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Culture - Intermittents du spectacle : la Cour des comptes revient à la charge

Hasard ou sage précaution ? La Cour des comptes a rendu public son référé sur "Le régime d'indemnisation du chômage à l'issue des emplois précaires" à l'approche de l'hiver, autrement dit bien loin de la prochaine saison des festivals. Car s'il aborde un thème plus large que les seuls intermittents du spectacle - en traitant aussi des CDD et des intérimaires -, le référé revient une nouvelle fois à la charge sur un régime d'indemnisation du chômage exorbitant du droit commun. La Cour fait preuve en l'occurrence d'une constance que les intéressés ne manqueront pas de qualifier d'acharnement, puisqu'elle a déjà consacré un chapitre au régime des intermittents dans son rapport public de 2012 (voir notre article ci-contre du 14 février 2012).

Cinq euros d'allocations pour un euro de cotisations

Le référé - en date du 19 septembre, mais rendu public le 26 novembre - est adressé aux ministres de l'Economie et des Finances, du Travail et du Budget. Il relève à nouveau que "malgré l'augmentation de leurs cotisations depuis 2003, le besoin de financement du régime des annexes 8 et 10 [de la convention Unedic, ndlr] reste très élevé (environ un milliard d'euros chaque année pour 1,2 milliards d'allocations versées et seulement 0,239 milliard de cotisations perçues), en raison des règles d'indemnisation favorables de ce régime et de l'élargissement de son champ d'application au fil du temps". Le ratio allocations/contributions est ainsi de 5,2 pour le régime des intermittents, quand il est de 0,5 pour le régime général.
Dans son référé, la Cour des comptes ne remet pas en cause l'existence d'un régime d'assurance chômage propre aux intermittents. Elle reconnaît même que "compte tenu précisément de leur situation d'intermittence, il est inévitable que ce régime soit en situation de besoin de financement : ce besoin exprime la solidarité sur laquelle est fondé le régime d'assurance chômage". Mais la Cour estime cependant que "la question du bon niveau de solidarité interprofessionnelle se pose", notamment au regard de l'indemnisation des intérimaires ou des salariés en CDD, qui sont eux aussi en situation précaire.

De l'intermittence à la permittence

La question du bon niveau de solidarité se pose d'autant plus que, selon le référé, les abus ne sont pas rares. La Cour observe ainsi que les intermittents du spectacle quittent, pour la plupart d'entre eux, leur situation de travail quelques jours après avoir effectué le nombre de jours nécessaires pour être titulaires de droits et qu'ils retrouvent souvent une activité au moment où ils ont épuisé leurs droits. Autrement dit, le dispositif actuel "constitue une incitation à la permittence (le fait d'associer structurellement des périodes de travail et de chômage et, de facto, d'utiliser les allocations comme un complément de rémunération)".
Face à ce constat maintes fois réitéré, la Cour renouvelle ses deux propositions principales. D'une part, poursuivre la démarche de différenciation entre les artistes et les techniciens (ces derniers étant généralement dans une situation moins précaire et pouvant donc se rapprocher du statut des intérimaires). D'autre part, augmenter les cotisations et les rendre progressives en fonction du recours plus ou moins important au travail intermittent (un peu sur le principe de la cotisation pour les accidents du travail). A ce jour, la réponse des ministères concernés n'a pas été rendue publique.