Urbanisme - Urbanisme commercial : quels critères environnementaux ?
La loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008 et son décret d'application du 24 novembre 2008 ont profondément modifié le régime des autorisations d'exploitation commerciale. Désormais, les commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) lorsqu'elles statuent sur une autorisation d'exploitation commerciale se "prononcent sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs" (Code du commerce, L.752-6). Pour ce faire, la commission doit évaluer les critères suivants :
- en matière d'aménagement du territoire : l'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne; l'effet du projet sur les flux de transport; les effets découlant des procédures prévues aux articles L.303-1 du code de la construction et de l'habitation et L.123-11 du Code de l'urbanisme ;
- en matière de développement durable: la qualité environnementale du projet ; son insertion dans les réseaux de transport collectif.
Un rapport parlementaire publié en février dernier (voir notre article ci-contre) a pointé le flou entourant ces critères : "Au regard du critère économique précédemment appliqué, qui consistait à prendre en compte l'équilibre entre les différentes formes de commerce et reposait sur une appréciation de l'impact du projet sur la densité d'équipement commerciale (...), les critères actuels laissent aux commissions une marge d'appréciation importante." Afin de limiter cette marge d'appréciation, le ministère de l'éEologie a publié le 31 décembre 2009 une circulaire ayant pour but de préciser ces critères (voir le document ci-contre).
Une CDAC peut-elle refuser un dossier car le bâtiment n'est pas "performant énergétiquement"?
Dans une question écrite, Thierry Repentin, sénateur de Savoie (PS) a demandé au ministère de détailler ce qu'il entendait par "qualité environnementale du projet" : une CDAC peut-elle pénaliser voire refuser un projet parce que le bâtiment ne fait que respecter la réglementation thermique en vigueur (RT 2005) sans afficher d'ambition particulière ? La commission peut-elle imposer des exigences au-delà de la réglementation au candidat?
A cette question, le ministère a répondu en rappelant que la CDAC doit d'abord s'assurer de la comptabilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale (Scot). Ensuite, l'appréciation des critères doit permettre de réaliser un "bilan entre les aspects positifs et les aspects négatifs du projet", qui tienne compte "des enjeux particuliers du territoire" et permette à la commission de prendre sa décision.
Sur la qualité environnementale, le ministère estime que l'essentiel est la localisation du projet, les qualités propres du bâtiment sont "moins décisives" : "Il convient de s'assurer que, par sa localisation, le projet ne contrevient pas de façon irréversible aux politiques menées en faveur de la biodiversité, des paysages et des sites, ainsi que de la prévention des risques... Les qualités propres du projet en termes de production d'énergie ou de performance énergétique sont également à prendre en compte; elles sont toutefois susceptibles d'évolution dans le temps et sont considérées comme moins décisives." Reste que la commission conserve sa liberté d'appréciation : ces qualités "peuvent s'inscrire dans un faisceau d'indices conduisant la commission à porter une appréciation favorable ou défavorable sur le projet".
Fanny Morisseau, Avocat à la Cour / Cabinet de Castelnau, et Hélène Lemesle
Référence : Réponse ministérielle publiée au JO du Sénat le 4 mars 2010, question écrite n°10275 de Thierry Repentin publiée le 1er octobre 2009.