Aides aux restructurations - 400 opérations de revitalisation ont été conduites depuis 2002
Quel rapport entre la décision de Goodyear de supprimer la moitié des postes de son usine d'Amiens ou de celle et l'Etat de fermer le 601e régiment de circulation routière d'Arras ? Aucun, si ce n'est le vide laissé sur le territoire et l'urgence de répondre à la situation. D'un côté, on parle de revitalisation, de l'autre de restructuration Défense, mais l'objectif est le même : redonner vie au territoire, alors que dans les deux cas, environ 800 emplois sont amenés à disparaître.
Si l'affaire est bien menée par le trio entreprise-collectivité-Etat, passé le choc immédiat, ces mutations peuvent être une chance pour le territoire, à l'image du Creusot, ville souvent présentée comme modèle d'une reconversion réussie. A l'époque, il y a vingt-cinq ans, on ne parlait pas encore de mondialisation mais de "division internationale du travail", les outils étaient quasi inexistants. Il a fallu essuyer quelques plâtres (échec d'une reconversion dans le tertiaire dans les années 1990) pour sortir du tunnel. Aujourd'hui, les mutations sont nettement plus encadrées : contrats de site, contrats territoriaux, obligation de revitalisation pour les entreprises de plus de 1.000 salariés en cas de plan de licenciement de grande ampleur.
Depuis 2002, date de la loi de modernisation sociale qui a introduit cette obligation, environ 400 revitalisations ont été menées, dont une cinquantaine depuis 2008, selon un bilan présenté par Jean-François Robinet, sous-directeur pour les mutations économiques à la DGEFP, lors d'une journée organisée par le Cner (Conseil national des économies régionales), le 24 juin à Paris ("Accompagnement des reconversions, revitalisations, restructurations de défense : quelles nouvelles méthodes ?"). Mais ce bilan fait apparaître une très nette démarcation. Les régions du Sud-Ouest (Midi-Pyrénées, Aquitaine et Limousin) sont celles qui y ont le moins recours. L'expression, selon Jean-François Robinet, d'une "faible qualité de mobilisation des services de l'Etat et des partenaires locaux". Pourtant, fait-il remarquer, ces opérations permette de "disposer d'un argent frais qui n'est pas soumis aux règles communautaires sur les aides aux entreprises puisqu'il s'agit de subventions non-publiques".
De nouveaux outils
L'ampleur de la crise a conduit le gouvernement à prendre deux nouvelles mesures. Tout d'abord, la nomination des neuf commissaires à la réindustrialisation chargés d'accélérer les procédures en travaillant de pair avec les élus et les agences de développement locales. La panoplie des outils existants a été complétée par le tout nouveau fonds national de revitalisation des territoires (FNRDT), cogéré par Oséo, la Caisse des Dépôts et Bercy. Ce fonds est venu remplir un vide. En effet, certains bassins touchés par les restructurations étaient laissés de côté : l'obligation de revitalisation ne pouvait être mise en oeuvre soit en raison d'une liquidation ou d'un redressement judiciaire, soit du fait de la taille de l'entreprise (moins de 1.000 salariés). "Un territoire qui a souffert et qui est orphelin des conventions de revitalisation peut aujourd'hui demander à être éligible", a souligné Laurent Fiscus, directeur à la Diact. Annoncé en 2008, le FNRDT est à présent opérationnel. Un comité national de suivi saisi par les préfets de département est chargé d'instruire les demandes des élus. L'objectif du gouvernement est d'arriver à une trentaine de territoires éligibles. 135 millions d'euros sur trois ans sont ainsi prévus, dont plus de la moitié en 2009 (75 millions d'euros), sous forme de prêts bonifiés sans garantie aux entreprises. Le fonds viendra soutenir les projets les entreprises qui, en contrepartie, doivent s'engager à préserver ou créer des emplois sur le territoire. Seule faille du dispositif : il ne vise pas les grands groupes qui licencient de manière diffuse sur le territoire national, notamment chez les visiteurs médicaux.
Côté restructurations Défense (54.000 hommes, 83 sites concernés), les solutions sont encore différentes : contrats de redynamisation site de Défense ou plans locaux de redynamisation selon l'importance de la restructuration, sans compter la création de zones franches pendant une durée de cinq ans. Pour Jean-Marie Vanlerenberghe, le président de la communauté urbaine d'Arras, le compte y est : 6 millions d'euros de l'Etat, autant de la région, pour le développement économique et l'attractivité du territoire. Son seul regret va au périmètre de la zone franche. "On peut regretter qu'elle se limite au seul site militaire de 72 hectares ; ce n'est pas dans le coeur de ville que l'on va attirer des industrie lourdes, a-t-il fait valoir. On pensait qu'il épouserait le territoire de l'agglomération, mais on ne désespère pas." Un appel du pied à son ancien président de groupe au Sénat, Michel Mercier, désormais ministre de l'Espace rural et de l'Aménagement du territoire.
Michel Tendil