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Social / Emploi - Prime d'activité : ce qui va changer

La loi relative au dialogue social et à l'emploi - qui vient notamment simplifier un certain nombre de règles dans les entreprises, rénover certaines dispositions dans les domaines de la formation et de l'apprentissage (voir notre article du 28 juillet), sécuriser le régime des intermittents du spectacle et créer une nouvelle prime d'activité - a été promulguée le 17 août. Le texte avait été définitivement adopté le 23 juillet et l'essentiel de son contenu avait été validé par le Conseil constitutionnel le 13 août.
Les articles 57 à 62 (titre IV) de cette loi du 17 août 2015 mettent en place la prime d'activité, avec pour objectif une entrée en vigueur effective au 1er janvier 2016. Cette nouvelle prestation remplace à la fois le RSA activité (environ 750.000 allocataires), qui n'a que très partiellement réussi à atteindre sa cible, et la prime pour l'emploi (PPE, environ 5,3 millions de bénéficiaires), jugée à l'inverse insuffisamment ciblée.

Incitation à l'emploi et soutien du pouvoir d'achat 

Reprenant le principe qui s'applique déjà au RSA, la prime d'activité "a pour objet d'inciter les travailleurs aux ressources modestes, qu'ils soient salariés ou non salariés, à l'exercice ou à la reprise d'une activité professionnelle et de soutenir leur pouvoir d'achat". Elle s'adresse, sous condition de ressources, à toute personne âgée d'au moins 18 ans, résidant en France de manière stable et effective et qui perçoit des revenus tirés d'une activité professionnelle.
L'ouverture aux jeunes de 18 à 25 ans est l'une des principales novations de la prime d'activité par rapport au RSA activité (la condition d'âge étant toutefois maintenue pour le RSA socle, qui n'est pas concerné par la réforme). Les étudiants, les stagiaires ou les apprentis pourront ainsi accéder à cette nouvelle prestation, sous réserve qu'ils perçoivent l'équivalent d'au moins 0,78 fois le Smic. La prime d'activité pourrait ainsi concerner environ un million de jeunes actifs de 18 à 25 ans.
La prime d'activité sera versée aux actifs - à temps plein ou à temps partiel - qui perçoivent jusqu'à 1,2 fois le Smic. Elle sera également ouverte aux indépendants et calculée alors sur la base d'un montant du chiffre d'affaires, qui reste à déterminer par décret.

Une allocation différentielle

Comme le RSA, la prime d'activité est une allocation différentielle, dont le montant est égal à la différence entre, d'une part, un montant forfaitaire - variable en fonction de la composition du foyer et du nombre d'enfants à charge - augmenté d'une fraction des revenus professionnels des membres du foyer, et qui peut faire l'objet d'une ou de plusieurs bonifications et, d'autre part, les ressources du foyer, "qui sont réputées être au moins égales au montant forfaitaire".
La bonification "est établie pour chaque travailleur, membre du foyer, compte tenu de ses revenus professionnels. Son montant est une fonction croissante des revenus situés entre un seuil et un plafond. Au-delà de ce plafond, ce montant est fixe". Le montant forfaitaire, la fraction des revenus professionnels des membres du foyer, les modalités de calcul et le montant maximal de la bonification seront fixés par décret. Le montant forfaitaire et le montant maximal de la bonification seront revalorisés annuellement en fonction de l'évolution des prix à la consommation, hors tabac.
Selon les exemples présentés par le gouvernement, un célibataire sans enfant travaillant à temps plein percevra une prime de 132 euros par mois, soit 67 euros de plus qu'avec le RSA activité. Pour une mère isolée avec un enfant et travaillant à tiers temps, le montant sera de 220 euros.

Des mécanismes largement calqués sur le RSA activité

En termes de modalités de fonctionnement, le mécanisme de la prime d'activité est beaucoup plus proche du RSA activité que de la PPE. Ainsi, contrairement à la PPE mais à l'image du RSA, le calcul du droit à la prime et la détermination de son montant prendront en compte les revenus du ménage, qui ne devront pas dépasser un plafond à fixer par décret. Ces revenus prendront en compte les allocations et les aides au logement.
De même, la gestion et le versement de la prestation seront assurés par les CAF, comme pour le RSA, alors que la PPE était gérée et versée par l'administration des finances. Le paiement de la prime sera mensuel comme dans le cas du RSA activité, alors que la PPE était versée une fois par an. Le calcul de montant de la prime devrait être assuré sur la base d'une déclaration trimestrielle de ressources par les bénéficiaires (revenus du travail et revenus de remplacement). Enfin, alors que l'attribution de la PPE était automatique (car déterminée sur la base des déclarations de revenus), les futurs bénéficiaires de la prime d'activité devront effectuer une démarche auprès de leur CAF pour demander la prestation.

Une réforme à coût nul ?

La mise en place de la prime d'activité est supposée se faire à coût nul. Les crédits affectés à cette prestation - intégralement financée sur le budget de l'Etat, comme le RSA activité et la PPE - seront en effet équivalents au montant cumulé des deux prestations qu'elle remplace, soit environ quatre milliards d'euros. Ce jeu à somme nulle repose toutefois sur un pari risqué car, si la prime d'activité touche davantage de "travailleurs pauvres" que le RSA activité - ce que le gouvernement affirme souhaiter -, des surcoûts devraient rapidement apparaître.
Enfin, la réforme est loin d'être neutre pour les bénéficiaires. Elle devrait en effet favoriser les travailleurs gagnant au moins la moitié du Smic. En revanche, les anciens bénéficiaires de la PPE les plus "aisés" perdront le bénéfice de cette prestation, mais sans retrouver un droit au RSA activité. Au final, le gouvernement estime qu'environ 1,2 million de ménages gagneront à la mise en place du nouveau dispositif, tandis qu'environ 800.000 foyers y perdront. L'indifférence qui a accompagné la mise en place de cette réforme - objet d'un large consensus parmi les politiques et les partenaires sociaux (voir notre article ci-contre du 27 juillet 2015) - pourrait alors céder la place à des débats plus animés.

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : loi n°2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi (Journal officiel du 18 août 2015).

 

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