TICE - 50 millions d'euros pour aider 5.000 écoles rurales à s'équiper en numérique
"Et voilà, 50 millions d'euros, c'est vite signé !", a plaisanté le ministre de l'Education nationale, Xavier Darcos, en paraphant l'accord "Ecoles numériques rurales", ce 31 mars, à l'école du Massif-Saint-Thierry (Marne), avec Vanik Berberian, maire de Gargilesse-Dampierre (Indre) et président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF). 5.000 communes de moins de 2.000 habitants pourront ainsi bénéficier de subventions, dans le cadre du plan de relance de l'économie. C'est d'ailleurs actuellement le seul volet numérique du plan de relance et "il a fallu se battre pour qu'il y ait une part pour les écoles rurales", a confié le ministre. "Nous nous sommes défendus comme des diables pour faire passer cette mesure : il a fallu convaincre que cet argent ne servirait pas seulement à payer des ordinateurs fabriqués hors de l'Union européenne mais aussi à créer de l'activité sur notre territoire - revendeurs, installateurs de réseaux informatiques, sociétés de maintenance, créateurs de logiciels pédagogiques, etc.", confirme un conseiller du ministre.
Concrètement, sur une dépense globale de 12.000 euros d'équipement hors taxes, l'Etat abondera à hauteur de 9.000 euros sur les équipements et 1.000 sur les ressources numériques, soit 80% au total. Selon, les données du ministère, 26.000 écoles pourraient être concernées. "Les premières arrivées seront les premières servies !", a prévenu le ministre. Pour postuler, les communes devront répondre au niveau départemental à un cahier des charges précis où aucune dimension du projet ne semble avoir été oubliée : construction du réseau local dans l'école ; description des matériels, des conditions de maintenance et de garantie ; formation des enseignants et contenus numérisés. Les bonnes pratiques des collectivités locales pionnières dans ce domaine ont certainement été observées à la loupe.
L'école rurale numérique devra au minimum comporter un tableau blanc interactif (TBI), et de 8 à 12 ordinateurs portables sous forme d'une classe mobile. "Nous comptons sur cette offre intégrée pour favoriser une maturation du marché. Ainsi, les industriels vont se mettre en ordre de bataille. Et nous espérons que cela créera une dynamique y compris dans les écoles qui ne seront pas aidées financièrement", ont expliqué les conseillers technique du ministre.
A l'école de la communauté de commune du Massif
Evidemment, ce n'est ni pour sa chapelle du XIIe siècle ni pour ses 42 hectares de vigne qui produisent pour la maison de Champagne Veuve Cliquot que le ministre a fait son déplacement à l'école intercommunale du Massif-Saint-Thierry. "Vous êtes trop modeste, Monsieur le Maire. Vous n'avez pas attendu la subvention de l'Etat pour vous équiper et votre commune, comme d'autres dans la Marne, a su montrer son dynamisme : six écoles ont ainsi été récompensées pour leurs initiatives lors du salon Educatice, en novembre dernier, où je vous avais rencontré", a répondu le ministre au discours un rien timide de Michel Bernard, maire de Saint-Thierry (600 habitants) et président de la communauté de communes du Massif (3 communes, 1.594 habitants). L'école rurale compte cinq classes et 114 élèves. Et depuis plusieurs années, elle a investi dans deux TBI et une classe mobile de 12 postes.
L'établissement s'était notamment illustré, à l'occasion du Salon de l'ducation, pour un projet pédagogique d'accompagnement en podcast des chemins de randonnées, en lien avec la Fédération locale de marche à pieds. A l'origine de l'initiative, se trouve Régis Camus, le deuxième adjoint de la mairie qui est également le directeur d'école et l'enseignant du cours moyen deuxième année. "Nous disposons maintenant de la dernière génération de tableau blanc interactif, en quelque sorte la Rolls des TBI. Nous travaillons désormais sur un projet artistique toujours en lien avec les podcasts", a-t-il expliqué devant les officiels qui observaient les 23 élèves de CM2 au travail autour de l'illustration sonore et visuelle de trois fables créées auparavant avec un traitement de texte.
"Je suis heureux que beaucoup de communes de France puissent bénéficier de ces dernières technologies. Je suis un peu ébahi par ce que j'ai vu ici. Cela devrait obliger les élus à parler davantage aux enseignants pour élaborer les projets : se mettre autour d'une table pour définir les besoins... Dans la morosité actuelle des territoires ruraux, c'est une bonne nouvelle", a reconnu le président de l'AMRF qui compte 10.000 communes adhérentes. "C'est une mesure de justice et d'équité sur le territoire. Nous verrons ensuite comment poursuivre l'opération...", a conclu Xavier Darcos.
Luc Derriano / EVS
Obtenir le bon débit en zone rurale
Le président de l'AMRF s'est montré très satisfait de la signature de cette convention, même si, a-t-il souligné, "il y a mille sujets de tension entre les élus ruraux et le ministère de l'Education : la mise en place de la semaine de quatre jours, les fermetures de classes, etc.". Il a notamment souligné l'importance de l'aménagement numérique des campagnes en revenant sur son intervention lors d'une table ronde organisée le 17 février dernier par la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire de l'Assemblée nationale. Conscients que le haut débit d'aujourd'hui est le bas débit de demain, les maires ruraux demandent pour leurs communes le "bon débit", celui qui en fonction des technologies du moment permet de répondre au développement des usages dans tous les domaines de la vie quotidienne : travail, loisirs, mais aussi santé ou services publics, et donc enseignement... "Le défi de la montée des débits grâce au déploiement de la fibre optique est aussi important que celui de l'électrification de la France au siècle dernier", souligne l'association. L'AMRF appelle donc à la mise en place d'une péréquation entre les territoires et demande au législateur de rédiger une réglementation équitable qui ne laisse pas les opérateurs privés sur les seuls territoires économiquement rentables, laissant aux collectivités locales la charge de l'aménagement numérique des zones qui le sont moins. "Il ne faudrait pas reproduire l'erreur commise pour la téléphonie mobile !", a conclu le président.
L.D.