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Finances - Emprunts toxiques : le franc suisse met à mal une poignée de collectivités

L'envolée du franc suisse met à mal certaines collectivités ayant contracté des emprunts indexés sur cette monnaie, même si plusieurs élus et experts en relativisent l'impact.
"Il n'y a pas de raz de marée de situations dramatiques", a ainsi affirmé à l'AFP le président de l'Association des maires de France (AMF), Jacques Pélissard. "Il y a certainement des communes en situation critique, et d'ailleurs certaines se sont manifestées", a-t-il estimé, parlant d'une "douzaine de communes" de toutes tailles. Et Jacques Pélissard d'expliquer : "Souvent les communes ont un bouquet de prêts, elles diversifient d'année en année les sortes de prêts contractés qui finissent parfois par s'équilibrer les uns les autres."
La porte-parole du gouvernement, Valérie Pécresse, a elle aussi estimé qu'il n'y avait "pas d'inquiétude systémique à avoir" : "Le gouvernement est extrêmement vigilant (...), nous avons expertisé les structures d'emprunts d'un certain nombre de collectivités territoriales, nous les aidons, nous les conseillons pour régler ce problème", a-t-elle déclaré mercredi à l'issue du Conseil des ministres.
Alors que l'euro a été pendant 10 ans la devise de référence des investisseurs, la crise les a fait "se reporter sur le franc suisse, qui est un micro-marché", a expliqué à l'AFP Olivier Régis, délégué général du Forum pour la gestion des villes. "Quand le franc suisse était en baisse, ceux qui avaient emprunté en franc suisse n'en parlaient pas, parce que cela avait une répercussion favorable sur les intérêts et le capital qu'ils remboursaient. Depuis qu'il est en hausse, ils se plaignent", relève Olivier Régis. Mais, selon lui, "sur les 118 milliards de dette des collectivités locales, très très peu sont indexés sur le franc suisse", dit-il.
L'épisode du franc suisse n'est que le énième écueil contre lequel les collectivités butent depuis que certains de leurs prêts se sont révélés être "toxiques", car liés à des indices hautement volatils.
Les stratégies pour assainir la situation se déploient tous azimuts. Un poste de médiateur pour les emprunts toxiques des collectivités a été créé, confié à Eric Gissler, qui doit remettre un rapport. Une commission d'enquête parlementaire a été créée en juin, à l'initiative de Claude Bartolone, président du conseil général de la Seine-Saint-Denis. Un élu qui a également fait parler de lui en choisissant la voie judiciaire : il a engagé en mars des poursuites contre trois banques pour "ne pas avoir respecté leur obligation d'information" du client. La ville d'Angoulême a fait de même en août.
Maurice Vincent, le maire de Saint-Etienne, a interpellé mardi Nicolas Sarkozy, préconisant une nouvelle fois la création d'une "structure nationale de défaisance" qui prendrait en charge les emprunts toxiques les plus lourds. Dans son rapport de juillet dernier sur la gestion de la dette des collectivités, la Cour des comptes s'était dite opposée à une telle structure qui pourrait "encourager le renouvellement de pratiques peu responsables".
Le maire d'Argenteuil, Philippe Doucet, a lui aussi appelé le "gouvernement à se saisir de la question", se disant "inquiet pour les petites et moyennes communes qui ne peuvent pas avoir des spécialistes de la dette".
Le député-maire UMP d'une commune cossue du Val-de-Marne, Saint-Maur-des-Fossés, a négocié pied à pied avec les banques : "J'ai notamment réussi à sécuriser pour les cinq prochaines années des taux fixes sur deux emprunts indexés sur les variations yen-dollar. Nous allons négocier de la même manière pour les emprunts indexés sur l'évolution du franc suisse qui sont les plus dangereux", indique Henri Plagnol, ancien ministre et désormais trésorier de l'association "Acteurs publics contre les emprunts toxiques" (www.empruntstoxiques.fr) créée et présidée par Claude Bartolone.