L'Observatoire national de la protection de l'enfance essaie de faire le point sur la délinquance des MNA
Le 25 septembre, un terroriste islamiste blessait grièvement deux personnes rue Nicolas Appert, le siège de Charlie Hebdo lors des attentats de 2015, pourtant quitté depuis longtemps par le journal. L'enquête montrait rapidement que le criminel, d'origine pakistanaise, était, jusqu'au mois d'août 2020, pris en charge au titre de mineur non accompagné (MNA), alors qu'il était en réalité âgé de 25 ans... (voir notre article ci-dessous du 2 octobre 2020). Le département du Val d'Oise, ayant de forts soupçons sur son âge réel (a priori 22 ans lors sa prise en charge comme mineur), avait initialement refusé de le prendre en charge au titre de MNA, mais y avait été contraint par une décision du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Peu de temps avant l'attentat, la commission des lois de l'Assemblée nationale avait lancé une mission d'information sur les "problématiques de sécurité associées à la présence sur le territoire de mineurs non accompagnés". Elle visait alors "une augmentation récente de la délinquance, dans le quartier populaire de la Goutte d'Or du 18e arrondissement de Paris, mais aussi dans d'autres villes comme Rennes, Marseille, Lyon ou Montpellier, [qui] a contribué à ramener dans l'actualité le sujet de la prise en charge des mineurs non accompagnés". Le 24 septembre, veille de l'attentat, la mission d'information auditionnait l'Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE). Pour l'occasion, celui-ci avait préparé une note d'une dizaine de pages sur la question.
Après avoir rappelé quelques données sur les MNA (35.800 mineurs pris en charge par les départements au 31 décembre 2018, 17.022 nouveaux mineurs non accompagnés pris en charge en 2018, ont été également recensés par la mission MNA de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), en 2019, selon la mission MNA de la PJJ, 16.760 nouveaux mineurs non accompagnés ont été confiés aux services départementaux), l'ONPE appelle à la prudence. La note estime en effet que "concernant les situations très fortement relayées dans les médias de mineurs non accompagnés de moins de douze ans interpelés à plusieurs reprises à la suite de vols ou d'agressions, il s'avère que la plupart des juridictions et services éducatifs de France ne sont en réalité pas ou peu confrontés à ce type de situation, relativisant ainsi l'ampleur du phénomène. Pour autant, il ne s'agit pas de nier la gravité de la situation des individus (auteurs et victimes) concernés et le relatif désarroi des professionnels à cet égard. L'ensemble de la population des mineurs non accompagnés ne saurait être assimilée à ces phénomènes".
La note rappelle également que de nombreux MNA sont eux-mêmes victimes d'acte de délinquance, notamment de la part de réseaux organisés. Elle opère aussi une distinction entre différents cas de figure : le circuit des mineurs sollicitant l'ASE, celui des mineurs confiés à l'ASE et le circuit pénal. Sur ce dernier point, il apparaît que les MNA "sont plus souvent incarcérés que le reste des mineurs délinquants". Le rapport 2018 du contrôleur général des lieux de privation de liberté évoquait ainsi un tiers de MNA dans certains quartiers mineurs et jusqu'à 50% dans un établissement pénitentiaire pour mineurs. Pour sa part, le rapport 2019 de la Mission MNA fait état d'une augmentation de près de 50% des MNA incarcérés dans certains lieux de détention.
Sollicité sur des propositions par la mission d'information de l'Assemblée, l'ONPE avance plusieurs préconisations, comme le développement d'une meilleure connaissance mutuelle des acteurs concernés ou le renforcement de la coopération internationale avec les pays concernés (déjà engagée avec le Maroc).