Environnement - Lois Grenelle : la CCEN évalue le coût pour les collectivités à 1,84 milliard d'euros entre 2010 et 2022
Dans son bilan d'activité 2010, la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) juge "significatif" le coût pour les collectivités territoriales des textes d'application des lois Grenelle 1 et 2. La CCEN s'est vu soumettre 48 textes d'application des lois Grenelle, de juin 2009 jusqu'à la séance du 24 mai 2011. Le bilan consolidé de l'impact de ces textes pour les collectivités est estimé en année pleine à 219,32 millions d'euros, et à environ 1,84 milliard d'euros sur la période 2010-2022.
Six textes d'application du Grenelle "emportent les conséquences financières les plus importantes" pour les collectivités, estime la CCEN. Le décret et l'arrêté d'application relatifs aux caractéristiques thermiques et à la performance énergétique des constructions (réglementation thermique 2012) ont un coût évalué à 150 millions d'euros en année pleine. Le décret relatif aux dispositions de l'annexe environnementale prévue pour "les baux conclus ou renouvelés portant sur des locaux de plus de 2.000 mètres carrés à usage de bureaux ou de commerces" (1) est chiffré à 480 millions d'euros, soit 53 millions d'euros par an sur la période 2014-2022.
Le décret et l'arrêté relatifs à la surveillance de la qualité de l'air intérieur dans certains établissements recevant du public (ERP) , principalement les établissements scolaires et les maisons de retraite ont un coût global annuel estimé à 40,8 millions d'euros pour les collectivités, dont 37,5 millions d'euros pour les communes, 2,3 millions d'euros pour les départements et un million d'euros pour les régions. La CCEN indique avoir demandé des précisions avant de se prononcer sur ces textes. Une "concertation complémentaire" entre le ministère de l'Ecologie et l'Association des maires de France (AMF) a permis de réduire d'une part le périmètre des ERP concernés – en le limitant, par exemple, aux piscines au lieu de tous les établissements sportifs couverts, le coût de la mesure a pu être ramené de 33 à un million d'euros – et d'autre part la fréquence des contrôles. Au final, "le coût de ces textes a été réduit de manière significative", de 105 à 42 millions d'euros par an.
Le décret relatif aux bilans des émissions de gaz à effet de serre et au plan climat énergie territorial (PCET) "générerait pour les 440 collectivités potentiellement soumises à cette réglementation un coût global compris entre sept et douze millions d'euros", estime la CCEN. Après un premier report du texte, elle a exprimé un avis défavorable "au motif que le troisième niveau de mesure des gaz à effet de serre prévu par le projet, relatif aux émissions indirectement produites par les activités ou par l'exercice des compétences des collectivités, excède (…) le champ défini par la loi et n'est pas justifié". Le décret et l'arrêté relatifs aux attestations thermiques à établir au moment de la demande du permis de construire de bâtiments nouveaux ou parties nouvelles de bâtiment et au moment de l'achèvement des travaux, qui définissent les prescriptions de prise en compte de la réglementation thermique 2012, auraient un coût annuel de 2,5 millions d'euros à la charge des collectivités. Le décret relatif aux schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie (SRCAE) est chiffré à 2,23 millions d'euros par an, "imputable aux régions chargées de réaliser des études pour l'élaboration de ces schémas".
La CCEN relève aussi que, dans le cadre de l'examen des lois Grenelle, "plusieurs mesures ont été adoptées par amendement sans être accompagnées d'étude d'impact, même sommaires ou indicatives", alors que leurs coûts de mise en œuvre sont significatifs. "Tel est par exemple le cas de l'amendement présenté par le gouvernement au Sénat" relatif aux véhicules décarbonés (article 57 de la loi Grenelle 2). Les projets de décret et d'arrêté concernant les installations de recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables dans les bâtiments, soumis le 3 mars 2011 par le ministère de l'Ecologie à la CCEN, sont évalués à 450 millions d'euros entre 2012 et 2015, dont 20 millions d'euros pour les collectivités.
Enfin, "certaines mesures de portée générale, qui ne concernent pas prioritairement les collectivités locales, peuvent également représenter des coûts très élevés pour la société civile", souligne la CCEN. Elle cite le cas des textes sur les audits énergétiques à réaliser sur les installations de chauffage des copropriétés de plus de 50 lots, "susceptibles de générer un coût pour la société de l'ordre de 136,5 millions d'euros sur la période 2012-2016 (…). Les élus se sont interrogés sur la capacité des acteurs concernés à mettre en œuvre une mesure si ambitieuse".
(1) Article 8 de la loi Grenelle 2. Cette annexe entre en vigueur au 1er janvier 2012 pour les baux conclus ou renouvelés à partir de cette date, et en juillet 2013 pour les baux en cours. L'annexe prévoit que "le preneur et le bailleur se communiquent mutuellement toutes informations utiles relatives aux consommations énergétiques des locaux loués". Pour les preneurs, elle peut contenir des obligations de limitation de la consommation énergétique des locaux concernés.