Europe - Services sociaux et marchés publics : Michel Barnier s'explique face au Comité des régions
"Plus que jamais, l'Europe a besoin d'un marché unique qui fonctionne. Mon message d'aujourd'hui est donc très simple : au moment où nous voulons relancer le marché intérieur, je veux avoir les régions et les collectivités territoriales à bord." Un mois après avoir rendu publiques ses cinquante propositions pour améliorer le fonctionnement du marché unique européen (voir notre article ci-contre du 2 novembre ci-contre), Michel Barnier est venu affirmer le 30 novembre 2010 devant le Comité des régions que, dans sa volonté de réforme, la Commission européenne n'oubliait pas les collectivités.
Détruire un "préjugé tenace"
Le commissaire en charge du Marché intérieur s'est d'abord engagé à présenter "un ensemble d'actions en faveur des services d'intérêt général". Ceci afin d'offrir des "outils aux administrations publiques", de "permettre une meilleure évaluation de la qualité des services publics par les usagers" et de "réexaminer les obligations de service universel". Ces déclarations s'inscrivent naturellement dans la révision programmée des règles dites des "aides d'Etat" (ou "paquet Monti-Kroes"), c'est-à-dire des conditions dans lesquelles les administrations publiques peuvent effectuer elles-mêmes ou subventionner des activités de service public par dérogation aux règles de libre concurrence européennes. Michel Barnier s'est ainsi employé à détruire le "préjugé tenace" selon lequel la Commission serait "en faveur de la privatisation des services publics". Il a souligné par exemple que les "règles européennes sont faites pour aider les collectivités à assurer la qualité et l'efficacité de la dépense publique".
Ces propos n'ont pas complètement convaincu le vice-président du Comité des régions, Jean-Louis Destans : "Il ne s’agit plus de dire qu’il y a en la matière un problème de communication ou d’information à destination des collectivités locales.[...] La question ne devrait plus être de savoir s’il faut réviser le contenu du paquet Monti-Kroes, mais comment le réviser et autour de quelles priorités." Il invite donc la Commission à "s’emparer des propositions concrètes qui ont émergé lors du troisième forum sur les services sociaux d'intérêt général [SSIG] en octobre dernier : tenir compte du principe de proportionnalité dans la définition des règles et appliquer plus de flexibilité dans les règles applicables à la compensation financière, notamment par un relèvement des seuils". Un avis partagé par l’ensemble des élus français (voir notre article du 17 novembre 2010 ci-contre). La Maison européenne des pouvoirs locaux français (MEPLF) avait en effet indiqué qu'"en matière de compensation financière de services publics", elle souhaitait un relèvement des seuils (en particulier le seuil de minimis en dessous duquel l’aide n’est plus soumise à une notification préalable à la Commission).
Pas de "fardeau disproportionné"
Concernant les marchés publics, le commissaire espère mener à bien quatre grands chantiers au cours de son mandat (2010-2014) : la simplification des directives de 2004, la directive sur les concessions de services, le développement des marchés publics électroniques et l'accord sur la réciprocité (la possibilité d'exclure des marchés publics européens des entreprises par exemple chinoises, si les Chinois n'ouvrent pas leurs marchés publics aux entreprises européennes). Parmi ces quatre sujets, le principal est certainement, pour les collectivités et leurs acheteurs, la directive Concessions de service, c'est-à-dire le texte européen qui encadrera dans les années à venir les actuelles délégations de service public et les contrats de partenariat. Michel Barnier a assuré qu'il veillerait "à ne pas imposer un fardeau disproportionné aux administrations et aux opérateurs, à travers notamment la mise en place de seuils". Un des objectifs de cette future directive sera de "favoriser l'essor des partenariats publics-privés en Europe".
Toutes ces propositions du commissaire français restent toutefois à débattre. Comme l’a rappelé Michel Barnier, "l’acte pour le marché unique a ouvert une période de vaste débat public de quatre mois" à l’issue desquels "la Commission souhaite que l’ensemble des institutions européennes s’engagent, début 2011, sur un plan d’action politique s’étendant jusque fin 2012".
La France soutient le projet de Michel Barnier
Lors du Conseil des ministres du 30 novembre, la ministre de l’Economie, Christine Lagarde, a tenu à "réitérer son appui à l’essentiel des mesures proposées" dans l’acte pour le marché unique. Renforcement de la compétitivité des entreprises par une meilleure homogénéité du marché intérieur et une politique industrielle forte, adoption rapide d’un brevet de l’Union européenne et création d’un fonds européen de capital-risque et d’un fonds européen des brevets sont autant de propositions qui satisfont le gouvernement. Enfin, la France se félicite de l’intention de la Commission de "réaffirmer la place des services publics" au sein du marché unique.