Insertion - RSA : principe maintenu, modalités revues
A l'occasion de son entretien télévisé du 24 avril, Nicolas Sarkozy a apporté plusieurs précisions importantes sur le revenu de solidarité active (RSA). Indiquant d'entrée qu'"il n'y renonce pas", le président de la République a tout d'abord confirmé la mise en place du RSA en 2009.
Celui-ci pourrait toutefois être assez différent des premières ébauches et de l'expérimentation en cours dans une quarantaine de départements. La première raison tient aux moyens supplémentaires qui lui seront affectés. Comme le Premier ministre l'avait déjà laissé entendre, le chef de l'Etat a indiqué que "le RSA se fera [...] en maîtrisant les coûts". Alors que les premières estimations de Martin Hirsch, Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, tablaient sur un surcoût de 2 à 3 milliards d'euros, l'enveloppe supplémentaire affectée au RSA ne devrait finalement pas dépasser 1 à 1,5 milliard. Par ailleurs, l'essentiel du financement se fera sous la forme d'un redéploiement de la prime pour l'emploi (PPE), aujourd'hui versée à environ 8,5 millions de bénéficiaires pour un total de 4 milliards d'euros. Celle-ci sera recentrée "sur ceux de nos compatriotes qui en ont vraiment besoin".
Ce recalibrage financier aura nécessairement un impact sur les modalités du RSA. Nicolas Sarkozy a certes indiqué être parvenu "à peu près à un accord avec Martin Hirsch qui fait que tant qu'on est en dessous de 1,1 ou 1,2 Smic", on doit pouvoir "cumuler le revenu du travail et le revenu de l'assistanat". Mais les ajustements pourraient porter sur les conditions de ce cumul, ainsi que sur sa durée. Ce dernier point a d'ailleurs été cité par le chef de l'Etat comme l'un des "deux ou trois sujets qu'il faut qu['il] arbitre".
Des pans du livre vert à reconsidérer
L'intervention de Nicolas Sarkozy lève ainsi les incertitudes qui se faisaient jour depuis quelques semaines sur la généralisation du RSA. Mais elle laisse en suspens de nombreuses interrogations. Ainsi, le chef de l'Etat a indiqué que le RSA serait mis en place "l'année prochaine", sans autre précision. La date initiale du 1er janvier 2009, qui semblait déjà assez peu réaliste, paraît donc définitivement abandonnée. La généralisation pourrait intervenir dans le courant de 2009, ce qui aurait aussi l'avantage non négligeable de diminuer fortement l'impact budgétaire du dispositif sur la première année, voire même sur la seconde avec les délais nécessaires à la montée en charge de la prestation. Mais les questions les plus nombreuses portent sur le livre vert "Vers un revenu de solidarité active", publié par les services de Martin Hirsch et soumis à la concertation au début du mois de mars. La plupart des questions posées par ce document sont en effet à reconsidérer au regard des nouvelles règles du jeu. Pour prendre un seul exemple, on peut citer le cas des jeunes de moins de 25 ans : la question de l'ouverture ou non du RSA aux 18-25 ans (qui ne peuvent percevoir le RMI, mais peuvent bénéficier de l'API et de la PPE) se pose de façon très différente dans le cadre d'une enveloppe budgétaire réduite de moitié. Le recadrage du RSA pourrait également déstabiliser le Grenelle de l'insertion, qui porte sur un objet plus vaste, mais présente une étroite synergie avec la mise en place et les modalités de cette nouvelle prestation. Enfin, il est un dernier point auquel les départements devraient être particulièrement attentifs dans les prochaines semaines : dans un contexte où l'Etat cherche à réduire fortement l'impact budgétaire du RSA, quel sera au final l'impact financier réel de cette prestation pour les collectivités ?
Jean-Noël Escudié / PCA
"Le compte va y être"
Le Haut Commissaire aux solidarités actives s'est dit satisfait vendredi des déclarations du chef de l'Etat sur le RSA : "1,5 milliard, cela permet de faire la réforme dans de bonnes conditions pour l'année prochaine", a indiqué Martin Hirsch sur France Info. "Le compte va y être. On verra, au fur et à mesure que cela monte en charge, il faudra le compléter, éventuellement en reprenant un peu des primes existantes là où elles ne servaient pas à grand chose", a-t-il précisé.
Dans son entourage, on précisait bien vendredi que "le recentrage de la PPE vient en plus des 1 à 1,5 milliard d'euros annoncés par Nicolas Sarkozy", sans qu'il y ait de chiffre clairement arrêté.
Certains, dans l'opposition et du côté des syndicats, ont d'ores et déjà dénoncé le redéploiement de la PPE, le voyant comme une sorte de redistribution entre les plus pauvres.
Face à ces critiques, le Haut Commissaire estime que "cela fait des années que, rapport après rapport, on dit que la prime pour l'emploi est diluée, qu'elle n'est pas efficace et ne va pas là où c'est nécessaire". Et Martin Hirsch d'assurer : "On est en train d'habiller Pierre et Paul. Pierre c'est celui qui est au RMI et qui n'arrive pas à retravailler, Paul c'est celui qui travaille aujourd'hui et qui reste travailleur pauvre."
C.M. avec AFP