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Budgets 2010 - Les régions optimisent leur gestion pour préserver leurs marges de manoeuvre

Les budgets primitifs adoptés en décembre par les assemblées régionales sont placés sous le signe de l'optimisation des dépenses. Un passage obligé pour les régions, qui veulent maintenir intact leur niveau d'intervention dans un contexte pourtant incertain. Tour d'horizon.

Dix-huit des vingt-deux régions de France métropolitaine ont adopté courant décembre, voire au début de cette année, leurs budgets primitifs pour 2010, les derniers de la mandature, qui représentent près de 28 milliards de dépenses. Ces budgets élaborés dans une période de fortes incertitudes, compte tenu des réformes en cours, progressent dans la majorité des cas. La situation du Limousin (-1,2%) ou de l'Alsace (-3,3%) restant marginale, les autres régions affichent des hausses contenues, comme en Franche-Comté (+ 0,7%), mais aussi, souvent, assez nettes, comme en Bourgogne, Haute-Normandie, Ile-de-France (+3%) ou en Aquitaine (+ 4,6%).
Comme les années précédentes, trois compétences captent entre les deux tiers et les trois quarts des dépenses des régions : la formation professionnelle et l'apprentissage, les lycées et les transports. Viennent ensuite : le développement économique, l'emploi, l'aménagement du territoire, l'environnement... Puis une kyrielle de domaines dans lesquels les régions interviennent au nom de leur clause générale de compétence : la culture, le sport, la jeunesse, le tourisme, la coopération décentralisée, la vie associative... Il s'avère en revanche difficile d'identifier, parmi toutes les lignes budgétaires, celles qui concernent les aides aux collectivités locales. En sachant que ces cofinancements, sur lesquels le monde rural en particulier compte beaucoup, sont dans l'œil du cyclone depuis qu'est engagée par le gouvernement la réforme des collectivités locales.
En matière d'investissement, les régions se présentent en ordre dispersé. Si dans le Limousin et en Bourgogne, des réductions sont prévues, respectivement de plus de 5% et de 1,5%, l'investissement doit progresser, en revanche, de 4% en Basse-Normandie et de 5% en Champagne-Ardenne. Difficile, sur la base de dossiers de présentation souvent partiels, de dire quelle sera, cette année, l'évolution globale de l'investissement des régions. En 2009, à 10,1 milliards d'euros, il progressait de 1%.
A ce titre, un petit retour en arrière peut être instructif. Concernant les budgets 2004, qui avaient donc été votés en 2003, soit la dernière année du précédent mandat, la direction générale des collectivités locales (DGCL) avait constaté "une croissance de l'investissement hors dette moins rapide qu'en 2003". Le niveau de l'investissement régional est-il, par conséquent, sensible au cycle électoral, tout comme l'est l'investissement communal ? Tout porte à le croire. Dans sa note sur les budgets régionaux en 2004, la DGCL faisait toutefois remarquer que "les nouvelles équipes en place [après les élections de mars 2004] ont revu à la hausse les programmes d’investissement en cours d'exercice". Il restera à vérifier fin 2010 si l'on assiste au même phénomène.

