Tice - Le ministre de l'Education va s'appuyer sur les collectivités pour mieux équiper les écoles

A quoi pourrait bien ressembler l'école du futur ? A première vue, à rien de bien nouveau, si l'on en juge l'aspect habituel de ce bâtiment moderne où s'est invité ce 11 septembre le ministre de l'Education : un établissement de briques rouges planté au milieu d'une cité de petites maisons pour cadres moyens, en grande banlieue parisienne. Mais l'essentiel se trouve à l'intérieur de l'école Willy-Brandt d'Elancourt (Yvelines). Au rez-de-chaussée, une salle informatique accueille une quinzaine d'élèves qui se concentrent individuellement (un PC par enfant !), et avec l'aide d'une enseignante, sur un logiciel d'exercices développant la mémoire et le vocabulaire. Baptisé "Mémosaure", le CD-Rom a été spécialement adapté pour la ville par des chercheurs lyonnais. A l'étage, une classe de CM2 suit sa leçon de langue en visioconférence sur un tableau numérique interactif (TNI). Le professeur d'anglais "natif" y présente la cité universitaire d'Oxford. L'institutrice française anime le groupe d'élèves, suscite les réponses aux questions posées par son homologue britannique et fait répéter les phrases clés. Plus loin, les petits du CP utilisent le TNI pour classer des images d'animaux où l'on entend le son "a". La base de données permet d'afficher puis de glisser, à l'aide d'une longue baguette et dans la bonne colonne, le chat, l'escargot... projetés en vidéo sur l'écran blanc. 

Mille sites de visioconférences en primaire

Et ce n'est pas tout ! L'école dispose aussi d'une classe informatique mobile : quinze ordinateurs portables sont intégrés dans un chariot à roulettes qui permet de les transporter rapidement d'une salle à l'autre, tout en restant connecté à internet en wifi. Un espace numérique de travail (Iconito) sera également expérimenté dans une école et un centre de loisirs de la ville. "A chaque fois, les expériences s'appuient sur le volontariat des équipes pédagogiques et en partenariat avec l'inspection académique de Versailles et le centre régional de documentation pédagogique. Nous pouvons aussi compter sur l'aide de prestataires privés : Prométhéan pour les TNI, Educastream pour la visioconférence", a expliqué Jean-Michel Fourgous, député-maire de la ville, à Xavier Darcos.
Ravi, le ministre a profité de ce cadre idéal pour annoncer d'une part, "un vaste projet d'équipement en tableaux numériques interactifs" et, d'autre part, "le déploiement de mille sites de visioconférence pour soutenir l'enseignement précoce de l'anglais, dès la rentrée 2008". Déjà en janvier prochain, vingt sites seront retenus, "dans des communes volontaires", pour expérimenter et permettre de déployer le dispositif dans les temps. Les mille sites seront financés sur une ligne budgétaire de l'Education nationale, ont tenu à préciser les conseillers techniques du ministre.

Expérimentation des baladeurs numériques

Quelques ronds-points plus loin, le cortège du ministre s'est arrêté devant le collège Blaise-Pascal. Sur l'initiative du président Pierre Bédier, le conseil général des Yvelines a décidé de doter huit classes de baladeurs numériques dernier cri dans huit collèges pilotes du département  (une classe par site), dont ce collège de Plaisir. Les Ipod nano vidéo (lancés en Europe la semaine dernière par Apple !) auront une triple fonction : clé USB pour télécharger des données depuis les sites internet où seront mis en ligne les cours et les commentaires de la trentaines de professeurs participant à l'expérimentation, baladeur audio pour l'écoute de fichiers sons et dictaphone grâce au micro associé (notamment, pour l'apprentissage des langues). Le coût de l'opération atteint 170.000 euros, "et ce n'est pas avec les crédits de l'Etat", a glissé Pierre Bédier, un brin provocateur. "A Plaisir, ce sont seize élèves de sixième en difficulté qui bénéficieront de cet équipement high-tech. Mais nous avons retenu une variété de collèges : en zone d'éducation prioritaire, site Ambition réussite, établissement en milieu rural... et une classe accueillant des élèves déficients intellectuels", a détaillé le président du conseil général.
Les Yvelines se présentent comme un département particulièrement en pointe en matière d'équipement informatique : 10.300 ordinateurs sont répartis dans les 115 collèges publics (dont 7.800 dédiés à la pédagogie), 340 chariots multimédias y circulent. 900 ordinateurs et 90 chariots ont été subventionnés pour les 22 établissements privés. Les deux tiers des collèges sont équipés de logiciels d'analyse vocale pour l'apprentissage des langues. En un an, 200 TNI ont également été déployés dans les collèges et une centaine dans les écoles primaires, grâce à un cofinancement du département.

Mobilisation du conseil territorial de l'éducation

"Il est vrai que les Yvelines ont des moyens budgétaires que n'ont parfois pas d'autres collectivités. Je pense notamment à mon département de Dordogne", a noté Xavier Darcos, reconnaissant que les collectivités locales seront "forcément" sollicitées.
Afin d'accompagner son plan de déploiement, il a annoncé que le conseil territorial de l'Education nationale (instance créée par la loi de décentralisation du 13 août 2004 réunissant des représentants de l'Etat et des collectivités) va être saisi pour "voir où nous en sommes du développement des Tice". Et afin de favoriser les partenariats avec les collectivités et les académies, il proposera par ailleurs d'ici mars 2008 une "grande charte nationale pour le numérique", animée notamment par le réseau Sceren-CNDP. Le ministre a par ailleurs invité les collectivités à travailler avec les rectorats pour mettre en place des comités de pilotage académiques dédiés aux Tice. "Définissons les stratégies et l'intendance suivra !", s'enthousiasme, un peu vite, le ministre.
"Nous sommes des pionniers mais nous voulons échanger avec d'autres communes. Nous organisons ainsi les 19 et 20 octobre prochains le troisième salon de la réussite scolaire, avec les enseignants, les chercheurs, les parents d'élèves...", a conclu Jean-Michel Fourgous. Les élus des départements voisins feraient bien de s'y rendre pour voir ce qui les attend !

Luc Derriano / EVS, depuis Elancourt et Plaisir