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Transports - Les trains Intercités sur la voie du renouveau

Un bilan de la réforme des trains Intercités ou trains d'équilibre du territoire (TET) a été dressé le 12 janvier par Alain Vidalies, secrétaire d'Etat chargé des transports, en présence des principaux artisans de ce vaste chantier engagé en novembre 2014. Après la conclusion des accords de reprise de 18 lignes par les régions et la signature d'une nouvelle convention d'exploitation entre l'Etat et SNCF Mobilités fin décembre 2016, l'heure est aujourd'hui à la mise en œuvre, en misant sur une relance de la fréquentation.

"Le gouvernement a répondu présent pour relever le défi de la renaissance des trains d'équilibre du territoire. Les résultats sont à la hauteur de l'ambition fixée". C'est avec le sentiment du devoir accompli qu'Alain Vidalies a dressé le 12 janvier le bilan de la réforme des trains Intercités ou trains d'équilibre du territoire (TET) entamée il y a un peu plus de deux ans. Devant les acteurs nationaux et régionaux réunis au ministère pour l'occasion, le secrétaire d'Etat aux Transports a rappelé les enjeux et les grandes étapes de la réforme dont le point d'orgue a été la nouvelle convention signée à la toute fin de l'année dernière entre l'Etat et SNCF-Mobilités pour l'exploitation des TET (lire notre encadré ci-dessous).

Un réseau à bout de souffle

Après avoir fait le constat que ces trains ne répondaient plus de manière satisfaisante aux attentes des voyageurs en termes de desserte et de qualité et de service, Alain Vidalies a décidé de confier en novembre 2014 à une commission pluraliste présidée par le député PS du Calvados Philippe Duron le soin d'effectuer un diagnostic complet de leurs difficultés et de formuler des recommandations pour les faire évoluer. Le rapport de la commission, remis le 25 mai 2015, a servi de socle à la "feuille de route" gouvernementale définie en juillet de la même année. Ce rapport faisait le constat d'un système à bout de souffle, avec une offre très hétérogène, parfois imbriquée avec les TER, d'une qualité de service dégradée du fait notamment du vieillissement du matériel roulant (plus de 35 ans en moyenne), d'un modèle économique des trains de nuit qui n'était plus viable et d'un déficit appelé à se creuser jusqu'à atteindre 550 millions en 2020.
Parmi ses principales préconisations, la commission Duron appelait à une clarification entre les services répondant à un besoin d'intérêt national et ceux répondant à des besoins régionaux. Elle proposait aussi un renforcement de l'exercice de la compétence d'autorité organisatrice, en recentrant le rôle de l'Etat sur les services d'intérêt national et invitait la SNCF à réaliser des efforts importants pour améliorer la qualité du service, et pour maîtriser ses coûts.
Sur cette base, le préfet François Philizot a été chargé de lancer une concertation région par région, aucun transfert automatique des lignes ne devant être imposé par l'Etat. Après une parenthèse liée aux élections régionales et à la mise en place des nouvelles régions issues de la réforme territoriale, des discussions approfondies ont été engagées avec chaque président de région à partir du premier trimestre 2016 pour aboutir à une nouvelle carte de l'offre TET présentée début juillet 2016.

Une nouvelle offre de nuit réduite à deux lignes

Entre temps, l'offre de nuit a été revue, non sans provoquer de sérieux grincements de dents de la part des usagers et des élus des territoires impactés. Face à une fréquentation de ces trains en baisse de 25% depuis 2011 et au constat qu'ils représentaient 25% du déficit des TET et seulement 3% des passagers transportés, l'Etat a tranché dans le vif en février 2016 en décidant de ne garder que les deux lignes dites d'aménagement du territoire, jugées indispensables en raison de l'absence d'une offre alternative suffisante – Paris-Briançon et Paris-Rodez/Latour de Carol. Sur les autres lignes de nuit, bénéficiant déjà d'offres alternatives jugées de bon niveau ou devant prochainement s'améliorer avec la mise en service de nouvelles lignes à grande vitesse, il a décidé de mettre fin au financement de l'exploitation, l'appel à manifestation d'intérêt auprès d'opérateurs ferroviaires pour la reprise de ces lignes s'étant révélé infructueux à l'échéance fixée. Alain Vidalies a toutefois assuré ce 12 janvier que le gouvernement restait "toujours à l'écoute" de toute offre de reprise. Pour l'heure, la ligne Paris-Tarbes-Hendaye est maintenue jusqu'à la mise en service de la ligne nouvelle Sud Europe Atlantique (le 1er juillet 2017) et la ligne Paris-Nice dont l'interruption était prévue le 1er octobre 2016 va finalement être maintenue jusqu'à la fin de la prochaine saison estivale (le 1er octobre 2017).

