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Tourisme / Logement - L'Assemblée se penche sur les dérives de l'habitat léger de loisirs

Un rapport d'information parlementaire de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale qui s'ouvre par un extrait des dialogues du film "Camping" n'est pas chose courante... Mais il est vrai que ledit rapport concerne le statut et la réglementation des habitats légers de loisirs. Présenté par Jean-Louis Léonard et Pascale Got, députés de deux départements touristiques (respectivement la Charente-Maritime et la Gironde), ce document dresse un état des lieux très complet d'une situation qui ne cesse de dériver depuis plusieurs années. Après un bref rappel historique - la première mention française du camping remonterait à 1898 et le mot est entré dans la réglementation en 1959 avec le premier décret organisant sa pratique -, les rapporteurs détaillent le cadre juridique applicable. Ils soulignent surtout les difficultés croissantes nées du croisement entre la diversification de l'offre d'habitat de loisirs (terrains aménagés, parcs résidentiels de loisirs, villages de vacances classés en hébergement léger...) et le développement de nouveaux modes d'hébergement de loisirs (caravane, mobile-home ou résidence mobile de loisirs, qui tend de plus en plus à s'apparenter à une "simili-résidence secondaire"...). Ce double mouvement a favorisé une sédentarisation progressive d'une partie de l'habitat de loisirs. S'y ajoutent, selon les rapporteurs, des "zones d'ombre réglementaires qui favorisent la dilution des droits et des devoirs de chacun des acteurs". Si le constat d'ensemble est assez accablant, le rapport distingue néanmoins différents cas de figure dans cette sédentarisation : le "camping de fin de semaine" - le seul conforme à la définition de l'habitat léger de loisirs -, le "camping résidentiel de vacances", mais aussi l'habitat précaire de personnes qui n'ont pas les moyens de se loger ailleurs. Selon les auteurs, cette dernière population - d'autant plus difficile à recenser que l'habitat permanent n'est pas autorisé - compterait entre 70.000 et 120.000 personnes, dont environ 20.000 enfants. Le même phénomène apparaît aujourd'hui avec le logement des étudiants. S'ajoute à cet ensemble le cas particulier de la pratique du camping sur parcelles privées, qui s'est développée en réaction aux politiques de résorption du camping "sauvage" menées à partir des années 1960. La France compterait ainsi 250.000 parcelles de ce type, dont près de 80% sont en infraction aux codes de l'urbanisme et de l'environnement.

Après avoir rappelé les "dommages collatéraux" de ces dérives, les rapporteurs se rangent à la règle - posée par les codes du tourisme et de l'urbanisme - voulant que "la possibilité d'un habitat permanent au sein de ces structures semble exclue en principe". Mais ce principe se heurte à l'impossibilité de contrôles efficaces, au flou et aux lacunes de la réglementation, ainsi qu'à la nécessité de prendre en compte le cas des personnes en situation de précarité. Le rapport souligne aussi trois "points de crispation", qui font aujourd'hui obstacle à une amélioration significative en la matière : les relations contractuelles sur les terrains aménagés (multiplication des contentieux entre gestionnaires de terrains et particuliers autour des résidences mobiles), le risque de parcellisation des terrains de camping (achat d'emplacements de terrains de camping par des particuliers) et la question de la fiscalité de l'hébergement léger de loisirs.

Pour sortir de cette impasse, le rapport formule treize propositions. Certaines visent à améliorer l'information et la sensibilisation sur un sujet complexe : effort d'explication du cadre réglementaire de l'habitat léger de loisirs, regroupement dans un document de synthèse unique de l'ensemble des dispositions des différents codes applicables aux habitats légers de loisirs et aux terrains d'accueil, mention obligatoire dans le contrat de vente d'un mobile-home d'indications relatives à la réglementation sur l'installation et le mode d'occupation... D'autres propositions sont plus radicales comme celles consistant à donner aux maires la possibilité d'imposer - sous certaines conditions - une période de fermeture annuelle obligatoire des terrains de camping ou à permettre l'application de la taxe de séjour forfaitaire aux seuls emplacements "résidentiels" de ces terrains. L'essentiel des propositions vise toutefois à clarifier ou à compléter le cadre réglementaire. Les rapporteurs proposent notamment de modifier la partie réglementaire du Code de l'urbanisme pour empêcher la parcellisation des terrains de camping et les pratiques apparentées ou encore d'obliger toute personne propriétaire d'un mobile-home à déclarer celui-ci auprès du maire de la commune où se situe son terrain d'implantation. Ils suggèrent aussi de donner aux communes la possibilité de limiter le nombre d'installations pérennes dans les terrains aménagés et de fixer, dans le permis d'aménager, le nombre maximal d'emplacements correspondants. Dans le même esprit de clarification, le contrat passé entre l'exploitant du terrain de camping et le propriétaire de mobile-home devrait obligatoirement comporter des clauses portant respectivement sur sa durée, ses conditions de renouvellement ou de résiliation, son prix, la définition des normes applicables et l'appréciation de la vétusté de l'installation.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Assemblée nationale, commission des affaires économiques, rapport d'information sur le statut et la réglementation des habitats légers de loisirs.

 

 

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