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Personnes âgées - Encadrement des loyers en Ehpa : précisions ministérielles et fortes réserves des établissements

Intervenant devant le congrès de l'Uniopss à la fin du mois de janvier, François Hollande indiquait que la réforme de la dépendance "sera prête d'ici la fin de l'année" (voir notre article ci-contre du 28 janvier 2013). Plus inattendu, le chef de l'Etat évoquait également, dans son intervention, le coût de l'accueil en établissement d'hébergement pour personnes âgées (Ehpa), restant toutefois assez vague sur les mesures envisagées pour y remédier. Michèle Delaunay a, depuis, apporté quelques précisions en évoquant un possible encadrement des tarifs d'hébergement des Ehpa, sur le modèle de l'encadrement des loyers.

Un site pour comparer les tarifs ?

Dans une interview au Parisien parue le 26 janvier, la ministre déléguée chargée des personnes âgées est en effet revenue sur le sujet. Evoquant les difficultés des classes moyennes face aux tarifs des Ehpa, elle a ainsi affirmé : "On a un devoir de transparence : les familles sont perdues et se font rouler sur les frais cachés." Parmi, les pistes évoquées, Michèle Delaunay a notamment cité l'encadrement des prix à la relocation d'une chambre, la mise en place d'un site détaillant les prix de l'hébergement et comparant les prestations "annexes" (coiffeur, eau minérale, protections...), ou encore la mutualisation de certaines dépenses entre établissements (y compris la fonction de direction)... La ministre s'est notamment référée à l'exemple de l'Essonne, qui a lancé une expérience de maisons de retraite "low cost" (Voir notre article ci-contre du 8 février 2010).
Ces annonces ont reçu un accueil très réservé de la part des fédérations d'établissements. Dans un communiqué du 29 janvier, la Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa) affirme que "les maisons de retraite sont extrêmement performantes compte tenu de leur rapport qualité/coût, au regard des moyens qui leur sont attribués". Un argument qui rappelle par exemple celui utilisé par la Fédération hospitalière de France (FHF) dans une campagne de décembre 2010 sur les "idées reçues" relatives aux maisons de retraite, qui n'hésitait pas à se lancer dans une comparaison audacieuse - et discutable - entre les taris des Ehpa et ceux... des hôtels Formule 1 (voir notre article ci-contre du 14 décembre 2010). La Fnaqpa s'inquiète donc des "orientations évoquées par la ministre, comme la mutualisation de postes de direction ou le plafonnement des loyers, mesures délétères et totalement inefficaces en termes de qualité".
De son côté, le Synerpa (Syndicat national des établissements et résidences privées pour personnes âgées), regrette les déclarations sans concertation de Michèle Delaunay et demande l'ouverture immédiate des négociations promises par François Hollande. Avec une revendication qui a peu de chance de freiner les tarifs : "L'amélioration de la qualité des soins, l'augmentation des ratios d'encadrement, le maintien d'un niveau de qualité optimum, la revalorisation de l'allocation personnalisée pour l'autonomie (APA) et bien sûr une meilleure solvabilité du tarif hébergement par la création ou le renforcement des aides à l'hébergement doivent être d'emblée au cœur des discussions..."

L'Igas et la DGCCRF à la rescousse

Si l'on peut comprendre l'irritation des fédérations d'établissements face à l'expression "se faire rouler" employée par la ministre, le débat sur le coût des Ehpa n'est évidemment pas nouveau. En 2009, l'Inspection générale des affaires sociales avait ainsi publié un rapport consacré à un "Etat des lieux relatif à la composition des coûts mis à la charge des résidents des Ehpad". Tout en reconnaissant une certaine transparence formelle des tarifs, l'Igas estimait que "le consommateur ne peut pas faire un lien immédiat et sûr entre les coûts affichés et la nature ou la qualité des prestations proposées". De ce fait, l'Inspection estimait que "le système laisse une grande place à l'aléatoire, un tarif élevé ne garantissant aucunement une prise en charge satisfaisante et vice-versa" (voir notre article ci-contre du 13 octobre 2009). Quelques années plus tôt, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait également mis en cause - à l'issue d'une enquête dans 238 établissements - le manque de transparence des coûts des maisons de retraite privées (voir notre article du 15 novembre 2011).

Jean-Noël Escudié / PCA

Dépendance : avec ou sans assurance ?
Dans son discours devant le congrès de l'Uniopss, François Hollande avait semblé entrouvrir la porte à l'introduction - ou au maintien - d'une dose d'assurance dans la réforme de la dépendance, en évoquant "la responsabilité individuelle" (voir notre article ci-contre du 28 janvier 2013). Dans son interview au Parisien, Michèle Delaunay s'empresse de refermer la porte... tout en la laissant entrebaillée. A la question "François Hollande incite-t-il à prendre une assurance ?", elle oppose ainsi un "pas du tout" catégorique. Mais pour ajouter aussitôt : "Le président évoque les baby-boomers qui ne vont sans doute pas attendre pour anticiper leur vieillissement, prendre pour eux-mêmes les bonnes décisions... On peut vieillir et préparer les choses positivement. L'assurance privée, nous ne comptons pas sur elle. Il n'est pas question de l'interdire... ni de s'interdire de l'encadrer." Le débat sur la place de l'assurance dans la prise en charge de la dépendance est donc très loin d'être clos.


 

 

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