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Social - RSA, jeunesse... Marc-Philippe Daubresse a posé ses premiers jalons

Trois mois après son entrée au gouvernement, le ministre de la Jeunesse et des Solidarités actives compte bien poursuivre les chantiers initiés par Martin Hirsch. Avec, toutefois, quelques petites réorientations : simplification du RSA socle, relance de la question des droits connexes locaux, recentrage des expérimentations en faveur des jeunes...

"Je ne suis pas d'accord pour dire que la montée en charge du RSA activité est décevante", déclare Marc-Philippe Daubresse, rappelant que le nombre de bénéficiaires du RSA activité a progressé de 48% depuis juin 2009 et soulignant que, comme cela avait été le cas lors du lancement du RMI ou de l'APA, "pour tout nouveau dispositif, il y a au départ un côté diesel…". "Moi, je n'ai jamais pensé qu'on monterait très vite sur ce dispositif", insiste également le ministre de la Jeunesse et des Solidarités actives, qui s'exprimait ce 15 juin dans le cadre d'une rencontre organisée par l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis). "Quoi qu'on en dise, le RSA est une vraie novation, une réelle avancée sociale", ajoute le successeur de Martin Hirsch, qui met par ailleurs en avant le fait que le RSA activité, conçu dans une période de baisse du chômage, a subi "un indéniable effet crise" dès lors que "l'activité s'est raréfiée". Il prévoit de ce fait que l'on assistera bientôt, avec les prémices de sortie de crise, à "une stabilisation du RSA socle" (ex-RMI) et à une hausse côté RSA activité, en lien notamment avec une reprise de l'intérim et du travail à temps partiel.
Le ministre a toutefois évoqué le lancement d'une enquête qualitative visant à mieux connaître les raisons du non-recours au RSA activité - ou du moins à confirmer les causes pressenties : méconnaissance, caractère "stigmatisant", "peur que l'on fouille dans mes revenus", hésitation à effectuer des démarches pour une somme parfois modeste… Et a indiqué qu'il s'agissait aujourd'hui d'"aller chercher les prescripteurs" que sont notamment les maires et les présidents de départements en tant qu'employeurs, citant le cas des personnels à temps partiel dans le domaine de la restauration scolaire, dont une partie peuvent certainement bénéficier du RSA activité. Une lettre cosignée par le président de l'Association des maires de France (AMF) sera ainsi prochainement adressée aux élus locaux. D'autres démarches comparables sont en cours avec l'ADF mais aussi, côté logement social, avec l'USH.

 

Droits connexes : reprendre la proposition Létard

S'agissant du RSA socle, Marc-Philippe Daubresse le redit : "C'est compliqué..." Le "nouveau dispositif de gouvernance" n'est pas au point, "le circuit" entre mairie, conseil général, Pôle emploi et autres éventuels intervenants "n'est pas séquentiel". Et le ministre de constater par exemple que "Pôle emploi ne retourne pas forcément vers le conseil général même lorsque le bénéficiaire aurait besoin d'un accompagnement social". Résultat : "de grandes disparités dans la gestion selon les départements" alors même, juge-t-il, que "l'Etat doit rester garant d'un égal accès à une prestation sociale sur tout le territoire". Marc-Philippe Daubresse a déjà rencontré des représentants des travailleurs sociaux des départements, des présidents de conseils généraux, la Cnaf, le président de Pôle emploi… et compte bien "simplifier le RSA socle". Mais pas forcément en modifiant la loi. La mise en œuvre d'une "charte de bonnes pratiques" pourrait, estime-t-il, s'avérer suffisante.
Un regard critique, aussi, sur la question des droits connexes locaux. Lorsque des collectivités (des régions par exemple) continuent d'accorder le bénéfice de certaines aides ou avantages tarifaires en fonction du statut et non des ressources, "cela peut être mis en brèche, cela me gêne", déclare le ministre. Il y a pourtant eu le rapport Desmarescaux qui, en mai 2009, s'était penché sur la question et avait débouché deux mois plus tard sur la signature d'une "déclaration commune" (voir nos articles ci-contre). "Le rapport Desmarescaux est partiel. Il ne prend pas en compte toutes les questions que je me pose", tranche Marc-Philippe Daubresse qui, alors qu'il était rapporteur du projet de loi RSA à l'Assemblée, avait tenté en vain de faire passer des amendements plus coercitifs sur ces droits connexes locaux. "On répond toujours que ce serait une atteinte à l'autonomie des collectivités. Je n'en suis pas persuadé, ça dépend comment on présente le dispositif." Là encore, il ne prévoit pas a priori d'élaborer de nouveau texte… mais estime en revanche qu'il serait intéressant de se repencher sur le volet droits connexes de la proposition de loi Létard relative à la réforme des minima sociaux adoptée par le Sénat en janvier 2007 puis abandonnée en lien avec la préparation du RSA.

