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Le CNLE s'interroge sur la pertinence des sanctions en matière d'insertion

Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté publie un avis, assorti de 19 recommandations, sur "l'accompagnement vers l'insertion sociale et professionnelle". Il insiste sur l'importance d'un référent unique, sur la valorisation des emplois aidés, sur la revalorisation des minima sociaux, sur les "pratiques d'aller-vers", sur la réforme du service public de l'insertion et de l'emploi... et s'interroge sur les procédures de sanction, dont les graves conséquences sont mal appréhendées.

À l'initiative de sa présidente, Fiona Lazaar, députée (apparentée LREM) du Val-d'Oise, le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) avait lancé, dès la fin de 2020, plusieurs groupes de travail sur les mesures urgentes à prendre au sortir de la crise sanitaire dans différents domaines : accompagnement vers l'insertion sociale et professionnelle, logement et égalité des chances. Le premier de ces groupes, consacré à l'accompagnement vers l'insertion, vient de rendre un avis regroupant son diagnostic, assorti de 19 recommandations.

Un préalable : rendre l'accompagnement effectif sur tout le territoire

En préambule, le CNLE pose deux préalables. Il s'agit en premier lieu de rendre l'accompagnement effectif sur l'ensemble du territoire, "sous la forme d'une relation de confiance entre un référent et une personne, sur une durée permettant de respecter son rythme". L'avis insiste en effet sur l'importance de cette relation personnelle de confiance, ce qui suppose un interlocuteur dédié et pérenne. Il s'agit en second lieu de "réaffirmer la légitimité de la politique d'insertion comme composante à part entière du système de protection sociale". L'insertion doit en effet être regardée comme un droit universel.

Le CNLE passe ensuite en revue les quatre volets de l'accompagnement et de l'insertion. Sur les droits et des devoirs, l'avis préconise ainsi, sans surprise, d'augmenter les moyens humains assurant l'accompagnement, tout en cessant de dissocier accompagnement social et accompagnement vers l'emploi et, plus largement, en assurant une meilleure articulation entre ces deux volets. Le CNLE recommande par ailleurs de lutter contre les "effets de stigmatisation" qui touchent les emplois aidés, "en valorisant au contraire leur utilité sociale et leur contribution au bien-être collectif". Il demande aussi au gouvernement de lancer une étude sur les conséquences de l'application de la réforme de l'assurance chômage sur la pauvreté, "afin de prendre les mesures d'urgence pour la modifier en conséquence".

Éliminer le plus possible les conséquences négatives des sanctions

Plus inattendu, en particulier dans le volet consacré aux droits et aux devoirs : le CNLE consacre trois recommandations à la question des sanctions. Il demande ainsi l'établissement d'un état des lieux précis de la situation réelle des sanctions (suspensions et radiations) en matière de minima sociaux et de recherche d'emploi et de leurs conséquences sur la situation matérielle et sociale des personnes visées et de leur famille. Dans le même esprit, l'avis préconise une étude comparative, à l'échelle de l'Europe, sur la suppression des conditions, contreparties et sanctions en matière d'allocations liées à la pauvreté.

Mais le CNLE va plus loin en souhaitant que le gouvernement revoie systématiquement, avec les acteurs administratifs pertinents et les représentants des allocataires, les procédures de sanction et les modalités de recours. Il estime en effet que, "hors abus manifeste et au-delà de la légitimité incontestable de la régularité des droits, il s'agit d'éliminer le plus possible les conséquences négatives des procédures pour les personnes". Il convient également de réfléchir, de façon urgente, aux conséquences des saisies à la suite des sanctions, qui pénalisent la famille et les enfants.

Une revalorisation indispensable des minima sociaux

Sur le droit à une allocation, le CNLE reprend une revendication récurrente consistant à revaloriser les minima sociaux afin d'atteindre les conditions d'existence convenables. Il rappelle au passage que plus de la moitié des personnes vivant dans un ménage bénéficiaire d'un revenu minimum garanti dispose d'un niveau de vie inférieur au seuil de 60% du niveau de vie médian de la population métropolitaine. Sur la question des jeunes, l'avis n'évoque pas explicitement un accès au RSA, mais appelle néanmoins à "garantir un accompagnement universel aux jeunes, associé à une allocation accessible dès 18 ans au regard de la situation du jeune". Il rappelle à cet égard qu'une garantie jeunes rendue "universelle" ne répond pas, notamment en matière de durée et de droits, aux exigences d'un revenu minimal.

Dans le même esprit, le CNLE préconise d'harmoniser et d'aligner sur le droit commun le montant des allocations accessibles aux migrants, aux demandeurs d'asile et aux personnes en situation irrégulière relevant de l'aide médicale d'État (AME). Ceci suppose la suppression des délais de carence et celle des restrictions en cas de regroupement familial.

Revoir la politique des contrats aidés

Sur un plan pratique, l'avis préconise une meilleure coordination entre organismes débiteurs des prestations (afin notamment d'éviter les interruptions de versement), de reprendre les travaux sur le non-recours et, à cette fin, de développer des "équipes mobiles pérennes et mettre en place des nouvelles pratiques professionnelles telles l'aller-vers et la pair-aidance".

Sur le droit à l'accompagnement, le CNLE préconise de revoir la politique en matière de contrats aidés. L'une des pistes serait de stabiliser les conditions d'accès à ces dispositifs, tout en laissant davantage de place à la formation, "ce qui n'est pas le cas avec les actuels parcours emplois-compétences (PEC)". Par ailleurs, la coordination entre les acteurs de l'accompagnement gagnerait à la mise en œuvre effective de la réforme du service public de l'insertion et de l'emploi (Spie), en respectant les objectifs de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. L'avis invite également le gouvernement à renforcer la couverture des besoins en matière de services offerts par les opérateurs publics et les associations.

Enfin, une dernière recommandation consiste à enrichir l'évaluation de l'accompagnement. Pour cela, le CNLE préconise d'aller au-delà de simples indicateurs, en prenant en compte la pluralité des objectifs de l'insertion sociale et professionnelle.

 

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