18 lignes de jour reprises par les régions

Pour les lignes de jour, la construction de la nouvelle offre s'est révélée plus consensuelle. Six lignes sont finalement restées sous l'autorité de l'Etat : trois lignes de longue distance, considérées comme structurantes à l'échelle du territoire national (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, Paris-Clermont-Ferrand et Bordeaux-Toulouse-Marseille) et trois autres compte tenu de leurs spécificités au titre de l'aménagement du territoire (Nantes-Bordeaux, Toulouse-Hendaye, Nantes-Lyon). "Ces lignes doivent bénéficier d'un service à haute performance, tant en matière de confort que de régularité et de fiabilité, a souligné Alain Vidalies. Les échanges entre les acteurs du territoire et le préfet François Philizot sont en cours afin de donner corps à l'ambition de proposer un service à haute performance." 18 lignes ont été reprises par les régions, la Normandie ayant joué les pionnières dès le 25 avril 2016 en proposant de reprendre à compter de 2020 cinq lignes desservant son territoire. Grand Est, Nouvelle-Aquitaine, Hauts-de-France, Occitanie, Centre-Val de Loire lui ont emboîté le pas entre le 17 novembre et le 19 décembre 2016. Tous les accords avec les régions concernées ont ainsi été bouclés, selon des modalités propres à chacune.

Renouvellement complet du matériel roulant

Ces accords étaient le préalable indispensable au coup d'envoi du renouvellement du matériel roulant. L'Etat s'est en effet engagé à investir 3,5 milliards d'euros d'ici à 2025 dont 1,2 milliard pour les trois lignes structurantes : à sa demande, un appel d'offres a été lancé le 24 décembre 2016 par la SNCF concernant les deux lignes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse et Paris-Clermont-Ferrand tandis que la ligne Bordeaux-Toulouse-Marseille va être dotée de rames TGV Alstom, une partie de son parcours devant être prochainement à grande vitesse. Les autres lignes conservées par l'Etat vont faire l'objet d'un renouvellement complet de leur matériel par des rames Alstom neuves. Pour toutes les autres lignes, reprises par les régions, l'Etat s'est aussi engagé à financer le renouvellement complet du matériel, soit à travers des contributions financières, laissant le choix aux régions du matériel le mieux adapté, soit à travers la fourniture de rames Alstom neuves.

Les régions satisfaites

Dans un communiqué diffusé le 12 janvier à l'occasion de la présentation du bilan auquel participait son président, Philippe Richert, Régions de France, a salué le succès des négociations avec l'Etat pour la reprise des TET par les régions volontaires. Un engagement en ce sens avait été pris le 27 juin dernier par Manuel Valls, alors Premier ministre, et Philippe Richert, et l'association se félicite que cet engagement ait été tenu et que des conventions de reprise aient été mises en place avec l'Etat "très rapidement". Les régions mettent aussi en avant leur "effort majeur" pour assurer la pérennité des 18 lignes TET qui leur sont confiées. La reprise effective s'échelonnera entre 2017 et 2020 et les régions vont financer le déficit d'exploitation de ces lignes à hauteur de 115 millions d'euros annuels. En contrepartie, elles saluent l'effort financier de l'Etat pour le financement du renouvellement complet du matériel roulant affecté à ces lignes – près de deux milliards d'euros pour l'achat de plus d'une centaine de rames nouvelles basées sur les plateformes régionales Regiolis et Regio2N.
"En recentrant la gouvernance de ces lignes auprès des autorités organisatrices régionales, l'Etat et les régions font le pari d'une amélioration durable de la performance des trains grâce à un pilotage de proximité assuré par les régions", souligne Régions de France. Les régions disent attendre de SNCF Mobilités, qui assure aujourd'hui l'exploitation des TET et des TER, "des gains d'efficacité du fait de mutualisations entre les offres TET et TER" et jugent "essentielle l'amélioration de la lisibilité des offres pour les voyageurs, y compris en termes de tarification". "Les régions seront aussi particulièrement attentives à la qualité de service qui devra être améliorée".

Anne Lenormand

La nouvelle convention Etat-SNCF Mobilités
Conclue pour la période 2016-2020, et extensible à 2023, la nouvelle convention signée fin 2016 entre l'Etat et SNCF Mobilités intègre dans la durée l'ensemble des évolutions annoncées et des progrès attendus de la part de l'opérateur, tant en termes de qualité du service que de redressement de l'équilibre économique.
Elle tient compte des préconisations de l'audit que le gouvernement avait confié à l'inspection générale des finances et au Conseil général de l'environnement et du développement durable en vue d'améliorer l'efficacité économique des TET. Les efforts de l'opérateur en matière de productivité, de transparence et de dynamisme commercial y sont également inscrits. Pour les années 2016-2020, la contribution financière prévue dans la convention et permettant de couvrir le déficit de ces trains s'élèvera à 1,668 milliard d'euros.
Pour l'année 2016, elle correspond à 400 millions d'euros, puis diminuera progressivement chaque année grâce aux reprises de lignes par les régions et en tenant compte des efforts de productivité prévus. "Avec cette dynamique, le niveau de déficit se limitera en 2020 à 250 millions d'euros, alors que le rapport de la commission Duron prévoyait à cet horizon un déficit de 550 millions d'euros si aucune action n'avait été engagée", estime le secrétaire d'Etat.
Le niveau de déficit des 18 lignes reprises par les régions à l'horizon 2020 s'élève en 2016 à 165 millions d'euros. Les financements de l'Etat nécessaires prévus en contrepartie de la reprise des lignes par les régions s'élèveront à terme à 53 millions d'euros par an, une fois l'ensemble des lignes reprises par les régions. Une trajectoire qui doit permettre le maintien de l'équilibre économique actuel pour SNCF Mobilités, a assuré Alain Vidalies. A.L.
 

 

 

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