte précise les durées de conservation des informations : jusqu'à la fin de la période de remboursement pour le fichier positif, jusqu'au règlement définitif pour les incidents de remboursement et jusqu'à la fin de l'exécution du plan conventionnel ou des mesures prescrites pour les cas de surendettement. Il détaille aussi les garanties et sécurités entourant le RNCP, ainsi que les sanctions prévues en cas de non déclaration d'un prêt ou d'usage abusif des informations du fichier. Enfin, l'amendement prévoit que l'essentiel des dispositions sur le RNCP "entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard trois ans à compter de sa promulgation" (promulgation de la loi, Ndlr).
Si cet amendement met en œuvre l'engagement du Premier ministre et du chef de l'Etat, plusieurs textes d'application seront nécessaires et de nombreux problèmes techniques seront à résoudre, eu égard à l'ampleur du fichier et au nombre d'opérations à traiter. Sur le plan juridique, la prise en compte des observations du Conseil d'Etat a contribué à sécuriser le texte. Mais, compte tenu du caractère très sensible de la base de données ainsi constituée, le possible - voire probable - passage devant le Conseil constitutionnel, s'annonce comme un moment délicat.

Références : amendement n°CE634 (après l'article 22) au projet de loi relatif à la consommation.

 

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