Handicap/Education - Rentrée scolaire des enfants handicapés : tout n'est pas réglé
Depuis la loi Handicap du 11 février 2005, l'intégration scolaire des enfants handicapés a accompli des progrès considérables, confirmés par plusieurs bilans de ce texte fondateur (voir par exemple nos articles ci-contre du 21 mars 2013 et du 9 octobre 2012). Après la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République - qui a réaffirmé le principe d'intégration scolaire posé par la loi de 2005 -, le ministère de l'Education nationale voit d'ailleurs, dans cette rentrée 2013, "des avancées historiques pour les élèves en situation de handicap". Après la création de 1.500 emplois d'auxiliaires de vie scolaire individuels (AVS-i) à la rentrée 2012 sous statut d'assistant d'éducation, il évoque notamment le recrutement de 350 nouveaux AVS et de 8.000 contrats aidés supplémentaires. Sans oublier, bien sûr, les 28.000 contrats à durée indéterminée qui doivent progressivement bénéficier aux actuels AVS en CDD (voir notre article ci-contre du 27 août 2013).
La faute à l'amendement Creton ?
Malgré ces progrès incontestables et réguliers depuis 2006, les difficultés d'intégration scolaire des enfants handicapés sont loin d'avoir totalement disparu. S'il reste encore des enfants sans AVS, les difficultés semblent toutefois s'être déplacées, en cette rentrée 2013, sur les enfants dont le handicap ne permet pas d'envisager une intégration scolaire en milieu ordinaire.
En juillet, Marie Derain, l'adjointe au Défenseur des droits chargée des droits des enfants, indiquait ainsi, dans un entretien sur Europe 1, qu'environ 6.000 enfants ne pourraient faire leur rentrée, faute de places dans les établissements adaptés comme les instituts médico-éducatifs (IME) ou les instituts médicopédagogiques (IMP). Aussi estimait-elle qu'"il est temps de se mettre autour de la table pour envisager des solutions pour ces enfants dès la rentrée de 2013 et d'avoir un plan qui prenne la mesure des difficultés, celles auxquelles nous confrontent les associations, pour qu'à moyen terme, les solutions soient plus systématiques et qu'on n'ait plus de situations où, alors que la décision est prise, des enfants attendent un an, deux ans, voire trois ans".
De son côté, Thierry Nouvel, directeur général de l'Unapei, confirme ce chiffre et estime même que le véritable déficit en places pourrait se situer "entre 10.000 et 15.000". Une situation qui touche particulièrement les enfants autistes, qui rencontrent à la fois des difficultés d'intégration scolaire et, pour les cas les plus lourds, sont confrontés au manque de places dans les structures éducatives spécialisées.
Face à cette situation, l'amendement Creton commence à être montré du doigt : en maintenant, jusqu'à parfois 25 ans, en IME ou en IMP d'anciens enfants ou adolescents, la mise en oeuvre de cette disposition accroît le besoin en places et peut conduire à emboliser certains établissements. Les défenseurs de l'amendement Creton auront toutefois beau jeu de faire valoir que le maintien de certains jeunes en IME ou IMP tient aussi au manque de structures adaptées pour les adultes.
Pour leur part, dans leur rapport sur l'application de la loi Handicap de 2005 (voir notre article ci-contre du 9 octobre 2012), les sénatrices Claire-Lise Campion et Isabelle Debré, citant le rapport Blanc de mai 2011, estiment que près de "20.000 enfants handicapés soumis à l'obligation scolaire seraient non scolarisés, les trois quarts étant placés en établissements et bénéficiant du soutien d'un éducateur, le quart restant vivant avec leurs parents et étant, pour la plupart, en attente d'une solution".
Réforme des rythmes scolaires et handicap : les collectivités sont-elles prêtes ?
Enfin, pour les 225.000 enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire, une autre question se pose. Au même titre que les autres élèves, ils sont en effet concernés par la réforme des rythmes scolaires et par les activités périscolaires mises en place dans les plages horaires ainsi libérées. Le tout récent rapport Komitès sur la professionnalisation de l'accompagnement des enfants handicapés (voir notre article ci-contre du 28 juin 2013) prenait bien soin de préciser que "dans le cadre de la réforme des rythmes éducatifs, liée à la loi sur la Refondation de l'école, c'est aux collectivités territoriales et plus précisément aux communes qu'il revient d'assurer la prise en charge des activités périscolaires sur les temps dits 'libérés'. Cette prise en charge inclut également l'accompagnement des jeunes en situation de handicap pendant ces heures". Or il n'est pas sûr que toutes les communes - qu'elles appliquent la réforme à la rentrée 2013 ou à celle de 2014 - ont bien pris la mesure de toutes les conséquences d'une telle obligation...