Culture - Régime des intermittents : "indispensable", mais pas "immuable"
Le gouvernement a été clair : malgré leurs demandes répétées, le Medef, pas plus que la Cour des comptes, n'obtiendront la remise en cause, et encore moins la suppression, du régime des intermittents. Mais, à force d'insistance, ces deux organisations auront au moins réussi à faire bouger les lignes. La preuve avec la prise de position de la Fesac (Fédération des entreprises du spectacle vivant, de la musique, de l'audiovisuel et du cinéma), qui regroupe la plupart des organisations professionnelles du secteur.
"Il y a d'autres solutions que le statu quo ou la suppression"
Dans un communiqué du 10 mars 2014, la Fesac - qui représente les employeurs - affirme ainsi que s'il est "indispensable", le régime des intermittents du spectacle n'est pas pour autant "immuable". Pour se faire mieux comprendre, la Fesac prend soin d'affirmer qu'"il y a d'autres solutions que le statu quo ou la suppression".
Les organisations signataires du communiqué se disent donc "prêtes et disponibles" pour faire évoluer le régime des intermittents du spectacle. Elles
rappellent en outre que la profession "s'est engagée
depuis longtemps dans la régulation du recours à l'intermittence", à travers différents mécanismes conventionnels.
Les employeurs du secteur du spectacle en profitent pour remettre sur le devant de la scène certaines de leurs propositions de réforme
des annexes VIII et X de la convention Unedic. La principale d'entre elles consisterait à interrompre le versement des indemnités une fois que le cumul des revenus du travail et des allocations chômage atteint un plafond mensuel ou annuel de revenu. Selon la Fesac, plusieurs simulations effectuées par Pôle emploi et l'Unedic montrent que de telles mesures "sont susceptibles de générer de réelles économies".
Les organisations signataires du communiqué demandent donc "que ces propositions soient étudiées en priorité", dans la mesure où "elles
expriment la capacité du secteur à évoluer au sein de la solidarité interprofessionnelle sans mettre en danger le fonctionnement de l'un des domaines les plus dynamiques de notre pays, et dont l'apport à l'économie nationale et à l'image internationale de la France, n'est aujourd'hui plus contesté".
Rallumer le feu ?
Cette prise de position est d'autant plus importante que 27 organisations d'employeurs ont signé le communiqué, dont le Syndeac (Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles), l'APC (Association des producteurs de cinéma), le Sirti (Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes) ou TLSP (Union des télévisions locales de service public). On note toutefois l'absence de quelques organisations membres de la Fesac, à l'image de la Ficam (Fédération des industries du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia).
Les propositions de la Fesac ne sont pas vraiment révolutionnaires. Elles se gardent, par exemple, d'évoquer une sortie des techniciens du spectacle - aux revenus plus stables - du régime des intermittents pour réserver ce dernier aux seuls artistes. Rien non plus, côté employeurs, sur la transformation progressive de l'intermittence en CDI. Pourtant, sur un sujet aussi explosif que celui des intermittents du spectacle, la seule évocation de pistes de réforme suffit à relancer le psychodrame. Il n'est pas sûr en effet que le gouvernement, qui s'emploie depuis des semaines à déminer le terrain et à enterrer toute velléité de réforme, apprécie beaucoup l'initiative. Pas sûr non plus que les collectivités soient ravies à l'idée d'une éventuelle ouverture de négociations sur le sujet, alors qu'approche la saison des festivals...
Jean-Noël Escudié / PCA
La FNCC marche sur des œufs
Dans un communiqué du 5 mars 2014, la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC) prend position... sans prendre position. D'un côté, elle rappelle que, n'étant pas partie prenante aux négociations, elle "n'a pas vocation à se prononcer sur telle ou telle option", même si elle constate au passage que "la tension est vive" sur le dossier. Aussi, "la FNCC souhaite avant tout que de grandes précautions soient prises quant à toute modification trop radicale de la situation actuelle". Non sans une certaine emphase, la Fédération n'hésite d'ailleurs pas à élever la question du régime des intermittents au rang d'"enjeu de civilisation"...
De l'autre côté, en tant que financeur du spectacle vivant et première concernée par le risque d'annulation de festivals, la FNCC estime qu'un certain nombre d'aspects du régime des intermittents "peuvent être améliorés". En pratique, elle s'aligne sur les propositions formulées par l'Assemblée nationale ou le Sénat (voir nos articles ci-contre du 19 décembre et du 30 avril 2013) : déplafonnement de l'assiette des cotisations et limitation du taux maximal d'allocation, limitation du cumul entre rémunération et indemnité, lutte contre les abus du recours au CDD d'usage, "rééquilibrage" des situations entre artistes et techniciens... Des propositions plutôt consensuelles et qui visent davantage à toiletter et améliorer le régime plutôt qu'à le réformer véritablement.
JNE/PCA