Fiscalité locale - Taxe professionnelle : un scénario déjà écrit ?
Depuis quelques jours, la future réforme de la taxe professionnelle (TP) fait l'objet de déclarations qui inquiètent les élus locaux et qui leur rappellent une histoire encore récente. Comme ce fut le cas avant la réforme du plafonnement de la valeur ajoutée en 2006, les organisations patronales font entendre leur voix. Le Medef reste campé sur ses positions : il est opposé à la TP. Sa présidente, Laurence Parisot a demandé en mai dernier, lors de son point de presse mensuel, que l'on exonère de taxe professionnelle tous les investissements futurs. Un mois plus tard, il y a seulement quelques jours, à l'occasion d'une interview radio, la présidente de l'organisation patronale réitérait sa demande : "Concernant la réforme de la taxe professionnelle, aucun autre pays ne taxe les investissements. C'est une priorité d'aller jusqu'au bout : oui il faut la supprimer." L'annonce d'une nouvelle réforme de la TP est connue depuis le début du mandat présidentiel. Le 23 juin 2007, Nicolas Sarkozy annonçait, au Salon du Bourget, son intention de réformer la taxe professionnelle afin "d'encourager le travail, la production et l'investissement". Si les conclusions de la réflexion engagée dans le cadre d'un chantier Révision générale des politiques publiques (RGPP) animé par la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, ne sont pas encore connues, des signes avant-coureurs donnent des "sueurs froides" aux gestionnaires locaux.
Pistes
"Le gouvernement a annoncé que la réforme n'aurait d'impact qu'en 2011 tout en précisant qu'elle serait inscrite dans la loi de finances pour 2009. Cet indice milite pour le choix de la suppression de la part investissements de la TP car ce calendrier différé s'inspire de la DIN (dégrèvement pour investissements nouveaux) dont le bénéfice se fait sur une période dégressive de trois ans." Pour Gilles Carrez qui intervenait devant la presse à l'issue du dernier Comité des finances locales, "une telle réforme aurait un enjeu de près de 15 milliards d'euros et devrait donc systématiquement être compensée". Déjà en 2007, dans le cadre du Grenelle de l'environnement, la Confédération générale des PME (CGPME) lançait une première perche en ciblant "un dégrèvement total de taxe professionnelle des investissements existants ou nouveaux destinés à économiser l'énergie".
D'autres pistes sont envisagées : la première consisterait à baisser le niveau du plafonnement de la cotisation des entreprises en fonction de la valeur ajoutée de 3,5% à 3%. Le Medef s'est déjà déclaré favorable à une suppression progressive de la TP par une baisse de la cotisation. La seconde piste, la plus radicale, serait la suppression pure et simple de la TP . "Il faudra alors que les communes et EPCI récupèrent l'ensemble de la fiscalité locale et que les conseils généraux et les conseils régionaux bénéficient d'une part d'impôt national", commente le président du CFL.
Fouquet bis ?
Quoi qu'il en soit, Nicolas Sarkozy, en déplacement le 3 juillet dernier au Creusot sur le thème de la politique industrielle et énergétique, a assuré que "les élus locaux seront de bout en bout associés à la réforme". Et de rajouter : "L'objectif est clair mais nous prendrons le temps qu'il faut pour préparer cette réforme et faire en sorte que les collectivités locales y trouvent leur compte." Pour la réforme de 2006, le gouvernement mit en place une commission réunissant chefs d'entreprises, élus locaux et représentants de l'Etat. Après plusieurs mois de concertation, la commission Fouquet proposa un tunnel pour maîtriser les taux et une réforme de l'assiette. La solution actée par la loi de finances de 2006 fut différente de celle de la commission qui avait tenté de répondre à la commande du président de la République.
Car tout débuta le 6 janvier 2004. Jacques Chirac annonçait, à l'occasion des vœux aux forces vives, deux réformes : la mise en place d'une exonération de taxe professionnelle pour les entreprises qui investissent (DIN) et une réforme de plus grande envergure. "Pour libérer la capacité d'investissement de nos entreprises, le remplacement de la taxe professionnelle par un nouveau dispositif qui ne pénalise pas l'industrie et prenne mieux en compte la diversité des activités économiques est devenu indispensable (...)" Se voulant rassurant, il rajoutait que "le gouvernement veillera évidemment à la neutralité de cette mesure pour les finances des collectivités locales".
Clémence Villedieu