Economies

En 2009, les régions, comme les autres niveaux de collectivités, avaient pris une part active au plan de relance, la majorité d'entre elles s'étant engagée à augmenter leurs investissements. Cet objectif de relance devient, dans les budgets pour 2010, plus discret que l'année dernière. Il n'apparaît nettement que dans quelques présentations budgétaires, comme celles de l'Ile-de-France, du Nord-Pas-de-Calais ou de l'Aquitaine.
Les dépenses de fonctionnement votées pour 2009 affichaient une hausse de 4,5%, en décrue par rapport aux deux années précédentes, qui avaient été marquées par le transfert des agents techniques des lycées. Plusieurs régions vont se situer, en 2010, nettement en dessous de ce taux, preuve que le cycle de hausse des dépenses de fonctionnement tend à s'achever : Basse-Normandie (+0,6%), Champagne-Ardenne (+1,4%), Limousin (+1%), Rhône-Alpes (+2,6%). Le Nord-Pas-de-Calais enregistrera, lui, une progression de 1,8%, qui serait en fait "de 1% à périmètre constant", indique la région. La Bourgogne se singularisera par une hausse de 5% de ses charges de fonctionnement.
Les transferts de compétences réalisés ces dernières années en vertu de la loi du 13 août 2004, non totalement compensés par l'Etat, continuent de peser sur les dépenses, soulignent plusieurs conseils régionaux. En Lorraine par exemple, "les surcoûts globaux de l'acte II de la décentralisation et le TER s'élèvent à 84,7 millions d'euros", depuis la mise en œuvre des transferts.
Malgré cette donnée, plusieurs régions parviennent à maîtriser l'évolution de leurs charges de fonctionnement. Champagne-Ardenne affirme avoir réduit de 16% ses frais généraux, tandis que Poitou-Charentes communique très largement sur ses 13 millions d'euros d'économies réalisées en partie sur le train de vie de la région. Le souci de l'optimisation des dépenses a donc été largement présent dans la préparation des budgets. Olivier Régis, délégué général du Forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales, le confirme : "2010 s’annonce comme l'année de l’optimisation de la gestion des régions." Comme exemple, il cite "la limitation des dépenses énergétiques des lycées en les adaptant rapidement grâce aux solutions les plus performantes, et la modernisation des flottes de transports publics pour les adapter aux contraintes énergétiques et environnementales nouvelles".

Taux de fiscalité inchangés

Autant de choix qui, un peu paradoxalement, vont conduire les régions à "investir massivement". Pour y parvenir, "elles devront augmenter probablement la part de l'emprunt pour en tirer les bénéfices ultérieurs dans leur fonctionnement", poursuit le responsable du Forum. En matière d'emprunt, les régions disposent heureusement de marges de manœuvre encore importantes. "Ce sont les collectivités les moins endettées : leur capacité de désendettement se situe à 2 ans et demi, contre presque 6 ans pour les communes", souligne-t-on à l'Association des régions de France (ARF).
Les recettes offrent, en revanche, des marges de manœuvre qui se réduisent. En compensation des transferts de l'acte II, les régions ont obtenu notamment une part de taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), qui représente une ressource de près de 4 milliards d'euros et dont elles peuvent moduler une fraction. Les régions dénoncent le manque de dynamisme de cette assiette et soulignent son principal défaut : en s'engageant en faveur du développement durable, elles portent atteinte à l'assiette de la taxe. Du côté des recettes fiscales, la cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée, qui remplace la taxe professionnelle et dont les régions toucheront le quart du produit, devrait progresser, elle, au rythme du PIB. Une progression honorable, mais les régions ne pourront pas déterminer le taux de cet impôt, fixé désormais au niveau national. Avec la réforme, l'autonomie fiscale des régions est donc fortement amputée, d'autant que la part régionale de taxe foncière doit être dévolue aux départements.
Année d'élections oblige, les régions n'augmenteront pas – ou quasiment pas - leurs taux de fiscalité, ce qu'elles ne manquent pas de mettre en avant, tentant de faire oublier les importantes hausses de taux votées en début de mandat. En 2009, sept régions avaient accru leurs taux, mais la hausse totale avait été en moyenne de 0,7%.
Seules trois régions n'ont pas encore adopté leur budget primitif pour 2010, la Bretagne venant tout juste de se livrer à l'exercice, avec un vote intervenu ce vendredi 15 janvier. Les Pays-de-la-Loire lui emboîteront le pas fin janvier, suivis par Provence-Alpes-Côte d'Azur début février. La Picardie a quant à elle décidé, fait inhabituel, de ne pas voter de budget primitif avant les élections régionales et d'attendre le mois d'avril, se contentant pour l'heure d'une décision modificative.

 

Thomas Beurey / Projets publics
 

 

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