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Haut débit - Qui pilote l'aménagement numérique ?, s'interrogent les collectivités

Résorption des zones blanches et déploiement de la fibre optique, les collectivités ont rappelé leurs rôles et leurs attentes lors de la réunion du Comité des réseaux d'initiative publique.

"Les collectivités n'ont pas à rougir des choix et des investissements qu'elles ont fait", s'est  réjoui le sénateur de Moselle Philippe Leroy lors de la réunion plénière du Comité des réseaux d'initiative publique (Crip), centrée sur deux thèmes : le haut et le très haut débit. Créé par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) fin 2004, le comité a accueilli, le 17 septembre à Paris, les représentants de neuf collectivités (Aquitaine, Auvergne, Bourgogne, Moselle, Oise, Loiret, Manche, Hauts-de-Seine, Vendée). A l'heure actuelle, 102 projets d'infrastructures de télécommunication sont portés par des collectivités. 86 projets majeurs couvrent chacun plus de 60.000 habitants et 56 projets sont déjà en exploitation. Les investissements consentis représentent de 1,4 à 2 milliards d'euros.

 

Des solutions pour les zones blanches haut débit

Pourtant, les zones blanches du haut débit représentent encore environ 500.000 lignes non-éligibles à l'ADSL, soit moins de 2% de la population. Les collectivités disposent de plusieurs technologies, filaires, hertziennes terrestres ou satellitaires, pour remédier à cette situation (lire l'article ci-contre : "L'Avicca fait le point sur les réseaux d'initiative publique, le wimax et le câble"). S'agissant des solutions hertziennes, l'Arcep a rendu public, le 15 septembre dernier, le résultat du contrôle effectué au 30 juin sur le respect des obligations de déploiement des titulaires d'autorisations d'utilisations de fréquence wimax. Les collectivités qui avaient vaillamment décroché des licences se montrent plus ou moins mesurées sur cette technologie qui ne tient pas toutes ses promesses : pour l'Aquitaine ce "n'est ni l'enfer, ni le paradis", tandis que la Moselle n'hésite pas à parler "d'arnaque, comparable aux emprunts russes".
L'année 2008 a vu émerger de nouvelles offres satellitaires. Ces solutions représentent un complément pour couvrir des foyers éloignés pour lesquels le coût des solutions terrestres ne serait pas économiquement supportable.
Enfin, certains soutiennent désormais une initiative pour inscrire, au niveau européen, le haut débit dans le cadre du service universel du téléphone. Si, en terme social de réduction de la fracture numérique, cette initiative est jugée intéressante, le président de l'Arcep, Paul Champsaur, a prévenu que "le service universel ne constitue pas nécessairement un outil adapté pour l'extension du haut débit". Il estime en effet qu'"il serait préférable d'accompagner les initiatives locales pour couvrir les zones blanches [...] dans un souci d'efficacité et de cohérence de l'investissement public". Cette initiative pourrait même avoir pour effet un gel des investissements, y compris ceux des collectivités.

 

La fibre optique pour nouvel horizon

Les collectivités interviennent également en faveur du déploiement de la fibre jusqu'à l'abonné (FTTH). Elles peuvent favoriser ces déploiements par le recueil d'informations et la délivrance d'autorisations, la mise à disposition d'infrastructures de génie civil, la pose de fourreaux de réserve à l'occasion de tous les travaux de voirie ou encore déployer un réseau public en complément de l'initiative privée.
La loi de modernisation de l'économie (LME) entrée en vigueur le 4 août 2008 prévoit ainsi un dispositif de mutualisation de la partie terminale des réseaux. L'Arcep est chargée de déterminer les conditions techniques et tarifaires de cette mutualisation, notamment la localisation du point de mutualisation. Elle a engagé les premiers travaux et lancé une consultation publique, dont la synthèse est prévue d'ici la fin du mois de septembre.
Le déploiement du très haut débit passe aussi par l'utilisation des infrastructures de génie civil existantes, qui représenteraient un coût prohibitif s'il fallait les reconstruire.

 

De nouveaux outils pour agir

Afin de définir au mieux leurs projets et de favoriser le déploiement de nouveaux réseaux, les collectivités territoriales devraient disposer désormais d'informations précises sur les réseaux existants. Une disposition a été introduite en ce sens dans la LME, le décret d'application est attendu d'ici la fin de l'année.
Un autre projet de décret portant sur les informations relatives à la publication des informations sur la couverture du territoire par les services de communications électroniques est également en cours de préparation. Ce décret, pris en application de l'article L.33-1 du Code des postes et des communications électroniques, permettra notamment aux collectivités de localiser les zones blanches situées sur leur territoire. La LME a également prévu un dispositif opérationnel pour permettre aux communes et à leurs groupements de mettre en oeuvre le principe, posé par la loi du 5 mars 2007, de l'utilisation partagée entre les opérateurs des infrastructures publiques de génie civil du câble. Cela devrait apaiser les conflits "insupportables" entre les communes câblées et Numéricâble, notamment en Moselle.

 

Un pilote pour l'aménagement numérique

Quatre ans après l'adoption de l'article L.1425-1 du Code général des collectivités territoriales, la LME a confié à l'Arcep la mission d'établir un premier bilan de l'intervention des collectivités. Ce rapport doit être remis au parlement et au gouvernement avant le 31 décembre 2008. Globalement, les collectivités continuent de regretter l'absence de vision politique d'ensemble pour l'aménagement numérique du territoire. "Il faut que l'Etat disent qui fait quoi : région, département, agglomérations ?"
Autre souhait des collectivités : elles veulent voir leur compétence reconnue au sein du groupe des experts de l'Arcep. Ce groupe devrait désormais être ouvert à leurs représentants, a promis Paul Champsaur. "Les collectivités ne veulent pas jouer les pompiers du très haut débit, comme elles l'ont fait ces dix derniers années pour le haut débit", a averti Christian Paul, président du groupe de travail TIC de l'Association des régions de France.

 

Luc Derriano / EVS, et Catherine Ficat

 

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