Logement - TVA à 5,5% : Christine Boutin n'est "pas certaine d'obtenir satisfaction"
Dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, la ministre du Logement a été auditionnée, le 26 novembre, par la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale. Après un passage très mouvementé au Sénat - conclu par l'adoption en première lecture, le 21 octobre, d'un texte largement amendé -, cette audition était l'occasion d'un nouveau tour d'horizon sur un dossier que la crise économique rend de plus en plus sensible.
Dès la conclusion de son propos liminaire, Patrick Ollier, le président de la commission, a d'ailleurs souhaité savoir ce qu'il en était de "la TVA à 5,5% s'agissant de l'accession sociale à la propriété". La question portait plus précisément sur le projet d'extension de la TVA à 5,5% - aujourd'hui cantonnée aux dispositifs d'accession sociale à la propriété dans le cadre du Pass Foncier et du prêt social de location-accession (PSLA) - à l'ensemble des particuliers éligibles au prêt à taux zéro, soit près de 80% des ménages et 60% des acheteurs actuels. Dans sa réponse, Christine Boutin a fait preuve d'une très grande prudence : "Une TVA à 5,5% permettrait quant à elle de relancer le secteur de l'immobilier, mais aucun arbitrage n'a encore été rendu et je ne suis pas certaine d'obtenir satisfaction." S'il est de bonne guerre, pour la ministre du Logement, de prendre les parlementaires à témoin dans le bras de fer qui l'oppose à son collègue de Bercy, ses propos indiquent cependant que la décision est loin d'être acquise.
Moins coûteuse que la récente proposition de transformer l'actuel régime d'amortissement fiscal des dispositifs Robien et Borloo - qui favorise les revenus les plus élevés - en un système de réduction d'impôt forfaitaire (voir notre article ci-contre), l'extension de la TVA à 5,5% représenterait néanmoins un coût de l'ordre de 250 millions d'euros. Les professionnels sont par ailleurs partagés sur l'impact réel d'une telle réduction, dans la mesure où elle ne s'appliquerait que sur une période de 18 à 24 mois.
Article 17 : le retour ?
L'autre point très attendu de l'audition concernait l'éventuelle modification des dispositions de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement urbains) relatives au quota de 20% de logements sociaux. L'article 17 du projet de loi, qui prévoyait d'intégrer dans le calcul de ce quota les logements en accession sociale à la propriété, a en effet été supprimé par le Sénat, suscitant une certaine tension entre le gouvernement et sa majorité.
Sur ce point, les députés membres de la majorité se sont montrés plus incisifs que la ministre. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, est revenu à la charge en indiquant que "le Sénat a supprimé, à tort, l'article 17". Le député a été à l'origine, en 2006, d'un amendement à la loi portant engagement national pour le logement visant à intégrer l'accession sociale à la propriété.
Devant l'insistance du président, la ministre du Logement a toutefois fini par concéder "ne [comprendre] toujours pas pourquoi le Sénat a sabordé l'article 17".
Après quelques hésitations, le gouvernement avait joué la carte de l'apaisement en laissant entendre qu'il renonçait à réintroduire l'article 17, en contrepartie de mesures en faveur de l'accession à la propriété, qui reste l'objectif affiché par le chef de l'Etat. Mais la mobilisation de certains députés de la majorité, très remontés contre la position du Sénat, pourrait bien changer la donne. Soucieuse de calmer le jeu, Christine Boutin s'est dite cependant "persuadée que nous parviendrons à proposer une mesure apaisant les inquiétudes tout en favorisant le développement de ce type d'accession à la propriété". La ministre du Logement a indiqué travailler "à un amendement en ce sens", mais sans préciser son contenu. Le compromis pourrait toutefois consister en un maintien du quota de 20% de logements sociaux hors accession, mais combiné avec un allègement des sanctions financières pour les communes qui produisent du logement en accession sociale.
Jean-Noël Escudié / PCA
Professionnels du logement : divergences sur la TVA
Compte tenu du caractère très sensible du projet de loi, la commission a pris soin d'auditionner également un certain nombre d'acteurs du logement, social ou non : Fédération des promoteurs constructeurs (FPC), Fédération nationale des sociétés coopératives d'HLM (FNSCHLM), Union sociale de l'habitat (USH), Union sociale pour l'habitat d'Ile-de-France (Aorif) et Union d'économie sociale pour le logement, (UESL, 1% logement). Sur la question de la TVA, la FNSCHLM propose ainsi "à l'instar du maintien au niveau actuel des plafonds de ressources de l'accession sociale du PLS, le maintien du plafond de ressources pour accéder au taux réduit de TVA en zone Anru". La FPC préconise au contraire, "pour relancer la construction et contribuer à régler le problème du logement" de généraliser la TVA à 5,5% - sous plafond de ressources - à l'ensemble de ventes au titre de l'année 2009. La FPC demande également la suppression du plafonnement des prix de vente, en faisant valoir que l'éligibilité des acheteurs aux différentes mesures prévues par la loi (TVA à 5,5% dans les zones Anru, Pass foncier...) est déjà liée à un plafond de ressources, qui dicte de fait le niveau des prix.
Référence: projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (adopté en première lecture par le Sénat le 21 octobre 2008, examen du texte par l'Assemblée nationale prévu pour décembre 2008).