Organisation territoriale - Les régions veulent désormais avancer par expérimentations
Après une année de profonds changements, les régions mettent le cap sur les élections : elles apportent la dernière touche à un document qui sera présenté le 8 février et envoyé à chaque candidat. Ce document "jette les bases de ce qui doit être l'organisation future" des territoires, a indiqué le président LR de Régions de France, Philippe Richert, lors de ses vœux à la presse, le 17 janvier. Pas question "de revendiquer un nouvel acte de décentralisation", a-t-il assuré, il s'agira d'"avancer par expérimentations". "Nous sommes à la consolidation" des dernières réformes, a-t-il insisté après avoir déroulé les grands bouleversements de 2016 qui a vu la mise en place des nouveaux exécutifs régionaux, la création des grandes régions - désormais, quatre régions françaises comptent parmi les onze plus grandes régions européennes -, l'organisation de nouvelles compétences, en particulier dans le domaine économique, le transport scolaire, les transports interurbains... Le triptyque Etat-régions-intercommunalités (métropoles et agglomérations) constitue le "nouvel équilibre territorial", s'est félicité l'ancien ministre des Collectivités de Nicolas Sarkozy, critiquant au passage le projet de réforme territoriale que la candidate du Front national, Marine Le Pen, a récemment exposé, reposant, lui, sur "les communes, les départements et la nation". Les régions et les intercommunalités seraient gommées de la carte. Soit l'exact opposé des orientations prises ces dernières années.
Nouvelles relations avec l'Etat
Philippe Richert a salué à plusieurs reprises les bonnes relations qu'il entretenait avec l'ancien Premier ministre Manuel Valls qui, selon lui, ont permis de renforcer le dialogue entre l'Etat et les régions. Compte tenu de leur changement de dimension, "les régions ne peuvent pas garder avec l'Etat les mêmes relations que nous avions au préalable", a-t-il argué. Le président du Grand Est en a profité pour réexpliquer la logique - pas forcément comprise à l'origine - des "plateformes Etat-régions" consistant pour les partenaires à travailler de pair, en amont d'un projet, comme cela a été le cas avec la première d'entre elles : la plateforme consacrée aux 500.000 formations supplémentaires qui a abouti à des "résultats plutôt positifs" puisque "les régions, dans leur grande majorité, sont en phase avec les objectifs, certaines les ayant même dépassés". Le président LR du Grand Est en a profité pour prendre exemple sur le Bundesrat allemand qui doit donner son aval sur tout projet intéressant les collectivités, un rôle que Régions de France dotée d'un conseil aimerait bien pouvoir jouer...
Ce travail de dialogue avec l'Etat a aussi permis des avancées dans le domaine du transport. Philippe Richert s'est félicité des négociations concernant les trains d'équilibre du territoire (TET) qui ont conduit au transfert de 18 lignes aux régions et à 2 milliards d'euros de commandes pour construire de nouveaux trains. Des discussions ont aussi été menées sur la part de déficit que l'Etat accepte de financer. Un équilibre négocié région par région dans lequel "chacun a trouvé son intérêt", a souligné le président de Régions de France. Il reste aux régions concernées à organiser l'articulation entre les TET et les trains express régionaux (TER) pour irriguer au mieux leur territoire. Il s'est aussi réjoui de l'évolution des relations avec la SNCF, les régions ayant obtenu la liberté tarifaire. La prochaine étape sera l'expérimentation de l'ouverture à la concurrence des TER. "D'ici la fin de la législature, le texte doit passer au niveau du Parlement", a-t-il assuré.
Toujours au registre des expérimentations, sept régions travaillent actuellement à l'extension de l'apprentissage jusqu'à 30 ans au lieu de 25 (Bretagne, Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire, Grand Est, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine et Pays de la Loire). D'autres vont expérimenter la répartition des "fonds libres de l'apprentissage". "Cinq à six chantiers seront conduits en 2017, avant une éventuelle généralisation en 2018 ou 2019", a précisé Philippe Richert.
"Evolution considérable"
Philippe Richert est aussi revenu sur le compromis trouvé en matière de financement qui, d'après lui, constitue une "évolution considérable". Ce compromis destiné à compenser en partie les dépenses nouvelles occasionnées par le retrait des départements dans le domaine économique repose sur une dotation de 450 millions d'euros dès 2017 et, surtout, sur la transformation de la dotation globale de fonctionnement en part de TVA à compter de 2018. Soit, selon les calculs de l'association, un total de 570 millions d'euros. Ce n'est pas tout puisque les régions se sont vu attribuer une part de 50% de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) en 2017, pour compenser leurs nouvelles compétences en matière de transport interurbains et scolaires (elles récupèrent en fait les 25% dévolus jusque-là aux départements). Ces ressources dynamiques "augmentent notre liberté fiscale et financière. (...) Nous nous approchons du modèle européen", s'est réjoui Philippe Richert.
2017 verra aussi la mise en œuvre des schémas régionaux de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) qui, à quatre exceptions près, ont tous été validés dans les temps impartis, avant la fin 2016. Pour Philippe Richert, le "chantier urgent" sera la mise en place de la troisième phase du programme d'investissements d'avenir (PIA 3) qui prévoit de doter les régions d'une enveloppe de 500 millions d'euros. La moitié sera versée sous forme de subventions et d'avances remboursables. L'autre sera investie en fonds propres dans des projets de territoires : l'Ile-de-France devrait ainsi recevoir environ 82 millions d'euros et le Grand Est 41 million d'euros.