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Finances locales - Agence de financement : les élus attendent une "marque de confiance"

Les associations d'élus du secteur communal viennent de lancer un nouvel appel en faveur de l'agence de financement des collectivités, dans lequel elles placent beaucoup d'espoir. Elles appellent le gouvernement à faire confiance aux collectivités.

Il y a un mois, les présidents de trois associations d'élus locaux - associations des maires de France, des grandes villes et des communautés urbaines de France - relançaient le Premier ministre dans un courrier commun sur l'agence de financement des collectivités locales. "Il est temps de prendre une décision et que le voile soit levé sur les suites qui seront données à ce projet", écrivaient-ils. Depuis, l'examen du projet de loi de finances pour 2013 a démarré à l'Assemblée nationale et le Sénat a réuni ses "états généraux de la démocratie territoriale". Mais, le gouvernement n'a apporté aucune réponse aux élus locaux.
Réunis, ce 24 octobre devant la presse pour redire leur commune détermination à voir le dossier avancer, les responsables des sept plus importantes associations d'élus du "bloc local" (associations des maires de France, des petites villes, des grandes villes, des communautés urbaines, des maires ruraux, Fédération des villes moyennes et Assemblée des communautés de France) ont dit espérer que des annonces soient faites de la part du gouvernement, au plus tard lors du congrès de l'Association des maires de France, qui se tiendra du 20 au 22 novembre prochains. Ce calendrier permettrait encore l'introduction dans le projet de loi de finances pour 2013 d'un amendement du gouvernement prévoyant la création de l'agence. Le rattachement des dispositions au projet de loi sur la nouvelle étape de la décentralisation, qui sera présenté en Conseil des ministres au début de l'année prochaine, est une autre éventualité envisagée par les associations d'élus locaux. Même plus tardive, cette hypothèse leur donnerait satisfaction.

La garantie de l'Etat mise en jeu ? 

Les élus locaux font remarquer qu'il ne sert à rien d'attendre plus longuement, considérant que le dossier est mûr aujourd'hui. "L'ensemble des remarques formulées dans le rapport [que le gouvernement a remis en mars dernier au Parlement] ont été prises en compte, notamment grâce aux réunions techniques qui ont pu se tenir avant l'été entre les services concernés des ministères et ceux de nos associations", indiquaient les présidents d'associations d'élus locaux dans leur courrier à Jean-Marc Ayrault.
Mais Bercy oppose toujours au projet d'agence de vives réserves. Ce qui ne surprend guère Martin Malvy. L'ancien ministre du Budget se souvient que le ministère de l'Economie et des Finances n'est pas une maison qui "déborde d'enthousiasme" pour la décentralisation. Au-delà, Bercy veut surtout s'assurer que l'Etat ne devra pas venir au secours de l'agence en cas de difficultés. Le 19 octobre, la ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique estimait, elle aussi, que "in fine, c'est l'Etat qui reste le seul garant possible" en cas de défaillance financière d'une collectivité.
Pour les représentants des associations d'élus locaux, la mise en place d'un établissement public local exerçant le pilotage de l'agence et contrôlant une société anonyme, chargée d'intervenir sur les marchés, demeure, sur le plan technique, la meilleure réponse à cette question. "La structure de l'établissement public est la plus solide, celle qui permet d'assurer la solidarité et la coopération entre toutes les collectivités adhérentes. Et c'est cette solidité qui est un des éléments essentiels de la garantie que l'agence fournira aux prêteurs", a affirmé l'entourage de Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France. Cette solution "n'implique pas la garantie de l'Etat", a ajouté Olivier Landel, délégué de l'Association des communautés urbaines de France, même si, a-t-il reconnu, l'Etat "a une responsabilité vis-à-vis de la sphère publique". Une responsabilité qui a par exemple amené l'Etat à apporter sa garantie à Dexia ou au Crédit immobilier de France.
Le gouvernement ne partage pas cette vision. Tout en se disant favorable à l'agence, Marylise Lebranchu déclarait le 24 septembre dans une entrevue au quotidien Les Echos que sa préférence allait à une structure à statut mutualiste.

Un mode de financement avantageux, selon les associations d'élus

Pour Olivier Landel, ce statut "n'est pas impossible, mais il est moins performant. Sauf à tordre le droit de telle sorte qu'on crée un établissement public local à partir du droit de la mutuelle, on créera une structure qui est regardée par les marchés comme pouvant faire faillite". Et Olivier Landel de poursuivre : "Nous préférons que l'agence parte sur des bases solides plutôt que sur des bases négociées. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas continuer le dialogue." Signe que, sur le volet technique, de vraies divergences existent entre les associations d'élus locaux et le gouvernement.
"Nous voulons cette agence non pas pour emprunter davantage, mais pour emprunter mieux", ont lancé à plusieurs reprises les responsables des associations d'élus locaux. Ils attendent du projet la création d'une offre de financement pérenne et complémentaire à l'offre existante (environ 5 milliards d'euros chaque année). Les conditions d'accès à la liquidité seraient de surcroît, affirment-ils, moins coûteuses : si l'agence existait aujourd'hui, elle permettrait aux collectivités de se financer à des taux inférieurs de 150 points de base à ceux du marché, selon les élus locaux. Dans le contexte actuel marqué par une stagnation des dotations aux collectivités et une croissance des charges, "ce serait un réel gisement d'économies", a estimé Jacques Pélissard. Au-delà des aspects financiers, un arbitrage du gouvernement en faveur de l'agence serait "un élément majeur de l'acte III de la décentralisation", a jugé Daniel Delaveau, président de l'Assemblée des communautés de France. "Nous demandons au gouvernement une marque de confiance", a poursuivi Jacques Pélissard, en précisant que les collectivités en étaient dignes, puisqu'elles affichent, en particulier, un endettement globalement raisonnable (égal à 10% de la dette publique totale) et des effectifs stabilisés. "Il en va aussi de la capacité des collectivités à participer au redressement de notre pays", a encore indiqué Daniel Delaveau.