Hébergement - Le Daho s'applique aux demandeurs d'asile, même sans demande d'accueil en Cada
Deux arrêts du Conseil d'Etat - concernant la même affaire - apportent des précisions importantes sur l'éligibilité des demandeurs d'asile au droit à l'hébergement opposable (Daho). En l'espèce, M. B..., demandeur d'asile, demandait à l'Etat de lui attribuer un hébergement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard en application de l'article L.441-2-3-1-II du Code de la construction et de l'habitation. Cet article prévoit que "le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être accueilli dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale et qui n'a pas été accueilli, dans un délai fixé par décret, dans l'une de ces structures peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale".
Le général l'emporte sur le spécifique
Le tribunal administratif de Paris avait rejeté cette demande en constatant que M. B... "n'établissait ni même n'alléguait avoir sollicité un hébergement sur le fondement des dispositions du Code de l'action sociale et des familles propres aux demandeurs d'asile", autrement dit avoir sollicité un hébergement dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada). Dans ces conditions, le tribunal administratif avait considéré que sa demande d'hébergement présentée au titre du Daho et reconnue comme prioritaire par la commission de médiation, "n'était pas au nombre de celles qui devaient être satisfaites d'urgence".
Mais le Conseil d'Etat ne suit pas ce raisonnement et annule la décision du tribunal administratif de Paris. Il estime en effet "qu'il ne peut être déduit des dispositions précitées du Code de la construction et du Code de l'action sociale et des familles, en l'absence de mention expresse en ce sens, qu'un demandeur d'asile ne puisse, se prévaloir d'un droit à l'hébergement [...] du seul fait qu'il n'a pas présenté une demande d'hébergement dans le cadre des dispositions qui leur sont spécifiques du Code de l'action sociale et des familles".
Dans ces conditions, le tribunal administratif de Paris a méconnu l'office du juge saisi, sur le fondement du Daho, d'une demande tendant à ce qu'il ordonne l'hébergement d'une personne dont la commission de médiation a estimé qu'elle était prioritaire. En effet, il "doit y faire droit s'il constate que n'a pas été proposée à cette personne une place dans une structure d'hébergement, sauf lorsque l'administration apporte la preuve que l'urgence a complètement disparu".
Plus besoin de passer par la case Cada
En pratique, ces deux arrêts du conseil d'Etat dispensent tout demandeur d'asile de solliciter une place en Cada avant de demander à être reconnu comme prioritaire par la commission de médiation et d'engager une demande d'hébergement au titre du Daho. De ce fait, ils banalisent le rôle des Cada, qui n'apparaissent plus comme la filière privilégiée d'hébergement des demandeurs d'asile.
Si cette position n'est pas sans justification juridique au regard des textes, elle n'est pas non plus étrangère à l'actuel engorgement des structures d'hébergement par des demandeurs d'asile. Une situation qui suscite un certain malaise chez les associations, comme n'a pas manqué de le relever François Chérèque lors de la présentation du bilan de la première année de mise en œuvre du plan Pauvreté (voir notre article ci-contre du 23 janvier 2014).