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Logement social - Les OPH, des acteurs incontestables du pacte républicain dans "un climat d'incertitude"

La Fédération des offices publics de l'habitat tiendra son assemblée générale les 27 et 28 mai à Nancy, sur le thème consensuel "Les offices, acteurs du pacte républicain". Les déclarations récentes du ministre des Finances sur "les économies à faire" dans la politique nationale du logement, elles, le sont beaucoup moins. Et l'impact incertain de la réforme territoriale sur les offices ne l'est pas moins. De quoi anticiper une assemblée générale quelque peu "animée".

"Cette assemblée générale se déroulera dans un climat d'incertitude", prédit Alain Cacheux, président de la Fédération des OPH, à propos du grand rendez-vous annuel des offices publics de l'habitat qui se tiendra les 27 et le 28 mai à Nancy.
D'abord, la famille HLM dans son ensemble vit très mal les récentes déclarations de Michel Sapin (voir notre article du 13 mai 2015). Le ministre des Finances et des Comptes publics ayant estimé que "la politique du logement coûte cher et est inefficace", ainsi que le résume Alain Cacheux, fustigeant pour sa part des "aides à la pierre en baisses régulières (contrairement aux engagements de François Hollande qui avait annoncé un doublement)". Des baisses d'autant plus inquiétantes que cela "touche à notre modèle économique et social, reposant sur les fonds dits "gratuits", ajoute le président des OPH.

Les OPH dans la réforme territoriale

Autre sujet de préoccupation : les OPH ne savent pas encore bien à quelle sauce de la réforme territoriale ils vont être cuisinés. La loi Alur avait posé le principe que tout organisme HLM doit être rattaché à son intercommunalité au 1er janvier 2017, dès lors que l'EPCI dispose de la compétence habitat. Soit 130 OPH qui doivent être rattachés sur 265. "Grosso modo, cela se passe bien en province", observe la Fédération, sauf en métropole Aix-Marseille (l'OPH d'Aix s'opposant à sa fusion avec celle de Marseille, et envisageant, pour y échapper, de se transformer en Sem).
Sauf aussi, naturellement, en petite couronne parisienne, qui compte aujourd'hui 49 OPH dont seulement 3 sont intercommunaux tandis que 43 sont municipaux (et 3 sont départementaux). "Un regroupement de moyens, nous y sommes favorables", assure la Fédération, mais évidemment pas dans une métropole de 6,8 millions d'habitants. Or, l'échelon intermédiaire, le futur EPT (établissement public territorial), n'a pas la compétence habitat (qui revient à la Métropole du Grand Paris). Tel que cela se présente dans le projet de loi Notr, les OPH seront bel et bien rattachés aux EPT (le principe a été voté en première lecture). Mais les communes perdant leur OPH seraient très représentées dans le conseil d'administration du nouvel OPH intercommunal. Un amendement de Luc Carvounas, sénateur-maire PS du Val-de-Marne (et président de Logial-OPH), a été adopté en ce sens en commission des Lois.

Vers le maintien des gros OPH municipaux dans le Grand Paris ?

Mais un autre amendement présenté comme "de compromis" sera discuté en séance publique la semaine prochaine proposant que les OPH municipaux comprenant plus de 5.000 logements "puissent rester rattachés à la commune" (ils seraient 27 dans ce cas). Les autres (ils seraient 26) auraient 2 ans pour atteindre ce seuil, par fusion ou acquisition, faute de quoi le préfet prononcera des fusions. Cet amendement – qui aurait été rédigé par le préfet d'Ile-de-France Jean-François Carenco – a été déposé par Roger Karoutchi, sénateur (UMP) des Hauts-de-Seine.
Et si cela ne suffit pas, reste la solution "Sem". Plusieurs maires franciliens envisagent en effet de transformer leur OPH en Sem immobilière, les Sem n'étant pas contraintes par la loi d'être rattachées à une intercommunalité. Deux conseils municipaux ont déjà délibéré en ce sens en 2014, Saint-Ouen et Levallois-Perret, et d'autres seraient "en questionnement", confie la Fédération.
S'ajoute à ces préoccupations la réforme en cours d'Action Logement qui rend Alain Cacheux "perplexe", la Fédération des OPH craignant que les ESH filiales d'Action Logement soient les mieux servies. En 2013, déjà, les OPH avaient bénéficié de 21% des financements d'Action, alors qu'ils avaient contribué à 40% de la production nationale de logement social.
Sans compter les nombreux renouvellements d'équipes municipales puis départementales, issus des dernières élections locales vécues comme "deux tsunamis", selon l'expression d'Alain Cacheux.

