Projet de loi logement - Christine Boutin : "Il n'y a aucune honte à ce qu'un ministre soit battu sur un article"
Le 14 octobre en fin de journée, le Sénat a entamé l'examen du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion. Un débat qui intervient dans un contexte bouleversé par la crise financière et celle de l'immobilier, et sur un texte qui tend depuis quelques semaines à cristalliser les oppositions. Lors de la discussion générale, Christine Boutin s'est montrée très ouverte à l'introduction d'amendements. La ministre du Logement a ainsi déclaré aux sénateurs attendre "leurs propositions" et a félicité la commission des affaires économiques de sa "volonté d'associer encore plus étroitement l'ensemble des acteurs majeurs de la politique du logement, notamment en confortant la place des collectivités locales dans les politiques de l'habitat, afin de répondre au mieux à la nécessité de construire plus".
Comme on pouvait s'y attendre (voir ci-contre notre article "La discussion parlementaire s'annonce riche en rebondissements"), la discussion générale s'est toutefois particulièrement attardée sur l'article 17 du projet de loi, qui doit assouplir l'obligation des 20% de logements locatifs sociaux prévue par l'article 55 de la loi SRU, en permettant la prise en compte des logements en accession construits dans le cadre du Pass-foncier et du prêt social location-accession (PSLA). Christine Boutin a défendu cette mesure, en indiquant que "les logements destinés à l'accession populaire à la propriété ont les mêmes caractéristiques que les logements locatifs sociaux : mêmes aides publiques avec la TVA à 5,5%, mêmes plafonds de ressources, même délai pour les comptabiliser" et qu'il s'agissait là d'"un outil supplémentaire pour encourager la construction et les parcours résidentiels diversifiés".
Ces arguments n'ont pas suffi à emporter l'adhésion, y compris sur certains bancs de la majorité. Dominique Braye, rapporteur (UMP) de la commission des affaires économiques, a au contraire redit sa volonté de défendre son amendement de suppression de l'article 17, qui à ses yeux "ne favorisera en rien l'accession sociale à la propriété". Brigitte Bout, rapporteur (UMP) de la commission des affaires sociales, s'est toutefois montrée réservée sur cette initiative, se demandant "pourquoi considérer que les mêmes personnes sont riches quand elles sont propriétaires et pauvres quand elles sont locataires ?". Les orateurs de l'Union centriste se sont, pour leur part, déclarés "inquiets" de l'article 17, tandis que l'opposition affichait une franche hostilité à cet article, en invoquant les mânes de l'abbé Pierre.
Devant le sort très incertain réservé à cet article, Christine Boutin a pris les devants en indiquant "qu'il faut aborder ce problème avec intelligence, ouverture et sens des responsabilités". Dans les couloirs du Sénat, elle s'est montrée nettement plus pessimiste, affirmant aux journalistes présents qu'"il n'y a aucune honte à ce qu'un ministre soit battu sur un article". Une étude du Credoc publiée en juin dernier - et citée par la ministre dans son intervention - montre pourtant que 84% des Français se déclarent favorables à la prise en compte des logements en accession sociale à la propriété dans le quota des 20% de logement sociaux.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (examiné en première lecture par le Sénat à partir du 14 octobre 2008).