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Logement - Sylvia Pinel voit la vie en rose, la FFB broie du noir, mais tout le monde croit à la reprise

C'est le principe bien connu du verre à moitié plein ou à moitié vide : une même situation peut donner lieu à des interprétations très différentes, pour ne pas dire antagonistes. Ainsi, la ministre du Logement clôturait, le 30 juin, le colloque organisé par la Fédération française du bâtiment (FFB) sur le financement du logement. Dans une intervention à la tonalité très optimiste, elle s'est notamment félicitée du "dynamisme du marché des crédits immobiliers, en partie boosté par les mesures prises dans le cadre du plan de relance" et a mis en avant l'impact attendu des dispositions prises ces derniers mois. 

La production de crédits immobiliers en hausse de 15%

Côté production de crédits immobiliers - à défaut pour l'instant de production de logements -, Sylvia Pinel a indiqué que, selon les chiffres de la Banque de France, les crédits accordés étaient en hausse de 15% sur les quatre premiers mois de l'année. Le chiffre ne précise pas toutefois l'affectation de ces prêts, dans l'ancien (donc sans effet sur la production de logements et l'activité du bâtiment) ou dans le neuf.
La ministre du Logement a également insisté sur l'impact du "PTZ renforcé", qui a conquis 30% de ménages supplémentaires, et sur le prêt à l'accession sociale - désormais accessible à 85% des ménages après le relèvement des plafonds - et qui a connu lui aussi une hausse de 20% du nombre de prêts sollicités.
Sylvia Pinel reconnaît toutefois deux points faibles. D'une part, le prêt à l'accession sociale "reste encore méconnu". Elle demande donc aux banques de se mobiliser davantage pour faire connaître ce dispositif. D'autre part, l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) "peine encore à trouver preneur". Le ministère a donc "proposé un marché aux banques" : la prolongation de ce dispositif, contre un engagement chiffré des établissements de crédit sur le nombre de prêts à distribuer et sur la mise à disposition de cet éco-prêt aux copropriétés.

51.500 emplois perdus en un an et +10% pour les défaillances d'entreprises

Le son de cloche est très différent du côté de la FFB. Celle-ci a en effet profité du colloque pour diffuser sa note de conjoncture sur le premier 2015. Et c'est peu dire qu'elle est mauvaise...
Tous les indicateurs sont en effet au rouge. Ceci vaut à la fois pour le résidentiel et pour le non-résidentiel (hors hôtellerie et locaux agricoles). En termes d'emplois, "le premier trimestre affiche le plus mauvais score enregistré depuis l'entrée dans la grande récession de 2008, avec 51.500 postes de travail de moins (-4,3%) qu'au premier trimestre 2014, y compris intérim en équivalent-emplois à temps plein". Pour leur part, les défaillances d'entreprises augmentent de 10% sur la même période, concentrées surtout sur les petites structures de un à trois salariés.

Autorisations de logements et mises en chantier toujours orientées à la baisse

Une situation plus que morose, que confirme la dernière livraison mensuelle du Commissariat général au développement durable (CGDD), portant sur les chiffres à la fin mai 2015. Malgré la révision de la méthodologie opérée il y a trois mois - qui avait revu les séries statistiques à la hausse (voir notre article ci-contre du 2 mars 2015) - les autorisations de logements délivrées sur la période mars-mai 2015 sont en recul de 5,3% par rapport à la même période de 2014. Sur les douze derniers moins, le recul est de 6,1%. La situation n'est pas meilleure pour les mises en chantier mises en chantier : -7,2% en mars-mai 2015 par rapport à la même période de 2014 et -6,1% sur les douze derniers mois. Des chiffres d'autant plus inquiétants que 2014 reste, pour l'instant, titulaire du plus faible niveau de production de logements depuis 17 ans (voir notre article ci-contre du 28 janvier 2015).
Comme l'a expliqué Jacques Chaunut, le président de la FFB, lors de la présentation des résultats du premier semestre : "Au global, c'est un tableau noir que dessinent donc les informations disponibles sur la situation immédiate, en termes de marché comme d'appareil de production."

Malgré les chiffres, l'espoir demeure pour 2016

Pourtant malgré ces résultats très sombres, le ton reste à l'optimisme. Certes, les professionnels - et sans doute les pouvoirs publics - font une croix sur 2015. En revanche, il reste l'espoir d'une reprise "à l'horizon du quatrième trimestre 2015 ou du début 2016".
Dans son éditorial du dernier numéro de "Bâtiment Actualité", la lettre de la FFB, Jacques Chaunut estime que "le retour, certes fragile et chaotique, mais réel de la croissance économique marque la fin d'un long hiver. Il se matérialise pour notre secteur à travers la reprise du crédit et le dynamisme confirmé des ventes des promoteurs et des constructeurs de maisons individuelles."
Si le ton est plutôt à l'optimisme, la prudence reste néanmoins de mise : "Le printemps, avec l'éclosion de l'activité, n'est certes pas pour demain, mais se prépare dès aujourd'hui [...]. Si, donc, l'ordre naturel des choses est respecté, dans un an, le secteur, grâce à la construction de logements neufs, devrait enfin connaître la reprise."
La FFB précise toutefois que, pour concrétiser cet espoir, deux conditions "incontournables" devront être remplies : "des taux d'intérêt qui restent sages et de réelles barrières à la fraude au détachement". Deux sujets sur lesquels la Fédération compte bien agir dans les prochains mois.

 

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