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Offre de soins - Réforme hospitalière : ce qui va changer pour les collectivités

En annonçant le 17 avril à Neufchâteau (Vosges) les grandes lignes de la réforme - qui reprennent la quasi-totalité des propositions du rapport Larcher -, Nicolas Sarkozy a définitivement lancé le chantier de la rénovation des hôpitaux. S'il faut attendre le dépôt du projet de loi sur l'offre de soins, qui devrait être discuté à l'automne prochain, pour connaître le contenu détaillé des différentes mesures et leurs modalités de mise en oeuvre, il apparaît déjà clairement que la réforme se traduira par un recul du rôle des collectivités. Un simple indice lexical en témoigne : les mots "collectivité" et "maire" - en qualité de président du conseil d'administration - ne sont pas cités une seule fois dans le discours du chef de l'Etat, alors que le directeur d'hôpital y est mentionné une vingtaine de fois.
Historiquement, le secteur de la santé - notamment dans sa dimension hospitalière - a toujours fait l'objet d'une extrême centralisation. Les très modestes tentatives de l'acte I de la décentralisation - avec le transfert de quelques compétences comme la lutte contre la tuberculose ou certains dépistages - ont d'ailleurs été remises en cause par l'acte II, qui a vu le retour à l'Etat de ces compétences. Et les quelques tentatives dans le cadre des possibilités d'expérimentation ouvertes aux collectivités territoriales - comme celle menée par la région Alsace en matière de santé - n'ont connu aucune suite. A défaut de décentralisation, le secteur de la santé a néanmoins bénéficié d'une certaine déconcentration, avec en particulier la création des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) bientôt remplacées par des agences régionales de la santé (ARS) aux pouvoirs élargis.
Dans les grandes lignes de la réforme présentées par le chef de l'Etat, deux points principaux intéressent très directement les collectivités. Le premier concerne bien sûr la création des "communautés hospitalières de territoire", autrement dit la mise en réseaux de petits hôpitaux autour d'un hôpital référent et d'un projet médical commun. Nicolas Sarkozy comme Roselyne Bachelot ont certes bien pris soin de préciser que la mise en place de ces réseaux - et les reconversions des services actifs en soins de suite ou longs séjours qui accompagneront inévitablement la mise en place des communautés dans nombre d'hôpitaux locaux - ne serait pas imposée mais se ferait au contraire dans le cadre d'une large concertation associant tous les acteurs. Mais les marges de manoeuvre des collectivités concernées seront très limitées en pratique. Nicolas Sarkozy a en effet d'ores et déjà "demandé à Roselyne Bachelot que les aides à la contractualisation et les subventions du programme hôpital 2012 bénéficient davantage aux hôpitaux publics qui forment une communauté hospitalière de territoire". Or, aucun hôpital n'a les moyens de se passer de cette enveloppe d'aide à l'investissement et à la modernisation d'une dizaine de milliards d'euros.
Sur la gouvernance hospitalière, le chef de l'Etat a été plus clair encore : "Il faut à l'hôpital public un patron et un seul [...]. Ce patron, c'est le directeur." Rappelant qu'il a siégé durant vingt ans dans un conseil d'administration (celui de l'hôpital de Neuilly), Nicolas Sarkozy "met là aussi au défi quiconque de [lui] expliquer que le conseil d'administration de l'hôpital administre". Le conseil d'administration deviendra donc un simple conseil de surveillance, sur le modèle de la nouvelle gouvernance des entreprises, tandis que l'essentiel du pouvoir de décision sera concentré entre les mains d'un directoire présidé par le directeur de l'hôpital et dont le vice-président sera le président de la commission médicale d'établissement (CME). Le débat sur la place des élus dans la gouvernance hospitalière n'a certes rien de nouveau, mais le chef de l'Etat a, pour la première fois, choisi de trancher dans le vif. Non content de limiter les compétences des élus en ce domaine, il évoque même ouvertement la possibilité d'un abandon de la présidence du conseil de surveillance. Tout en indiquant ne pas avoir "de religion en la matière", et en laissant à Roselyne Bachelot le soin de conduire cet aspect de la réforme "avec maestria", Nicolas Sarkozy a ainsi déclaré que "le président du conseil pourrait être élu soit au sein du collège des élus, soit au sein du collège des personnalités qualifiées [...]. Je pense qu'il faudrait laisser une certaine souplesse. Il est des élus très engagés, pourquoi les en empêcher ? Il est des élus qui ne s'y intéressent pas, pourquoi leur donner une place statutaire ?".
Au-delà de l'intervention du chef de l'Etat, le gouvernement se prépare à donner un autre signal fort de la reprise en main du secteur de la santé. Marie-Caroline Bonnet-Galzy, inspectrice générale des affaires sociales et qui était jusqu'alors la secrétaire générale des ministères sociaux, sera en effet très prochainement nommée directrice de l'ARH d'Ile-de-France (avant de prendre la tête de la future ARS) et chargée en parallèle d'une mission nationale sur la mise en place des ARS.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

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