Environnement - Les derniers obstacles à la mise en oeuvre des PPRT en passe d'être levés
70% de plans de prévention des risques technologiques (PPRT) approuvés fin 2012 : c'est l'objectif – ambitieux – qu'a fixé la ministre de l'Ecologie à l'Inspection des installations classées (IIC) dans une circulaire du 28 décembre 2011. Ambitieux car l'objectif des 60% de PPRT approuvés fin 2011 n'a pas été atteint, selon le bilan de l'IIC présenté ce 15 février. Même si le nombre de PPRT approuvés (143) a presque doublé au cours de l'exercice 2011, ils ne représentent encore que 36% des plans à réaliser. Au total, ce sont en effet 408 plans qui doivent être élaborés dans des bassins industriels où sont implantées des installations soumises au régime de l'autorisation avec servitudes (sites équivalents au régime européen dit "Seveso seuil haut"). Fin 2011, 94% des PPRT étaient prescrits.
Mais de la prescription à l'approbation puis à la mise en oeuvre, le processus s'est révélé particulièrement ardu. "La démarche est plus longue que ce que l'on souhaite, reconnaît Jérôme Goellner, chef du service des risques technologiques au ministère de l'Ecologie. Mais il a d'abord fallu concentrer nos efforts sur la réduction des risques à la source par les exploitants, les PPRT ayant vocation à traiter les risques résiduels pour l'environnement des installations. Cela suppose de maîtriser l'urbanisation, de prescrire des travaux de renforcement des habitations existantes pour limiter les effets d'un accident éventuel, voire de prendre des mesures d'expropriation." Depuis 2007, près de 2.000 études de danger ont été instruites par l'IIC et les investissements pour la réduction du risque à la source dans les établissements soumis à PPRT ont atteint de 2 à 300 millions d'euros, entièrement pris en charge par les industriels. Sur l'ensemble des PPRT, ces actions ont permis de réduire de 350 km2 la surface des zones soumises à des mesures foncières – expropriations et délaissements –, baissant ainsi leurs factures d'un milliard d'euros, souligne-t-on à la direction de la prévention des risques du ministère de l'Ecologie. En outre, cinq conventions de mesures supplémentaires ont été signées en 2011 dans le cadre de PPRT : elles consistent à faire prendre en charge selon la règle des trois tiers (Etat, industriel et collectivités) le déplacement des installations industrielles à risque si celui-ci s'avère moins coûteux que l'expropriation.
Du nouveau pour la prise en charge des travaux sur le bâti existant
Le problème le plus délicat à résoudre pour l'instauration des PPRT reste celui des travaux à la charge des propriétaires individuels des bâtiments riverains des sites. Mais pour Jérôme Goellner, il y a eu de nettes avancées en 2011. D'abord, à travers la loi de finances pour 2012, le Parlement a doublé le plafond du crédit d'impôt dont ils peuvent bénéficier, le portant à 10.000 euros pour une personne seule et à 20.000 euros pour un couple. Il a également renouvelé ce crédit d'impôt de 30% pour une durée de trois ans (jusqu'à fin 2014). En outre, le ministère poursuit les discussions avec les industriels et les collectivités territoriales pour les inciter à prendre en charge à hauteur de 25% chacun le coût des travaux. "Si nous parvenons à cet accord, il resterait au final 20% à la charge des propriétaires", prévient Jérôme Goellner. Concernant le financement des mesures foncières (expropriations et délaissements) prescrites par les PPRT, la loi de finances pour 2012 a instauré un processus par défaut : en l'absence d'accord entre les parties (industriel, collectivités, Etat), la répartition se fait par tiers. La direction de la prévention des risques assure aussi que des démarches visant à améliorer l'information des riverains ou de potentiels acquéreurs vont se concrétiser en 2012. Un mécanisme de délaissement global pour les collectivités doit aussi être finalisé au niveau réglementaire pour leur éviter d'avoir à gérer des immeubles partiellement vides.
Anne Lenormand
Canalisations, transit des déchets, installations IPPC : les autres chantiers DE 2012
Parmi les priorités de la feuille de route 2012 de l'Inspection des installations classées figure aussi la
maîtrise des risques liés aux canalisations de transport et de distribution. Les Dreal devront finir en 2012 l’examen des études de sécurité des canalisations de transport, dont la date-butoir de remise à l’administration était fixée au 15 septembre 2009, et s’assurer que les mesures prioritaires de renforcement de la sécurité prévues par ces études (la pose de dalles de protection dans les secteurs sensibles, par exemple) sont réalisées avant l’échéance réglementaire du 15 septembre 2012. Les services du ministère sont aussi appelés à se mobiliser pour la mise en oeuvre de la réforme anti-endommagement des réseaux qui vise notamment à assurer une meilleure information réciproque des opérateurs de réseaux et des entreprises chargées de travaux à proximité de réseaux, en bénéficiant notamment d’un guichet unique centralisé. Le site internet du guichet unique recensant les réseaux (reseaux-et-canalisations.gouv.fr) a été mis en place en 2011 et les nouveaux textes ont été adoptés pour encadrer les responsabilités des différents acteurs. Au 31 mars 2012, les exploitants de réseaux devront avoir enregistré les coordonnées de tous leurs réseaux, et au 1er juillet 2012, les principales dispositions encadrant les travaux à proximité de ces réseaux entreront en vigueur. Les Dreal mèneront au moins cinq inspections par région et des actions d’information et de sensibilisation pour accompagner la mise en application des nouveaux textes au 1er juillet 2012.
Autre axe de travail important de l'IIC cette année : le
contrôle des installations intervenant dans le traitement des déchets. "Nous avons constaté en 2011 plusieurs incidents d'exploitation sur des installations de transit, c'est-à-dire des plates-formes où l'on fait venir des déchets de différentes origines, explique Laurent Michel, directeur de la prévention des risques. Il peut y avoir des dérives sur ces sites – des déchets dangereux ou des quantités de déchets qui s'accumulent au-delà de ce que prévoit l'arrêté préfectoral – et des défaillances d'exploitants. Nous avons donc prévu de mener 800 inspections approfondies de deux jours sur ces installations." Les inspecteurs des Dreal devront notamment contrôler la nature des déchets entrants, la conformité des règles d'exploitation à la réglementation et le devenir des déchets sortants, en s'assurant notamment qu'ils sont bien dirigés vers une filière d'élimination adaptée. L'IIC va aussi s'intéresser de près aux déchets du BTP car "on peut aussi y trouver de la peinture ou de l'amiante, en plus des déchets inertes", estime Laurent Michel, et à la filière des véhicules hors d'usage. "On soupçonne l'existence d'installations non autorisées et nous allons travailler conjointement avec les gendarmes pour mener nos inspections", assure le directeur de la prévention des risques.
L'IIC prévoit aussi d'accroître ses contrôles sur les
installations industrielles relevant de la directive IPPC sur la prévention et la réduction intégrée des pollutions et situées dans les zones soumises à la réalisation d'un plan de protection de l'atmosphère (PPA). Il existe aujourd'hui en France une vingtaine de ces zones dans lesquelles les concentrations en dioxyde d'azote (NO2) ou de particules de moins de 10 microns (PM10) dépassent les limites autorisées et où les émissions industrielles contribuent significativement (plus de 15%) aux émissions totales. Un minimum de quinze inspections par PPA sera réalisé en 2012.
A.L.