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Economie mixte - Sociétés publiques locales d'aménagement : les premiers projets voient le jour

Les premières sociétés locales françaises complètement publiques vont naître fin décembre et courant 2008 dans le secteur de l'aménagement dans le cadre d'une expérimentation ouverte jusqu'à l'été 2010. Leur principal atout est d'échapper aux règles de mise en concurrence définies par les directives communautaires.

Constituée jusqu'à présent en société d'économie mixte (SEM), l'agence régionale d'équipement et d'aménagement (Area) chargée de la construction et de la rénovation des lycées de Provence-Alpes-Côte-d'Azur va officiellement devenir dans les jours prochains la première société publique locale d'aménagement (SPLA), c'est-à-dire une société détenue à 100% par les collectivités locales. D'autres SEM devraient en 2008 lui emboîter le pas, telles Lyon Confluence - détenue en majorité par la communauté urbaine du Grand Lyon - ainsi que des sociétés situées en Ile-de-France et dans le Languedoc-Roussillon.
Il a donc fallu attendre près d'un an et demi pour que le nouveau statut ouvert aux SEM du secteur de l'aménagement prenne réalité. Ce nouvel outil qui existe déjà sous une forme comparable dans de nombreux pays européens, avait trouvé sa place dans la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement. Une loi qui a ouvert la porte à une expérimentation de cinq ans à partir de la promulgation de la loi.
"Je suis étonné de la timidité des collectivités locales", a témoigné Jean-Marc Peyrical, avocat et président de l'Apasp, intervenu le 4 décembre à Paris lors d'une rencontre organisée par la fédération des SEM sur le thème des SPLA. "J'entends tout le temps les élus dire que le droit communautaire les embête et que les procédures de mise en concurrence sont lourdes", poursuit-il, parlant de paradoxe. A présent que ces élus ont dans le droit un outil leur permettant de ne pas mettre en concurrence les opérations d'aménagement, "qu'attendent-ils ?", s'interroge le juriste. Celui-ci reconnaît cependant que l'"un des freins, c'est l'expérimentation": "Certains élus se demandent si cela vaut le coup de se lancer." Une inquiétude assez répandue qu'a tenté de dissiper une représentante de la Direction générale des collectivités locales (DGCL) : "A la fin de l'expérimentation, ce ne sera pas le vide sidéral." Autrement dit, quelle que soit la décision des parlementaires - prolonger l'expérimentation ou y mettre fin -, "il y aura un temps d'adaptation" pour les sociétés concernées.

 

Afficher clairement les liens avec la collectivité

L'autre frein à la constitution des SPLA tient à la construction encore inachevée dans le droit européen de la notion de "in house", qui entre dans le champ des exceptions aux règles de mise en concurrence des marchés publics et sur laquelle repose la légitimité des SPLA. "Avec une dizaine d'arrêts en deux ans, la jurisprudence européenne sur cette notion est fluctuante", indique Jean-Marc Peyrical. Des conditions strictes ont toutefois été dégagées. Il faut que le contrôle qu'exerce la collectivité publique sur la société soit semblable à celui qu'elle exerce sur ses propres services et que la société réalise l'essentiel de son activité avec la collectivité qui la détient. La DGCL préconise d'appliquer et d'inscrire clairement ces principes dans les statuts de la SPLA. L'Area conseille aussi de faire figurer en tête de chacun des contrats de prestation intégrée de la SPLA un "chapeau" rappelant clairement la position de la collectivité vis-à-vis de la société.
Notamment en raison des soucis de sécurité juridique, la procédure de création des SPLA est longue. La fédération des SEM a conclu qu'il était grand temps pour les collectivités intéressées d'entamer les premières démarches. Selon certains, il en va de l'avenir des SPLA, dont le sort est lié au bilan de l'expérimentation. Or, la fédération des SEM a déjà fait connaître son souhait de voir la possibilité de création des sociétés publiques étendue à d'autres secteurs que l'aménagement.

 

Thomas Beurey / Projets publics