 

Sept territoires "laboratoires"

En marge du dossier RSA, il y a maintenant aussi le RSA jeunes. Le décret relatif à l'extension du RSA aux jeunes de moins de 25 ans, dont on connaît déjà le contenu (voir notre article du 1er juin), est bien "dans les tuyaux". Il devrait être publié "avant la fin du mois" ou, au plus tard, d'ici la mi-juillet, pour un premier versement au 5 octobre. L'objectif de 160.000 jeunes concernés avancé l'an dernier par le gouvernement est-il toujours d'actualité ? A l'heure actuelle, non, il n'y a plus d'objectif chiffré. Car comment, s'interroge le ministre, savoir exactement combien de jeunes ont travaillé suffisamment au cours des trois dernières années pour prétendre à cette nouvelle prestation ? Et puis, reconnaît-il, "c'est déjà compliqué avec les adultes, alors les jeunes… je ne suis pas sûr qu'ils vont se précipiter". Il assure en tout cas qu'il y aura "largement ce qu'il faut" pour le financer, comptant notamment sur les excédents du FNSA.
S'agissant des autres dossiers du volet "jeunesse" de son ministère, il prévoit bien de poursuivre la démarche expérimentale concernant les politiques en faveur des jeunes mise en place avec le Fonds d'expérimentation pour la jeunesse. Il envisage en revanche de dépasser le stade des 300 expérimentations initiées par Martin Hirsch, pour se recentrer sur six ou sept territoires des "laboratoires" regroupant plusieurs dispositifs "structurants" liés à l'accès à l'autonomie des jeunes (Marc-Philippe Daubresse estime par exemple qu'un projet de prévention du décrochage scolaire tel que le dispositif "Espadon - Espace partagé des données pour les jeunes sans solution" proposé à Nantes est "structurant" tandis que des opérations d'aide au permis de conduire l'est moins…). Ce "test", qui serait mis en place pour plusieurs années, concernerait deux territoires ruraux, deux semi-urbains, deux franciliens et un territoire d'outre-mer.
Concernant le service civique, on saura que l'Agence présidée par Martin Hirsch et officiellement installée le 18 mai est bien sur les rails et bénéficiera des crédits prévus, que 3.000 à 4.000 volontaires sont "déjà dans les tuyaux" et qu'il s'agit d'atteindre "à terme, 10% d'une classe d'âge". Mais aussi que le ministre tient à inclure dans le parcours des jeunes concernés un volet "accompagnement social renforcé" et mettre l'accent sur l'orientation professionnelle. A propos d'orientation d'ailleurs, on notera que le délégué interministériel à l'orientation sera nommé dans les dix ou quinze jours qui viennent. Priorité immédiate : "unifier l'accès à l'information et monter un portail internet unique". Pour, à terme, "bâtir le service public de l'orientation".
Interrogé sur la "dotation autonomie" un temps envisagée sous Martin Hirsch, Marc-Philippe Daubresse ne tranche pas : "Je regarde cela de près car c'est assez compliqué. D'autres idées sont à creuser, comme celle d'un prêt social dont pourraient entre autres bénéficier certains étudiants n'ouvrant pas droit à une bourse. Plusieurs solutions sont donc à expérimenter." Avec une première réponse "plutôt en fin d'année".
 

Claire Mallet

 

 On saura aussi que…

- Le président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale sera nommé "d'ici la fin du mois".
- Le devenir des missions locales, inquiètes quant à la pérennité de leurs moyens : "On y travaille. En veillant notamment à la cohérence entre l'action des missions locales et les nouvelles politiques d'insertion mises en place en lien avec le RSA." Une table ronde réunissant des représentants des missions locales, des conseils généraux et de Pôle emploi sera organisée à l'automne.
- Le Conseil national de l'économie sociale et solidaire sera installé à la rentrée de septembre.
- Associations : le ministre a demandé à son cabinet d'élaborer un "tableau de bord" recensant l'état d'avancement des engagements pris dans le cadre de la Conférence nationale de la vie associative de décembre dernier. Ce bilan sera prochainement présenté à la conférence permanente des coordinations associatives (CPCA).