Personnes âgées - L'Assemblée a achevé l'examen du projet de loi Vieillissement
L'Assemblée nationale a achevé le 11 septembre, dans un climat toujours consensuel, l'examen en première lecture du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement. Le rythme de la discussion s'est également accéléré en raison du grand nombre d'amendements non soutenus ou retirés. Le scrutin public sur l'ensemble du texte aura lieu le 17 septembre.
Au fil des débats, les députés ont adopté une série d'amendements, dont certains apportent des modifications significatives (voir notre article ci-contre du 11 septembre pour les premiers amendements). Comme cela avait déjà été le cas en commission des affaires sociales (voir notre article ci-contre du 30 juillet 2014), les modifications adoptées portent toutefois sur des aspects annexes - sauf peut-être l'officialisation des maisons de l'autonomie, qui devrait accélérer le mouvement - et le projet de loi ressortira donc de l'Assemblée dans un état proche du texte originel.
Accueillants familiaux : une formation avant l'agrément et non plus après
Ainsi, un amendement (n°598, après l'art. 27 bis) fait que le vol par un tuteur ou curateur au détriment de son ascendant ou descendant sous tutelle sera désormais considéré comme un délit, alors que l'article 311-12 du Code pénal accorde l'immunité en cas de vol commis au préjudice de l'ascendant ou du descendant, ou à celui du conjoint. Les députés ont également amendé (n°603, art. 28 bis) la disposition, introduite par la commission des affaires sociales, permettant aux chibanis (immigrés âgés) d'accéder à la nationalité française. Sa rédaction pour le moins maladroite ouvrait en effet ce droit sans condition d'âge. L'amendement précise que le demandeur doit avoir 65 ans à la date de souscription de la déclaration et doit résider en France de manière régulière et habituelle. Trois amendements du gouvernement (n°643, 661 et 662, art. 31) précisent le champ et les objectifs de la réforme de l'aide à domicile "confronté à de lourdes difficultés, notamment financières", mais sans apporter à ce stade d'éléments nouveaux.
Un autre amendement (n°615, art. 39) intéresse les départements. Il prévoit que la formation des accueillants familiaux doit avoir lieu avant l'agrément délivré par le président du conseil général et non plus a posteriori. De même, un autre amendement (n° 563, art. 39) porte de six à huit le nombre total de contrats d'accueil que peut signer un même accueillant familial. La limite de l'accueil simultané reste toutefois fixée à trois personnes.
Le Haut Conseil de l'âge rejoint celui de la famille
Les députés ont également prolongé de trois mois la période dont dispose l'autorité compétente pour examiner les rapports d'évaluation externe transmis par les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) et dont disposent ces établissements pour compléter leurs évaluations, lorsqu'ils ne sont pas en mesure de bénéficier du renouvellement tacite de leur autorisation (n°630, art 45).
L'un des rares amendements adoptés ayant donné lieu à une discussion un peu soutenue a été déposé par le gouvernement (n°638, art. 46). Il crée en effet un Haut Conseil de la famille et des âges de la vie (HCFAV), "chargé d'animer le débat public et d'apporter aux pouvoirs publics une expertise prospective et transversale sur les questions liées aux familles et à l'enfance, à la protection de l'enfance, à l'avancée en âge et à l'adaptation de la société au vieillissement, dans une approche intergénérationnelle". Cette mesure correspond à une fusion entre le Haut Conseil de la famille (HCF) et le Haut Conseil de l'âge (HCA), dont la création était prévue par la rédaction initiale de l'article 46. Cette suppression du HCA a suscité l'opposition de Michèle Delaunay, l'ancienne secrétaire d'Etat chargée des personnes âgées.
Elargissement des schémas départementaux
Par ailleurs, une série d'amendements créent l'obligation d'introduire dans différents rapports (CNSA, MDPH, départements...) des "indicateurs sexués", dont on peine à saisir l'intérêt dans un domaine où les discriminations sexuelles sont des plus limitées.
Plus utile, un autre amendement (n°540, art. additionnel après l'art. 53) élargit le périmètre des schémas départementaux des personnes âgées et des personnes handicapées aux besoins et aux dispositifs d'accompagnement et de répit des aidants, en cohérence avec l'élargissement du champ des schémas régionaux d'organisation médicosociale. Le même amendement prévoit aussi que les schémas départementaux d'organisation sociale et médicosociale "comportent des dispositions relatives au logement, notamment des objectifs en matière d'adaptation des logements existants et d'offre de nouveaux logements adaptés en vue de préserver l'autonomie des personnes".
Création du conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie
Enfin, le gouvernement a déposé deux amendements significatifs, qui apportent des modifications importantes concernant très directement les départements. Le premier (n° 646, après l'art. 54) crée le conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie (CDCA). Cette nouvelle instance, présidée par le président du conseil général, "assure la participation des personnes âgées et des personnes handicapées à l'élaboration, à la mise en œuvre, au développement et à la mise en cohérence des politiques de l'autonomie, notamment en matière de prévention, d'accessibilité, de logement, de transport, d'accès aux soins et d'accompagnement médicosocial, d'accès aux aides humaines ou techniques, d'accès à l'activité physique, aux loisirs, au tourisme et à la culture, de scolarisation et d'intégration sociale et professionnelle".
Le CDCA remplace le comité départemental des retraités et des personnes âgées (Coderpa) et le conseil départemental consultatif des personnes handicapées (CDCPH), deux instances qui - selon l'exposé des motifs - "n'ont pas toujours réussi à faire pleinement émerger [la participation des personnes âgées et des personnes handicapées] dans toutes les politiques publiques et dans tous les domaines de la vie sociale".
Cette mesure - qui répond à la même logique de simplification et de transversalité que la création du HCFAV (cf. supra) - a suscité les mêmes réserves, notamment de la part des associations de personnes âgées et de personnes handicapées (voir notre article ci-contre du 12 septembre).
La voie est libre pour les maisons départementales de l'autonomie
Pour sa part, le second amendement du gouvernement (n°637, après l'art. 54) donne un cadre juridique aux maisons départementales de l'autonomie (MDA) mises en place par certains départements. Il prévoit en effet qu'en vue de la constitution d'une MDA, "le président du conseil général peut organiser la mise en commun des missions d'accueil, d'information, de conseil, d'orientation et, le cas échéant, d'instruction des demandes, d'évaluation des besoins et d'élaboration des plans d'aide au profit des personnes âgées et des personnes handicapées". Selon l'exposé des motifs, cette absorption de fait de la MDPH "n'a pas pour effet de modifier le statut" de cette dernière. Le même amendement prévoit que la MDA peut bénéficier d'une labellisation délivrée par la CNSA, dès lors qu'elle respecte les prescriptions d'un cahier des charges défini par décret.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, examiné en première lecture à l'Assemblée nationale du 9 au 17 septembre 2014.