"Le pacte républicain, nous le vivons à travers notre raison d'être"

Mais le président des OPH aura aussi, à Nancy, de quoi se réjouir. Rien de tel que le thème choisi cette année - "Les offices, acteurs du pacte républicain" – pour resserrer les équipes autour de valeurs communes. "Le pacte républicain, nous le vivons à travers notre raison d'être : fournir un logement et au-delà un mode de vie le plus agréable possible au prix le moins élevé possible", rappellera Alain Cacheux, ainsi qu'il l'a exprimé lors d'une conférence de presse le 19 mai.
Le président des OPH a également insisté sur leur "contribution à la cohésion sociale", au travers du traitement des impayés ("on a multiplié les dispositifs pour prévenir, réagir le plus rapidement en amont, avant que la dette ne devienne incontrôlable", de telle sorte qu'il n'y ait jamais d'expulsion pour ce motif) et les mesures en faveur de la tranquillité des résidents via notamment la création de postes de médiateurs pour traiter les problèmes de voisinage (mais pas ceux liés aux trafics de stupéfiants qui "débordent nos responsabilités", précise Alain Cacheux).
Dans certains quartiers, les OPH seraient "en dehors de l'école, les seuls à garder une présence effective", a-t-il également souligné. Il ajoute que les OPH "contribuent à la vie associative", en mettant à disposition, pour un loyer modeste (voire la gratuité), des locaux communs résidentiels (LCR) ; en subventionnant des associations de soutien scolaire ; en sponsorisant des clubs sportifs ; en soutenant les "fêtes de voisins"...

La mobilité "pour ne pas donner le sentiment d'être assigné à résidence"

Au registre de la lutte contre la "ghettoïsation" (un terme que le président de l'OPH a visiblement du mal à faire sien), Alain Cacheux indique que les OPH se sont fixé l'objectif suivant : que 25% à 30% des attributions soient le fait de mutations de locataires à l'intérieur du parc, "pour faire vivre le parcours résidentiel" et "pour ne pas donner le sentiment d'être assigné à résidence". Et, au passage, "répondre à la sur-occupation" (lorsque la famille s'agrandit), voire la "sous-occupation" (sachant que les OPH restent attachés à la règle du maintien dans les lieux).
Alain Cacheux confrontera son point de vue, lors une table ronde justement intitulée "Les offices, acteurs du pacte républicain", avec des personnalités connues pour leur franc-parler : François Pupponi, député-maire de Sarcelles et président de l'Anru ; Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre et le sociologue Renaud Epstein, maître de conférence en sciences politiques à l'Université de Nantes. Un casting audacieux qui devrait bousculer les idées reçues et les discours convenus, juste avant l'intervention de clôture de la ministre du Logement, Sylvia Pinel.

Valérie Liquet

(*) Didier Marie, sénateur et président de la commission prospective de la Fédération des OPH, Marylise Fleuret-Pagnoux, 1ere adjointe au maire de La Rochelle et présidente de l'OPH de l'agglomération de La Rochelle, Patrice Bessac, maire de Montreuil et président de l'OPH de Montreuil.

(**) Jean-Michel Stecowiat, directeur général de l'OPH du Pas-de-Calais et Eric Philippart, directeur général de l'OPH de Saône-et-Loire.
 

 

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