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Logement social - Dans une "société en crise", les OPH abattent leur "atout local"

L'accord de paix signé entre l'Etat et l'Union sociale pour l'habitat, concernant la mutualisation financière, aurait quelque peu éclipsé les travaux de l'assemblée générale des 25 et 26 mai de la Fédération nationale des offices publics de l'habitat. Des travaux tendant à prouver combien les OPH sont indispensables dans cette "société en crise". Et qu'il serait opportun de leur faciliter la tâche... notamment en matière de financement.

L'assemblée générale de la Fédération nationale des offices publics de l'habitat (OPH), les 25 et 26 mai à Poitiers, n'a pas seulement été l'occasion de signer un accord "rénové" de mutualisation financière entre l'Etat et l'Union social pour l'habitat, portant la mutualisation à 350 millions d'euros annuels pour 2017 et 2018 (voir notre article ci-contre du 30 mai 2016). Il s'agissait également de réfléchir aux OPH comme "modèle d'avenir" pour "répondre aux attentes de la société et à la diversité des situations territoriales". Et cela dans un "contexte en tension" caractérisé par la réduction des financements "classiques" (et notamment le "désengagement de l'Etat"), les recompositions territoriales (et notamment intercommunales), un environnement "de plus en plus concurrentiel dans un contexte de régulation plus faible" et des attentes "de plus en plus pressantes et diversifiées" de la part des locataires et des collectivités locales "dans un contexte de paupérisation croissante".
Face à cela, les OPH proposent "des logements qualitatifs à loyers et charges réellement modérés, des services et des projets qui participent à la promotion sociale des habitants", a rappelé Alain Cacheux, président de la Fédération. Mais pour continuer à le faire, les OPH estiment que plusieurs dispositions s'imposent.

Les OPH, des "opérateurs de lien social"

D'ores et déjà, la Fédération assure que "des initiatives prises par de nombreux offices bousculent les habitudes" et "accroissent leur utilité sociale ". "C'est l'atout local du modèle des offices", insiste la Fédération, qui entend faire passer le message que les OPH "sont opérateurs de lien social, soutien face aux différentes formes de fragilisation des publics (logement des jeunes, accueil adapté des personnes âgées, réponses aux nouveaux modes de consommation, amélioration du pouvoir d'achat des locataires, accueil des personnes handicapées physiques ou mentaux), et permettent aux locataires de devenir acteurs de leur parcours résidentiel".
Ce n'est sans doute pas un hasard si, sur les 43 projets présélectionnés dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt "Nouvelles attentes, nouveaux services", 38 émanaient d'OPH. Les thèmes des projets retenus parlent d'eux-mêmes : la production de cinq maisons médicales pour Drôme aménagement habitat, une initiative sur les nouveaux modes de consommation au cœur des quartiers pour Est métropole Habitat, l'opération "un jeune, un logement" pour Pas-de-Calais Habitat, l'initiative "logement et santé mentale" pour Plaine Commune Habitat, la résidence intergénérationnelle de Moulins Habitat...

A la recherche de nouvelles sources de financement

Question financement, sur les sites où le marché du logement est en tension, "si l'on souhaite être à la hauteur des besoins attendus par les territoires en termes de construction, de réhabilitation et de démolition, il faut rechercher de nouvelles sources de financement car les équilibres financiers des organismes sont rapidement déstabilisés", ont redit les OPH lors de leur assemblée générale.
Et "il faudrait aussi revoir les arbitrages budgétaires entre les différents volets de la politique nationale du logement, par exemple entre le locatif défiscalisé et le logement social", ont-ils ajouté. De ce point de vue, la création du Fnap (Fonds National des Aides à la Pierre) continue à leur apparaître comme un "désengagement" financier de l'Etat qui préfigurerait une disparition des aides à la pierre. Emmanuelle Cosse a pourtant tenu à rassurer en indiquant que son objectif était "de porter le maintien des aides à la pierre", et qu'elle défendrait cette vue "lors des discussions budgétaires" à venir. Selon la ministre du Logement et de l'habitat durable, ce serait un sujet "moins difficile à porter cette année que les précédentes".

Méfiances...

Emmanuelle Cosse a également rappelé le lancement prochain des "prêts de haut de bilan". Annoncé par le président de la République le 12 janvier dernier lors du lancement du bicentenaire de la Caisse des Dépôts (voir notre article ci-contre du 13 janvier 2016), le dispositif est présenté ce mardi 31 mai à la presse. Il permettra un financement des opérations des organismes HLM "en quasi-fonds propres, avec des prêts sur fonds d'épargne à taux fixes très faibles et avec un différé d'amortissement de 20 ans", s'est félicité Emmanuelle Cosse, précisant qu'il bénéficiera du soutien de la Caisse des Dépôts et d'Action Logement, à hauteur d'"un milliard d'euros" chacun. "Cette mesure va dans le bon sens", avait confié Alain Cacheux, tout en soulignant que la mesure était "ponctuelle".
Méfiance également quant aux modalités de financement du NPNRU (Nouveau Programme national de renouvellement urbain), la Fédération des OPH craignant certainement que le financement d'Etat, reposant exclusivement sur Action Logement, ne favorise les sites en tension sur le marché du logement (au détriment des territoires détendus sur lesquels les OPH gèrent des parcs dont beaucoup auraient besoin d'opération de type "Anru"). "Il faut ouvrir une nouvelle négociation avec l'Anru", estiment les OPH.

