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Transports - Amertume pour l'ultime terminus du train de nuit Paris-Perpignan-Portbou

"C'est une catastrophe", "une reculade": à la frontière franco-espagnole, une centaine de cheminots, élus et usagers mécontents étaient venus, tôt le matin, ce samedi 10 décembre, accueillir le dernier train de nuit Paris-Perpignan-Portbou à son terminus définitif. L'atmosphère était à l'amertume en gare de Cerbère (Pyrénées-Orientales). Une banderole désuète déployée sur le quai répète une fois encore "Non à la suppression des trains de nuit". Dans la fraîcheur du petit matin, des manifestants accueillent les voyageurs du dernier train couchettes en provenance de Paris.
Ultime acte symbolique d'une longue mobilisation contre la suppression des trains de nuit décidée par la SNCF pour manque de rentabilité : une dizaine d'élus et manifestants monte à bord des wagons, pour leur dernier voyage jusqu'à Portbou, en Espagne. En moins de cinq minutes, à 08H10, le convoi emprunte le tunnel sombre de 2 km sous la montagne et s'immobilise en gare de Portbou, où descendent ses 37 derniers usagers, a constaté un correspondant de l'AFP.
"C'est un mécontentement complet aujourd'hui", déclare le maire de Cerbère, Jean-Claude Portella, qui a rejoint en train son homologue de Portbou. "On se souvient des voitures-lits, ici, le train est arrivé en 1886, la route n'est arrivée qu'en 1912", dit cet ancien cheminot à l'AFP. "Il y a eu des têtes couronnées qui passaient la nuit dans ce train pour se rendre en Espagne" ainsi que tous les usagers "peu fortunés" qui pouvaient ainsi faire un déplacement "pas cher" pour le travail ou pour les loisirs, se souvient l'édile PS élu depuis 1977. Outre la fin d'un patrimoine historique, les deux maires ont dénoncé, côte à côte - celui de Portbou José Sala parlant en catalan - la disparition d'une connexion entre la France et l'Espagne.

"Délaissement du service public"

"Ca a un intérêt vital pour nous", poursuit Claude Portella. "L'été, on doublait ces trains de nuit parce qu'il y avait du monde, c'est un délaissement du service public et c'est mauvais pour l'environnement. C'est faux de dire qu'ils ne sont pas pleins", ajoute-t-il. "La moyenne du taux de remplissage est de 75%", dit-il.
L'État a signé l'arrêt de mort des trains de nuit à l'automne, avec la fermeture de plusieurs lignes, qui doit se poursuivre en 2017. La ligne Paris-Tarbes-Hendaye-Irun cessera le 1er juillet et la ligne Paris-Nice le 1er octobre. Depuis 2011, la fréquentation des trains de nuit a diminué de 25% et le déficit pour 2016 pourrait s'élever à 100 millions d'euros, selon des estimations datant de juillet.
"Le train de nuit, c'est Paris à une heure de Perpignan: une demi-heure pour s'endormir, une demi-heure pour se réveiller", proclame depuis le début du mouvement le collectif "Oui au train de nuit", à l'initiative de la manifestation de Cerbère.
L'ambiance était plus festive le vendredi 9 décembre au soir en gare de Perpignan pour entonner, au son de la fanfare, "ce n'est qu'un au-revoir" au train en partance pour Paris. Le verdict n'en est pas moins cinglant. "C'est une catastrophe", dit Bruno Mercier, médecin du Sdis de Perpignan qui se rend une fois par mois à la capitale et évite ainsi de perdre une journée et de payer une nuit d'hôtel. "C'est une reculade en termes d'aménagement du territoire", dit aussi Olivier Meyer, en embarquant à Perpignan à bord de l'avant-dernier train. "C'est le seul outil qui nous offrait des horaires convenables", déclare André Balent, un enseignant à la retraite qui a pris une couchette deux fois cette semaine. "L'enlever est aberrant, c'est une stupidité sans nom".
 

 

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