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Intercommunalité - Réforme intercommunale : les maires demandent des ajustements législatifs

L'Association des maires de France a consacré une réunion aux schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). Avec pas mal d'interrogations, auxquelles le ministre des Collectivités n'a pu répondre que partiellement.

L'Association des maires de France (AMF) réunissait le 28 juin à Paris les présidents d'associations départementales de maires et des rapporteurs de commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI). Au menu, bien évidemment, l'élaboration des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI), au moment où les communes et leurs groupements sont invités à se prononcer sur les projets de schémas préparés par les préfets. D'où une journée forcément animée... et, in fine, pas mal d'interrogations et de demandes auxquelles le ministre des Collectivités, venu clore la réunion, n'a pu répondre que partiellement. Une journée au cours de laquelle on a pu entrevoir l'étendue des conséquences très concrètes de la nouvelle carte de France intercommunale en train de s'élaborer, que ce soit en termes de compétences ou de personnels, ou encore de patrimoine.
Côté interrogations et constats, rendant compte pour le ministre de la teneur des échanges entre les élus, Jacques Pélissard, le président de l'AMF, a commencé par regretter que l'ensemble des maires – et pas seulement ceux directement touchés par le redécoupage intercommunal – n'aient pas été systématiquement consultés. Il s'est, surtout, fait l'écho de "la grande hétérogénéité des approches des préfets" : entre les scénarios "maximalistes" des uns et les choix "trop raisonnables" des autres, entre un département comme le Lot où le nombre d'EPCI va diminuer de 70% et un département comme le Cantal où les élus évoquent un schéma qui "manque d'ambition"… La cohérence n'est pas toujours évidente. Sur ce point, Philippe Richert a assuré que personne n'avait reçu une quelconque "consigne de gigantisme", que l'hétérogénéité des schémas "n'est pas un signe de faiblesse mais bien de capacité d'adaptation"… et qu'au-delà du nombre d'habitants, c'est au moins autant la question du coefficient d'intégration qui doit retenir l'attention : "L'enjeu est-il pour chaque communauté d'aller vers plus d'habitants ou plus d'intégration ? Car il ne s'agit pas de reculer sur les compétences", a relevé le ministre.

Un risque de remunicipalisation de compétences

Or nombre d'élus craignent précisément que la réforme ne se traduise par un alignement vers le bas en termes de compétences – autrement dit, par la remunicipalisation de compétences lors de la fusion de deux EPCI dont l'un a moins de compétences que l'autre. Et ce, qu'il s'agisse d'urbanisme, d'action sociale, d'eau, de petite enfance… Jacques Pélissard a évoqué pour Philippe Richert le cas de la compétence scolaire : "Lorsque le scolaire n'est au départ pas partagé par toutes les communautés, la loi prévoit la restitution aux communes. Or ce sera ingérable", prévoit-il. Et le président de l'AMF de demander au ministre de "pouvoir garder les Sivos" (syndicats intercommunaux à vocation scolaire) et de faire en sorte que ces Sivos puissent conserver la nouvelle dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), une dotation que la loi entend réserver dès 2013 aux communes et aux EPCI à fiscalité propre. Là-dessus, Philippe Richert a esquissé un début d'ouverture, déclarant que le maintien au-delà de 2012 du bénéfice de la DETR aux syndicats de type Sivos était un sujet "à débattre".
Le député-maire de Lons-le-Saunier a par ailleurs mis l'accent sur le "télescopage" entre réforme territoriale et réforme fiscale, qui "rend fort difficile l'étude d'impact financier à dispositif constant". Et en termes de visibilité financière, force est de constater que "les conséquences en matière de patrimoine et de personnels ne sont presque jamais traitées" par les projets de schémas. Finances toujours… quid de l'avenir des dotations des communes sachant que la part consacrée à l'intercommunalité au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) va forcément augmenter ? "Nous sommes conscients qu'il faut raisonner à enveloppe constante de DGF. Or on prévoit une vingtaine de nouvelles communautés d'agglomération, deux nouvelles communautés urbaines… Autant de communautés grosses consommatrices de DGF. Dans le même temps, il s'agit de maintenir la DSU et la DSR. Cela va être un exercice impossible. Il y aura une baisse arithmétique pour les communautés de communes de base et les communes elles-mêmes. A moins que l'on puisse envisager un abondement…", a détaillé Jacques Pélissard. Il n'y aura pas eu de réponse précise du ministre, celui-ci faisant principalement valoir que la question de la DGF ne pouvait être abordée sans tenir compte du chantier en cours sur la péréquation.

Une fenêtre de tir avec le "projet de loi 61"

En revanche, d'autres vœux exprimés par l'AMF pourraient trouver une réponse législative, par voie d'amendements, dans le cadre du projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et à la démocratie locale dont l'examen est prévu cet automne au Sénat, a fait savoir Philippe Richert. Tel est le cas de la question du plafonnement du nombre de conseillers communautaires et de vice-présidents en cas de fusion de communautés ou de transformation avec extension de périmètre. De même, l'AMF demande que la loi vienne prévoir une clause de revoyure obligatoire des schémas d'ici décembre 2015 au lieu de 2018. "A titre personnel, cela me paraît être une bonne chose", a déclaré le ministre, évoquant là encore l'opportunité de ce "projet de loi 61".
Les autres signes de "souplesse" mentionnés par Philippe Richert concernent essentiellement le calendrier. Ainsi, sur la période des sept mois restant avant la date butoir du 31 décembre 2011, date à laquelle le préfet aura arrêté le SDCI, le "curseur" entre les trois mois prévus pour la consultation des communes et EPCI et les quatre mois devant être consacrés au débat au sein de la CDCI pourra si besoin être quelque peu bougé. En revanche, la fermeté reste de mise sur cette date du 31 décembre… sauf pour quelques "situations particulières" que les préfets sont invités à faire remonter au ministère.

Claire Mallet

Un tiers de communautés en moins
Selon les remontées de terrain dont elle dispose à ce jour (émanant de 69 associations départementales de maires), l'AMF prévoit que la carte intercommunale issue des actuels projets de SDCI comptera 1.266 EPCI à fiscalité propre, contre 1.969 aujourd'hui. Soit 703 EPCI de moins… ou une baisse de pas moins de 35,7%. Le département devant connaître la plus forte baisse est le Lot (une baisse de 69,6%, passant de 23 EPCI à 7), suivi de l'Aude (10 EPCI contre 29), des Hautes-Alpes (7 contre 20) et du Nord (18 contre 48).
Les départements les moins touchés sont le Finistère (même nombre d'EPCI), le Calvados (37 contre 39), le Maine-et-Loire (28 contre 30), la Lozère (22 contre 24) et le Cantal (17 contre 19). Quelques départements compteront pour leur part davantage de communautés qu'aujourd'hui : le Loiret, les Hauts-de-Seine (un EPCI de plus) et les Yvelines (sept EPCI de plus).
L'Assemblée des communautés de France (ADCF) a elle aussi chiffré à 35% la diminution du nombre de communautés, avec plus de 300 projets de fusions.

 

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