100 millions d'euros d'Action Logement pour se sentir moins "abandonnés"

D'ailleurs, les offices proposent aussi que "l'accès au financement d'Action Logement soit enfin réellement équitable" et qu'Action Logement "consacre des moyens financiers à la recomposition du parc en zone détendue". La Fédération rappellent que "des immeubles, hier utiles au logement des salariés, deviennent vacants en raison de la désindustrialisation de certains territoires" et donc, "Action Logement doit pouvoir réserver une partie de ces financements à ces territoires". Elle a calculé qu'une enveloppe de 100 millions d'euros par an, sur la période de la convention quinquennale Action Logement/Etat "permettrait de donner un signe très positif à des territoires (et à des habitants) qui ont le sentiment d'être abandonnés".
La Fédération des OPH appelle également à "mutualiser des moyens, coopérer plus pour faire des économies d'échelle et optimiser ainsi les frais de structures des offices". Selon elle, "la coopération entre organismes et entre offices en particulier devient une évidence" dans un contexte où les territoires d'intervention s'élargissent, que "la concurrence entre opérateurs du logement s'intensifie" et que "les compétences sont de plus en plus pointues et il faut les partager". La Fédération qui offre déjà un appui technique va lancer un appel à candidatures "pour valoriser l'imagination des organismes dans ce domaine", a-t-elle annoncé.
Elle a également annoncé la publication d'un guide sur le financement des OPH, pour "présenter et expliquer, en toute transparence, le fonctionnement, les missions et les réalisations des offices", a déclaré Alain Cacheux.

Deux amendements au moins au Projet de loi Egalité et Citoyenneté

Sur le projet de loi "Égalité et citoyenneté", qui a soulevé des interrogations tout au long des deux jours de l'assemblée générale, Emmanuelle a tenté de justifier la nécessité du texte. Alain Cacheux avait ainsi jugé que la disposition rendant obligatoire de consacrer 25% des attributions réalisées en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville aux demandeurs du premier quartile était "faite uniquement pour régler le problème du Dalo en Ile-de-France". En réponse, la ministre a affirmé que pas du tout, que si "au niveau national, 19% des attributions des ménages du premier quartile sont faites hors QPV - ce qui est bien mais peut encore être amélioré"- en revanche "dans toutes les métropoles du pays, on tombe à 12%, voire 10%". Et pour elle, pas de doute : "Il faut remédier à cette situation."
Il n'empêche, Laurent Goyard, directeur général de la Fédération, a indiqué que le réseau porterait devant les parlementaires un amendement rendant facultative cette disposition en zone de tension du marché du logement B2 et C "pour ne pas accroître la complexité là où il y a plusieurs logements pour une demande".
Par un autre amendement, la Fédération tentera de rendre obligatoire la différenciation de ces objectifs d'attributions selon l'occupation sociale actuelle des bailleurs, qui est seulement optionnelle dans la version actuelle du texte.

Les regroupements d'offices municipaux au niveau intercommunal "se passent très bien" sauf… en Ile-de-France

Pour le président de la fédération comme pour la ministre, les regroupements d'offices municipaux au niveau intercommunal "se passent très bien" en région. En Ile-de-France en revanche, "c'est plus compliqué", admettent-ils. Particulièrement dans la Métropole du Grand Paris, où les offices communaux seront rattachés à leur EPT d'appartenance au plus tard le 1er janvier 2018, Alain Cacheux "constate la tentation de maires pour transformer leur office en SEM". La ministre observe aussi qu'il y a des communes "qui veulent sortir leurs offices du monde HLM pour les transformer en SEM". "Quand je vois ça, j'utilise les moyens que j'ai pour dire que ce n'est pas possible", comme à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), où "le maire voulait transférer le patrimoine de son office situé dans une ville voisine, L'Ile-Saint-Denis, qui ne le souhaitait pas". "Nous resterons très vigilants sur les pratiques des organismes qui nous étonnent", a-t-elle assuré.
Christian Dupuy, président de l'OPH 92, a quant à lui fait savoir que pour sa part il "a répondu favorablement à l'aspiration de plusieurs offices municipaux des Hauts-de-Seine de fusionner plutôt avec [son office], qui créera des antennes dans chacun des quatre territoires" du département. Les offices éviteront ainsi d'être rattachés à l'un de ces EPT.

 

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