Archives

Commande publique - PPP : pédagogie, prudence et paradoxe...

"Pédagogie" : tel était le mot d'ordre des troisièmes Rencontres internationales des partenariats public-privé (PPP) organisées le 21 et 22 octobre par le Club des partenariats public-privé, club qui rassemble une trentaine d'acteurs de ce secteur, tant publics que privés. Pédagogie à l'égard principalement des acheteurs publics et des élus locaux, présentés comme réticents, par manque d'information, à s'engager sur des contrats de partenariat. Pas moins de deux ministres - Défense et Relance - et deux secrétaires d'Etat - Justice, Commerce et artisanat - avaient fait le déplacement pour convaincre des bénéfices de ce montage juridique.

 

2008-2009 : "épanouissement" des PPP 

Les intervenants sont tout d'abord revenus sur la forte actualité législative de ces derniers mois : la loi du 28 juillet 2008 relative aux contrats de partenariat a constitué une  "amélioration très significative de la législation" a déclaré Noël de Saint-Pulgent, président de la Mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat (Mappp), service rattaché au ministre de l'Economie. Quant à la loi d'accélération des programmes de construction et d'investissement (APCIPP) du 17 février 2009 et plus largement les financements débloqués dans le cadre du plan de relance, ils ont assuré ou facilité le montage de grands projets comme le tram-train de la Réunion ou des projets de ligne à grande vitesse, par exemple Tours-Bordeaux ou Le Mans-Rennes.
Les ministres ont salué "l'épanouissement" des PPP dans de nombreux domaines : rénovation des universités, regroupement des services centraux du ministère de la Défense dans le sud de Paris, construction de prisons et de palais de justice, achat et maintenance d'hélicoptères militaires ou projets hospitaliers… Au-delà de ces projets emblématiques, souvent de très grande ampleur, la Mappp constate, à une échelle plus modeste, sa saisine pour avis par de nombreux acteurs publics : 250 projets seraient en cours de montage. Sur les 33 projets attribués à ce jour, 16 concernent l'éclairage public, le reste essentiellement des investissements sportifs (stades, piscines) ou culturels (écoles de musique, internet haut débit).

 

AMF : "Il faut améliorer la formation des fonctionnaires territoriaux"

Le président de l'Association des maires de France, Jacques Pélissard, a présenté les PPP comme un instrument "tout à fait intéressant dans une période où l'Etat se serre la ceinture". Il a déploré l'insuffisante formation du personnel tant des collectivités que des préfectures et appelé à l'orientation de formations du CNFPT sur ce thème.
Afin de parvenir à une "sobriété énergétique" des bâtiments municipaux, les contrats de performance énergétique lui semblent être le "meilleur outil". Ces contrats, répartis sur tout le territoire, seraient accessibles aux entreprises de taille moyenne et permettraient aux collectivités de rémunérer les entreprises selon le résultat atteint. La Mappp a précisé qu'elle "veillait" à cette nécessaire ouverture aux PME-PMI afin que ne "se développe pas l'image d'un contrat chasse gardée des grands groupes". Eiffage, Vinci et Bouygues n'ont pas paru particulièrement inquiets de cette possible ouverture : la taille des projets et le fait même de rassembler dans un même contrat conception, réalisation et maintenance, les désigne naturellement comme les principaux bénéficiaires de ce type de montage.

 

Un "mariage" placé "sous le signe du business" 

Si Patrick Devedjian a assuré que cet outil était désormais "dépolitisé", tout le monde ne semble pas encore convaincu : un atelier était d'ailleurs intitulé "Arguments pour convaincre l'autorité délibérante".  La Mappp a insisté à cette occasion sur la rapidité d'exécution, l'intérêt de n'avoir qu'un seul interlocuteur responsable de l'ensemble du projet (de la conception à la maintenance), la garantie d'avoir au bout de 15 ou 20 ans un équipement bien entretenu. Elle a mis en garde contre les "fantasmes sur les recettes annexes", qui ne doivent constituer qu'une "cerise sur le gâteau", et non un argument de fond pour le choix en faveur du PPP. Reste un paradoxe : si tout fonctionne bien en loi Maîtrise d'ouvrage publique, que la collectivité dispose des ressources en interne pour gérer au mieux des projets complexes, elle n'a probablement pas besoin de recourir au contrat de partenariat. Dans le cas contraire, ce montage peut donc être une solution intéressante si le projet rempli l'une des conditions d'éligibilité fixées par la jurisprudence (complexité, urgence, efficience). Or, vu la nature juridique du contrat, pour garder le contrôle du début de la procédure (notamment lors de l'évaluation des risques) au terme du contrat, la collectivité est condamnée à l'excellence... Une excellence qui a bien sûr un coût, qui n'est supportable ni par toutes les collectivités, ni pour tous les projets. Pour des projets de construction et entretien de bâtiments d'un montant inférieur à 10 millions d'euros, l'arbitrage est clairement défavorable au contrat de partenariat.
Bref, pour reprendre les termes d'un des participants, un "mariage", que l'on espère heureux mais incontestablement placé "sous le signe du business". Et donc très exigeant pour le partenaire public.


Hélène Lemesle
 

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis