Finances - Financement des collectivités : le projet d'agence avance, sur fond d'inquiétude face à Bâle III
Quelques jours après la publication du rapport de la Cour des comptes sur la gestion de la dette publique locale et à l'heure où l'on parle beaucoup du risque de raréfaction de l'offre de crédit pour les collectivités, les associations d'élus membres de l'Association d'études pour l'agence de financement des collectivités locales (AEAFCL) ont fait état le 21 juillet de l'avancement de leurs travaux.
Créée en avril 2010 par l'AMF, l'Acuf et l'AMGVF avec l'idée de permettre aux collectivités d'emprunter directement sur les marchés financiers, l'association présidée par Jacques Pélissard a ensuite élargi son cercle à l'ARF, l'ADF et l'ADCF et plus de cinquante collectivités en font désormais partie. Le groupement d'experts mandaté par l'AEAFCL pour étudier en détail toutes les questions que pose ce projet doit bientôt rendre son rapport, d'ici la fin juillet. Les préconisations porteront ainsi sur le statut juridique envisageable pour l'agence, sur "la ou les structurations financières permettant à cette entité de bénéficier d'une notation AAA", sur ses conditions de fonctionnement, sur ses bilans et comptes d'exploitation prévisionnels et sur "l'ensemble des étapes à franchir avant l'entrée en exploitation de l'agence", indique le communiqué de l'association. Les élus arbitreront lors d'une assemblée générale le 14 septembre, sachant qu'un texte législatif sera nécessaire à la création d'une structure qui procéderait à ses propres émissions obligataires – qui "octroierait des prêts aux collectivités territoriales, en se refinançant directement sur les marchés internationaux", tel que le résume par exemple la Cour des comptes dans son rapport.
Les associations membres de l'AEAFCL se félicitent d'ailleurs que la Cour ait émis un avis plutôt positif sur leur projet, celle-ci y voyant "une réponse, certes partielle, mais utile, à la nécessaire diversification des financements des collectivités locales". L'AEAFCL assure en outre être pleinement d'accord avec les conditions listées par le rapport de la Cour : limitation de la clientèle aux collectivités locales françaises, proposition de produits simples et sécurisés, obtention de l'agrément délivré par l'Autorité des contrôles prudentiels, mise en place de garanties des collectivités locales permettant l'obtention d'une note optimale, capitalisation en fonds propres, respect a minima des normes prudentielles de Bâle III...
Bâle III appliqué... par anticipation ?
Bâle III, justement, connaît une nouvelle étape, puisque la Commission européenne a présenté le 20 juillet des propositions pour transposer en Europe les recommandations de cet accord, à savoir les normes internationales en matière de fonds propres bancaires adoptées au niveau du G-20. Des propositions qui doivent déboucher sur une directive et sur un règlement.
Le même jour, le président de la commission des affaires européennes du Sénat, Jean Bizet (UMP), est venu joindre sa voix à celle des élus locaux qui s'inquiètent des répercussions que pourrait avoir pour le financement des collectivités locales l'application de ces nouvelles normes destinées à renforcer la solidité des banques. Dans un communiqué du 20 juillet, Jean Bizet demande au commissaire européen Michel Barnier que "la future législation européenne tienne compte des spécificités des collectivités locales, notamment les collectivités locales françaises dont les règles budgétaires apportent des garanties particulières de solvabilité". Car le risque est bien de "réduire sensiblement les possibilités pour les banques d'accorder des prêts aux collectivités locales", souligne le sénateur, également maire du Teilleul (Manche). "Certaines banques ayant commencé par anticipation à tenir compte des nouvelles normes, des difficultés sont d'ores et déjà apparues", assure-t-il. Et ce, alors même que les règles budgétaires des collectivités locales "apportent des garanties particulières de solvabilité" : "obligation d'équilibre du budget, affectation en priorité, au sein du budget, de l'excédent de la section de fonctionnement au remboursement de la dette, recours à l'emprunt réservé aux nouveaux investissements, dépôt des fonds disponibles au Trésor public…"
Les présidents de l'AMF, l'ADF et l'ARF ont déjà alerté François Fillon, dans un courrier du 1er juin, sur le fait que deux secteurs risquent d'être frappés par la contraction du crédit liée à Bâle III : les collectivités territoriales et le logement social.