Vie citoyenne - Subventions aux associations : où en est la transparence ?
Une proposition de loi déposée le 16 juillet par environ 85 députés de droite vise à obliger l'Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics à publier les subventions d'au moins 10.000 euros qu'ils versent aux associations. Au nom de la "transparence", cette proposition de loi succincte "a pour objectif d’apporter de la lisibilité et de la clarté à des procédures parfaitement légales". Les députés proposent la création d'un site national d’information où les financeurs publics seraient tenus de référencer "le nom du bénéficiaire – l’association – et son adresse postale ; le montant et la nature de la subvention" qu'ils ont attribuée.
Un "bilan national des subventions" annuel prévu par la loi
Or, ce que ne mentionne pas la proposition de loi, c'est que cette obligation légale existe déjà. La loi du 23 mai 2006 relative au volontariat associatif, assortie d'un décret paru dans la foulée, concerne toutes les aides attribuées ("toute subvention versée sous forme monétaire ou consentie sous la forme d'un prêt, d'une garantie") par des personnes morales aux associations et fondations d'utilité publique, sans seuil minimal, "à l'exception des aides attribuées en application d'une loi ou d'un règlement". Est ainsi prévue une mise à disposition du public de ces données par voie électronique, sauf pour les communes de moins de 3.500 habitants qui peuvent utiliser d'autres moyens de publication, tels que l'affichage. Enfin, la transmission d'une liste annuelle de ces subventions au préfet vise à permettre au ministère chargé de la vie associative de publier "chaque année sur un site d'information accessible par le réseau internet un bilan national des subventions".
Les "Jaunes" associations de l'Etat comme base
Où en est-on huit ans après ? L'Etat publie, de façon annuelle depuis la loi de finances pour 2009, trois "Jaunes budgétaires" (annexes au projet de loi finances) listant les subventions qu'il a lui-même attribuées aux associations. Par ailleurs, les associations recevant - sur une année ou de façon cumulée - plus de 153.000 euros de dons ou subventions sont elles-mêmes tenues de publier leurs comptes au Journal officiel des associations et fondations d'entreprise (JOAFE). Les comptes des associations et fondations depuis 2004 ont été tout récemment mis en ligne sur le portail interministériel Etalab (mission pilotant la démarche open data du gouvernement et le site internet associé). Toutefois, en l'absence d'exploitation, ces comptes tout comme les données brutes des "Jaunes" associations paraissent difficilement accessibles et utilisables par le plus grand nombre.
Quant aux données relatives aux subventions attribuées par les collectivités locales et les établissements publics, elles doivent en principe, outre leur mise à disposition du public, être télétransmises au gouvernement selon une procédure bien définie. En pratique, ces remontées ne sont pas simples. Déjà en 2009, en réponse à une question écrite du député UMP Patrick Beaudouin sur l'application de la loi de 2006, le haut commissaire aux Solidarités actives avait estimé que "l'Etat ne [pouvait] contraindre les collectivités territoriales indépendantes" à publier ces données. Plus étonnant, Martin Hirsch avait considéré que le "jaune associatif" satisfaisait à l'obligation de mise à disposition d'un bilan annuel consolidé.
Coordonner les personnes publiques dans l'attribution de subventions
Les données collectivités-établissements publics ne font pourtant l'objet, à ce jour, d'aucune consolidation. Pour y parvenir, le ministère chargé de la Vie associative mise sur "la généralisation de la dématérialisation et la mise en place d'outils communs d'attribution de subventions", fait-il savoir à Localtis. Une coordination des personnes publiques dans l'attribution des subventions donnerait logiquement davantage de visibilité sur l'ensemble des transferts effectués au profit des associations. Le ministère cite l'exemple de la plateforme de traitement des demandes de subventions de l'ACSé, étudiées dans le cadre de "conférences virtuelles" par différents financeurs nationaux et locaux. De telles pistes devraient être détaillées par le rapport sur le "choc de simplification" dans les relations entre les associations et les administrations, que le député socialiste Yves Blein - l'un des rapporteurs du projet de loi sur l'économie sociale et solidaire tout récemment adopté - doit rendre d'ici la fin du mois de juillet à Najat Vallaud-Belkacem.