Formation professionnelle - Achats de formations : l'Igas préconise de développer les groupements de commandes entre Pôle emploi et régions
Un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), publié le 20 mars, met en avant les difficultés de Pôle emploi en matière d'achats de formations. Le document a été rédigé dans la perspective du renouvellement de la procédure d'achats sous forme d'accord-cadre à l'horizon de juin 2012.
Depuis la fusion de l'ANPE et des Assedic en 2009, qui a donné lieu à la création de Pôle emploi, la procédure d'achat de formations fonctionne par accords-cadres. Une procédure censée alléger les modalités de mise en concurrence et les délais de passation des marchés pour répondre le plus vite possible aux besoins de formation en cours d'année. Mais cette procédure se montre, d'après l'Igas, moins efficace que prévu. "Si la procédure retenue a permis, malgré le calendrier resserré, de limiter le nombre de contentieux et de garantir en général la régularité de la passation des marchés, elle a néanmoins souffert d'une excessive rigidité qui a nuit à la qualité des achats de formations", détaille ainsi le document, qui s'appuie sur une enquête menée auprès de quatre régions (Poitou-Charentes, Bretagne, Rhône-Alpes et Picardie) entre juillet et octobre 2011.
Parmi les dysfonctionnements observés : des appels d'offres lancés sur certains lots et pour certains types de formations alors qu'aucun besoin correspondant n'était avéré, un taux d'infructuosité élevé, un nombre d'attributaires des accords-cadres souvent réduits et des marges de manoeuvre rarement utilisées par les régions, notamment la possibilité de définir des sous-lots à caractère géographique.
Le rapport a également étudié l'articulation des achats entre Pôle emploi et les conseils régionaux, qui sont eux aussi acheteurs de formations et ont notamment pris en charge 62% des formations débutées en 2009. "Le mode de coordination le plus répandu est l'échange d'informations visant à garantir la complémentarité des achats, généralement formalisé dans une convention de coordination", détaille le rapport. Une répartition qui peut se faire sur le principe suivant : d'un côté les achats de formations qualifiantes, prises en charge par le conseil régional, et de l'autre les formations d'adaptation, visant un retour rapide à l'emploi, prises en charge par Pôle emploi.
En Poitou-Charentes, un protocole d'accord sur la formation des demandeurs d'emploi a ainsi été signé le 22 novembre 2010 entre Pôle emploi et le conseil régional. Il précise la complémentarité des interventions des deux acteurs en matière de formation, Pôle emploi devant concentrer ses moyens sur le retour rapide à l'emploi durable des demandeurs d'emploi et le conseil régional sur l'élévation de leur niveau de qualification professionnelle et leur insertion durable dans l'emploi. Mais "au total, les instruments d'articulation mis en place, s'ils sont potentiellement porteurs d'amélioration, sont encore trop récents pour être évalués", insiste le rapport, qui préconise de conforter et de généraliser dans toutes les régions la mise en place de processus formalisés de diagnostic et d'identification des besoins, ainsi que d'échanges sur la stratégie d'achat des différents partenaires.
Les bienfaits des groupements de commandes
L'Igas met aussi en avant les bienfaits des achats réalisés en commun par les deux partenaires. Des achats aujourd'hui encore très limités. "La mission a observé que les achats conjoints étaient très rarement pratiqués, soit parce que les besoins non couverts par les accords-cadres l'étaient par le programme régional de formation du conseil régional, soit que des achats réalisés en interne étaient jugés plus simples et plus rapides", souligne ainsi le rapport. "De plus, la crainte de 'perdre la main' et de se voir imposer des choix par le conseil régional a régulièrement été exprimée." L'exemple de la région Rhône-Alpes, qui dès 2008 s'est lancée dans ce type de groupement de commandes, est mis en valeur. La nouvelle convention signée dans cette région en 2011 renouvelle l'expérience pour la période 2012-2014. L'Igas y voit de nombreux avantages : simplification des tâches administratives, incitation à utiliser le même dispositif d'information et de prescription de l'offre de formation régionale, meilleure articulation dans la définition et la mise en œuvre de la politique de formation, plus grande clarté et lisibilité de la stratégie des pouvoirs publics dans ce domaine, plus grande réactivité… Face à ces points positifs, l'Igas préconise de développer cette forme de partenariats régionaux sous forme de groupements de commandes, "soit pour couvrir la totalité des besoins régionaux, comme en Rhône-Alpes, soit sur une partie de l'offre, non couverte par les accords-cadres".
L'Igas pointe par ailleurs des procédures et outils de prescription encore souvent artisanaux. "Dans certaines régions (en Rhône-Alpes, et potentiellement Poitou-Charentes dans un avenir proche), des systèmes d'information permettent déjà d'avoir accès à l'offre des différents financeurs et de prescrire en ligne des formations. Dans d'autres, au contraire, les conseillers sont contraints d'utiliser plusieurs outils ou fichiers Excel mis à leur disposition, sans aucune visibilité sur les disponibilités actualisées", détaille le rapport. Les auteurs proposent de généraliser la mise en place d'un système d'information permettant la connaissance de l'offre de formation (tous financeurs confondus) et la prescription en ligne par Pôle emploi et ses cotraitants.
Enfin, l'Igas estime que le pilotage et le suivi de l'exécution des marchés pourraient être professionnalisés. "Des gains de productivité pourraient être dégagés dans le suivi administratif des stagiaires et des organismes de formation, signale ainsi le rapport, la mise en place de 'plateformes formation' chargées d'assurer les fonctions de 'back office' (inscription, rémunération, récupération des attestations, etc.) devrait être généralisée afin d'alléger la charge de travail des conseillers sur le plan administratif."