Archives

Finances locales - Agence de financement des collectivités : "détermination" des élus locaux face à la "prudence" de l'Etat

Réunis ce 6 mars, les responsables de l'association d'étude de l'agence de financement des collectivités locales ont redit "leur détermination" alors que le gouvernement tarde à remettre son rapport sur le projet.

Les retards dans le processus de création de l'agence de financement des collectivités locales n'ont pas entamé la "détermination" des associations d'élus locaux qui portent le projet (Association des maires de France, maires de grandes villes et Association des communautés urbaines de France), affirme Olivier Landel, délégué général de l'association d'étude qui planche sur le projet. L'association a maintenu, ce 6 mars dans l'après-midi, une réunion programmée initialement pour évoquer le rapport du gouvernement sur les conséquences de la création de l'agence "pour le budget de l'Etat et des collectivités territoriales". Prévu par l'article 109 de la loi de finances pour 2012, ce rapport devait être remis au Parlement avant le 15 février dernier. Au cours de la discussion parlementaire, la ministre du Budget avait déjà obtenu un sursis d'un mois, expliquant que son administration n'aurait pas le temps de préparer le document en si peu de temps. Le rapport est aujourd'hui achevé dans sa rédaction et fait l'objet des derniers arbitrages au cabinet du Premier ministre, après avoir été examiné la semaine dernière par les cabinets ministériels à Bercy. Il pourrait arriver au Parlement sous peu. Rencontrant le 22 février une délégation de maires de grandes villes, le ministre chargé des Collectivités territoriales avait promis que le rapport serait déposé avant la fin de la session parlementaire, qui intervient ce 7 mars.
Très attendu, ce rapport va-t-il faire évoluer le projet d'agence ? Sur le plan technique, probablement pas. "Il y a déjà eu beaucoup d'échanges entre les élus locaux et les cabinets ministériels. Aujourd'hui, le sujet n'est plus d'ordre technique", répond un spécialiste au sein d'une association d'élus locaux, pour qui "le sujet est, en fait, politique".

Garantie ou responsabilité de l'Etat ?

Où en est-on vraiment ? Lors du congrès des maires de France, en novembre dernier, le Premier ministre et le ministre de l'Economie avaient indiqué que le gouvernement ne s'opposerait pas à la création de l'agence, tout en souhaitant que celle-ci n'intervienne pas avant 2013, pour laisser le temps à la future structure publique de financement des collectivités portée par la Caisse des Dépôts et la Banque postale de se mettre en place (lire notre article du 24 novembre 2011 ci-contre). Plus récemment, la ministre du Budget s'est montrée beaucoup moins ouverte. Le 25 janvier, elle déclarait aux sénateurs de la commission des finances (lire le compte rendu de l'audition) qu'"on ne peut confier aux collectivités territoriales la gestion d'une banque" parce que "ce n'est pas leur métier". En outre, elle faisait valoir qu'"une banque spécifique pour financer les collectivités locales serait nécessairement assortie de la garantie de l'Etat et pèserait sur l'ensemble des risques couverts par l'Etat".
Cette garantie de l'Etat est-elle vraiment nécessaire, comme l'affirme la ministre ? "Absolument pas", considère Olivier Landel, qui rappelle que les associations d'élus locaux n'ont jamais travaillé sur un schéma impliquant la garantie de l'Etat. La seule garantie apportée à l'agence serait celle des collectivités membres. Une modalité qui n'est pas neuve. "Le financement du logement social est garanti par les collectivités locales, pas par l'Etat. Et ça fonctionne très bien", explique Olivier Landel.
Si la garantie de l'Etat est totalement mise de côté par les élus locaux, sa responsabilité est probablement engagée. En cas de coup dur pour l'agence, l'Etat viendrait sans doute à sa rescousse, comme il l'a fait récemment avec Dexia alors que le droit ne l'y obligeait pas.

Emission obligataire groupée en fin d'année

Du fait de cette responsabilité - que l'Etat lui-même entend jouer vis-à-vis de l'agence -, le gouvernement pourrait exiger que l'Etat soit représenté au sein des instances exécutives de la future structure, qui prendra la forme d'un établissement public local. Une piste parmi d'autres, qui "ne pose aucun problème" aux élus locaux. Le délégué général de l'association d'étude, et de l'Association des communautés urbaines de France, s'interroge cependant sur la nécessité d'une telle solution. L'établissement public serait déjà "régulé" par la Cour des comptes et l'Autorité de contrôle prudentiel – celle-ci surveille l'activité des banques – tandis qu'il aurait l'obligation de déposer ses fonds auprès du Trésor. "On n'invente pas un acteur hors du champ du contrôle", résume Olivier Landel.
Dans ce contexte marqué par la prudence du gouvernement, les bases législatives de l'agence seront posées au plus tôt à l'occasion du prochain collectif budgétaire, qui, quelle que soit la majorité élue en juin, pourrait être débattu au début de l'été prochain. Dans ce cas, l'agence verrait le jour à la fin du premier semestre 2013. Ce calendrier inquiète les élus locaux soucieux de maintenir l'effort d'investissement des collectivités. Le gouvernement ne pourra éternellement mobiliser les fonds d'épargne gérés par la Caisse des Dépôts, font-ils valoir. Ce qui les pousse à recourir à des alternatives aux emprunts bancaires. Les grandes villes et les communautés urbaines préparent ainsi, avec des régions et des départements, une émission obligataire groupée afin de lever à la fin de l'année plus d'un milliard d'euros, soit un montant très supérieur à celui des initiatives de ce type prises par le passé. La possibilité d'une telle opération au montage très compliqué ne peut en aucun cas remplacer l'agence de financement, soulignent les collectivités à l'origine du projet, qui tiennent à ce que l'agence soit créée en 2013.