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Aménagement du territoire - Les vacances studieuses de Michel Mercier

Lors de ses quatorze mois passés au secrétariat d'Etat à l'Aménagement du territore, Hubert Falco n'a eu de cesse de parler de la "Datar", ignorant volontairement le nouvel acronyme de Diact créé en 2005 pour traduire le passage de l'aménagement à la compétitivité des territoires. Un hommage posthume symbolique. Son arrivée mettait un terme à six mois d'absence à ce poste et intervenait après l'expérience malheureuse de la réforme de la carte judiciaire. De fait, il a surtout été là pour panser les plaies de restructurations importantes découlant de la réforme de la carte militaire. Mission menée à bon rythme : tous les contrats de redynamisation prévus cette année ont été signés dans les temps. Pour autant, les nombreuses réformes lancées (carte hospitalière, militaire, judiciaire, trésoreries) ont laissé un goût amer chez de nombreux élus. L'expression de "déménagement du territoire" lancée par le maire de Marmande, Gérard Gouzes, a connu un certain succès. Et c'est avec soulagement que l'arrivée d'un ministre de l'Espace rural et de l'Aménagement du territoire, en la personne de Michel Mercier, a été accueillie, lors du dernier remaniement. Mais il va avoir fort à faire. "Les défis sont énormes, nous devons faire face à des dynamiques qui ne sont pas propres à la France mais planétaires", estime Vanik Berberian, le président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF). Dans ses attributions, Michel Mercier se voit chargé de conduire la politique du gouvernement en matière d'aménagement et de développement des territoires. Il doit également concevoir et mettre en oeuvre, avec le ministre de l'Agriculture, la politique d'aménagement et de développement de l'espace rural. Et enfin, il doit piloter les politiques d'accompagnement des mutations économiques et de la politique d'implantation des administrations et des services publics dans la perspective d'un aménagement équilibré du territoire. Deux interactions fortes avec l'agriculture et l'industrie. La crise mondiale et son lot de plans sociaux risque de peser lourd sur les territoires les plus fragiles, les communes rurales. En témoigne les exemples récents de Malaucènes (Vaucluse), dont la papeterie, dirigée par le fabricant américain Schweitzer-Mauduit, a prévu de licencier ses 211 salariés en septembre, ou encore de l'équipementier automobile américain Molex qui a décidé de fermer son usine de Villemur-sur-Tarn (Haute-Garonne). Les dix nouveaux commissaires à la réindustrialisation qui disposent dans leur arsenal du tout nouveau fonds national de revitalisation des territoires (FNRDT) pourront colmater les brèches mais sans doute pas empêcher des prises de décision à l'autre bout de la planète.

 

300.000 hectares de terres urbanisées en six ans

Autre enjeu : l'espace rural, avec une tendance forte, le regain de démographique souligné par les données de l'Insee, rendant d'autant plus nécessaire le maintien des services publics. "L'une des caractéristiques de l'espace rural français est qu'il est bien desservi par rapport à d'autre pays, ce qui le rend attractif", explique Bernard Morel, démographe à l'Insee. Mais cette arrivée de nouvelles populations que l'on nomme les "néoruraux", n'est pas sans poser de problème pour la gestion de l'espace. Tous les six ans, près de 300.000 hectares de terres cultivables (l'équivalent d'un département) sont urbanisés, essentiellement pour la construction de pavillons. A terme, c'est l'approvisionnement du pays qui pourrait en pâtir. Ce défi capital pour le "développement durable" est pourtant passé au second plan des débats sur le Grenelle de l'environnement. Le problème reste entier, estime même André Thévenot, président de la FNSafer. Comment freiner le mitage et les déprises agricoles sans se heurter aux 36.000 aménageurs que sont les maires ? Où placer l'intérêt général ?
Curieusement, le poids excessif de la capitale autrefois fustigé n'est plus un problème lorsqu'il est question du Grand Paris. Sous prétexte de devoir rivaliser avec les mégapoles mondiales, les "villes-mondes", on en aurait presque oublié "Paris et le désert français". Mauvais signal pour l'aménagement du territoire ? Deux chiffres : le seul volet transports du Grand Paris est évalué à 35 milliards, bien plus que les 26 milliards du plan de relance pour l'ensemble du pays.
Et l'Europe dans tout ça ? Jusqu'ici, la politique régionale a davantage été un cadre de solidarité destiné à combler le retard des régions les plus pauvres. Le traité de Lisbonne parle désormais de "cohésion territoriale", ce qui pourrait laisser présager une réorganisation de l'utilisation des fonds structurels au profit de l'aménagement du territoire.
Si "la politique des Etats est dans leur géographie", c'est pourtant un économiste, Christian Saint-Etienne, qui a été chargé par le chef de l'Etat de se pencher sur une nouvelle stratégie d'aménagement du territoire en France. Son rapport remis le 29 juin doit servir de base à la réflexion du ministre... Pour l'heure celui-ci a multiplié les rencontres, avec les préfets (pour préparer le bilan d'étape de 2010 des contrats de projets et les élus. S'il est trop tôt pour dire ce qui en sortira, une bonne nouvelle attend les territoires ruraux cet automne : le lancement d'un nouvel appel à projets de pôles d'excellence rurale.

 

Michel Tendil

 

 

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