Archives

Commande publique - Clauses sociales et crise : comment Nantes Métropole adapte son dispositif ?

Lors de la dernière réunion de l'Observatoire économique de l'achat public, le 20 mai, des représentants de Nantes Métropole ont présenté leur expérience en matière de clauses sociales dans les marchés publics. En effet, Nantes a été l'une des premières collectivités à s'engager dans ce dispositif, dès 2004 : en 6 ans, 784 personnes ont été employées dans ce cadre par 184 entreprises. Elles ont réalisé 660.800 heures de travail. Cependant, en raison de la crise, certaines entreprises demandent à se soustraire à leurs obligations en matière d'insertion : comment  l'agglomération nantaise répond-elle à ces demandes ?

 

Surtout, penser à l'évaluation

En amont de la passation, la personne publique doit s'assurer que les entreprises susceptibles de soumissionner peuvent effectivement mettre en œuvre la clause. L'acheteur doit donc effectuer un diagnostic préalable, analyser la situation économique du secteur et s'informer sur la situation sociale des quartiers cibles. A Nantes, l'interface entre donneur d'ordre (collectivités, offices HLM, etc.), entreprises et structures d'insertion est assuré par la cellule Assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) insertion. Celle-ci est rattachée à la communauté urbaine, elle définit les règles du jeu, assiste les donneurs d'ordre dans la fixation du nombre d'heures minimal et la rédaction des clauses. Un poste de chargé de mission est financé à 75% par Nantes Métropole et 25% par l'Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru).
En cours d'exécution du marché, il est important  de prendre le temps d'évaluer régulièrement de la mise en oeuvre de la clause. A Nantes, des pénalités ou des réfactions sont appliquées en cas de manquement. En cas de faute lourde et après mise en demeure, l'acheteur peut envisager de recourir à la résiliation dans les conditions prévues au contrat. En temps normal, toute exonération de l'obligation de la clause d'insertion est assimilable à une remise en cause des conditions du marché et peut être sanctionnée. Toutefois, en raison de la crise économique, des aménagements peuvent être envisagés.

 

Ne pas transférer les heures sur un autre marché

Lorsqu'une entreprise demande dans ce cadre une diminution de son nombre d'heures d'insertion, la première préoccupation du pouvoir adjudicateur doit être de rassembler des informations pour être à même d'apprécier le plus objectivement possible la situation économique de l'entreprise. Il s'agit de vérifier que la conjoncture ne sert pas de prétexte pour se libérer d'obligations sociales. Ainsi, à Nantes, en cas de chômage partiel ou de licenciement économique, l'entreprise alerte l'AMO de sa difficulté d'honorer ses engagements. Une situation qui s'est produit récemment : après demande de pièces prouvant la situation réelle de l'entreprise, l'AMO a accepté une adaptation.

En l'occurrence, l'entreprise s'était engagée sur 130 heures d'insertion professionnelle et n'en avait réalisé que 78. L'entreprise proposait de reporter les 52 heures restantes sur un autre marché en cours d'exécution. Cette solution n'a pu être retenue : en effet, l'insertion d'une clause sociale est strictement liée à l'objet du marché. On ne peut donc répercuter une telle clause sur un marché dont l'objet ne comporte pas une dimension sociale importante. Mais d'autres solutions existent, à condition d'avoir été prévues au contrat. Ainsi, le pouvoir adjudicateur peut décider de suspendre momentanément la clause sociale et de répercuter ultérieurement les heures restantes sur le même marché. Cette option est surtout valable pour les marchés de travaux exécutés sur plusieurs années. Autre solution : le pouvoir adjudicateur peut accepter d'exonérer l'entreprise des heures restantes. Cependant, les praticiens nantais ont souligné que lorsque le sous-traitant ne connaissait pas les mêmes difficultés que l'entreprise principale, ils n'appliquaient pas de diminution de la clause sociale.  

 

L'Apasp et Hélène Lemesle

 

Références : Deux publications de l'OEAP, Guide de l'Observatoire économique de l'achat public (2007); Notice d'information relative aux achats publics socio-responsables - GEM DD (juillet 2009).

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis