Web 2.0 - Internet va-t-il renouveler le dialogue entre élus locaux et citoyens ?
Face au Web 2.0, les élus municipaux ne sont pas des "Français comme les autres" : c'est le principal enseignement d'une enquête de l'Ifop. Réalisée pour Orange-France Télécom et l'Association des maires de France (AMF), l'institut de sondage a interrogé par téléphone 401 maires, premiers adjoints et adjoints en charge des nouvelles technologies, représentatifs de l'ensemble des villes de France (du 27 octobre au 15 novembre 2010). En parallèle, 1.010 personnes, représentatives de la population internaute française âgée de 18 ans et plus, ont répondu par questionnaire auto-administré en ligne (du 8 au 10 novembre dernier).
Sur l'internet en général, les usages des élus ne sont pas si différents de ceux de leurs concitoyens, révèle d'abord le sondage, mis en ligne ce 8 avril. 86% des élus estiment qu'il est facile d'utiliser internet (contre 89% pour l'ensemble des internautes). 70% déclarent avoir une connexion à leur domicile. 85% possèdent une adresse électronique personnelle. En revanche, l'utilisation d'une connexion depuis leur téléphone mobile est nettement plus minoritaire (29%). "Elle concerne surtout les jeunes élus ou ceux administrant des villes de taille moyenne ou grande", précise l'étude.
Sur les usages 2.0, l'écart se creuse encore davantage. Seuls 17% des maires ont une page Facebook (contre 45% pour le grand public internaute). La tenue d'un blog ou d'un site personnel (3%) ou encore d'un compte Twitter (2%) demeure l'exception. Dans leur usage professionnel, ces différences sont encore plus marquées pour l'adresse électronique (40% ont une adresse en tant qu'élu), pour les blogs ou Twitter (2%) et pour Facebook (1%). "Cette tendance s'infléchit lorsque la taille de la commune augmente", souligne cependant l'enquête. En effet, 20% des élus municipaux interrogés issus de communes de plus de 20.000 habitants tiennent un blog en leur qualité d'élu.
Nouveaux usages politiques en ligne ou appropriation de l'internet par les militants
Les représentations associées à l'usage politique d'internet diffèrent entre les internautes français et leurs maires. 64% des élus interrogés soulignent que ces nouveaux modes de communication négligent la dimension humaine (contre 57% du public). Moins d'un sur deux pense qu'ils permettent de renforcer la proximité avec les administrés (47%) ou d'améliorer l'image de l'élu (46%). Si 79% des internautes considèrent que le premier atout du web 2.0 est de toucher de nouvelles populations, notamment les jeunes, seuls 64% des élus municipaux le perçoivent. Et paradoxalement, si 84% des élus pensent qu'il est difficile de maîtriser totalement ce qui est dit sur le Net, 85% ignorent ce qui se dit réellement sur eux en ligne.
Même vus du côté des citoyens, les usages politiques en ligne sont encore peu fréquents. Seul un interviewé sur dix a déjà consulté au moins un des supports de son représentant politique. Si les internautes français apprécient la réactivité et l'actualisation de l'information, la crédibilité et la richesse des contenus suscitent des jugements plus partagés. Enfin, l'étude répète ce qu'ont déjà révélé d'autres sondages : les pratiques politiques en ligne sont le fait des publics déjà très engagés dans la vie politique traditionnelle.
"Qu'il s'agisse de sondages d'opinion, de comités de quartiers ou encore de blogs ou de réseaux sociaux, l'objectif est le même : redynamiser le dialogue entre élus et citoyens", conclut Jacques Pélissard, le président de l'AMF. Le web 2.0 ne remplace pas les outils traditionnels de la vie locale. Il ouvre pour les élus comme pour les citoyens un nouvel espace d'influence à conquérir. D'ailleurs, des initiatives ont été menées, au niveau national comme européen, pour que les parlementaires s'approprient mieux les usages du web 2.0. Au niveau local, l'agence régionale des technologies de l'information et de la communication, Artesi Ile-de-France, démarre justement ces jours-ci un parcours de "stimulation" des élus et cadres territoriaux, baptisé "les chemins numériques". Trois communautés de communes d'Ile-de-France sont déjà prêtes à participer.