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Finances locales - Réforme de la TP en 2010 : la "compensation relais", un dispositif simple qui pose toutefois question...

La réforme de la taxe professionnelle prévue par le projet de loi de finances (PLF) pour 2010 présenté en Conseil des ministres le 30 septembre dernier (voir ci-contre notre article du 30 septembre) se fera, on le sait, en deux temps. L'année 2010 sera ainsi "une année neutre pour les collectivités territoriales", déclarait par exemple une nouvelle fois Brice Hortefeux ce 6 octobre lors d'une intervention au Forum pour la gestion des villes. Si ce qui se passera pour les collectivités à partir de 2011 a été largement commenté (bien que la répartition des ressources de substitution n'ait pas été totalement arrêtée, le Parlement se voyant confier le soin d'affiner les choses...), cette "année neutre" apparemment simple mérite elle aussi quelques éclaircissements.

Dès l'année prochaine, donc, les entreprises ne paieront plus la taxe professionnelle. Elles acquitteront uniquement la cotisation locale d'activité assise sur les valeurs foncières. En 2011, elles paieront également la cotisation complémentaire applicable aux entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 500.000 euros et qui correspondra à une fraction de la valeur ajoutée. Les collectivités ne percevront pas encore le produit de la cotisation locale d'activité qu'elles toucheront à partir de 2011. Elles percevront en revanche une "compensation relais" versée par l'Etat.

Détermination du montant de la compensation relais

La compensation relais s'appliquera de la même façon pour toutes les collectivités territoriales et les EPCI à fiscalité propre (avec toutefois une spécificité pour la région Ile-de-France).
Le montant de cette compensation relais 2010 correspond au produit de TP qu'aurait eu la collectivité en 2010, à législation constante, en fonction des décisions fiscales en vigueur au cours de l'exercice 2009 (exonérations, dégrèvement et abattements) et en appliquant le taux de TP voté pour l'année 2008. Toutefois, la compensation relais peut s'établir au montant du produit de TP de l'année 2009 si celui-ci est supérieur au montant qu'aurait eu la collectivité avec son taux 2008. Autrement dit, les collectivités pourront librement opter entre les deux solutions, suivant celle qui sera la plus avantageuse.

Majoration de la compensation relais

Les communes et EPCI à fiscalité propre ont, eux et eux seuls, la possibilité d'adopter en 2010 un taux de TP qui servira à majorer la compensation relais. Cette majoration représente en réalité la croissance du taux de TP de 2009 à 2010 décidée par la collectivité. Cette augmentation est toutefois minorée arbitrairement de 16% puisqu'un coefficient de 0.84 est appliqué.
Les évolutions de ces taux de TP laissées à l'appréciation des communes et EPCI doivent respecter les limites actuellement en vigueur (règles de plafond et de liaison entre les taux). En revanche, les mécanismes dérogatoires qui permettaient par le passé d'augmenter le taux de TP plus vite que les taxes ménages ne peuvent pas être utilisés (ces mécanismes permettaient d'appliquer une majoration spéciale de la TP si le taux de TP de la collectivité était notablement plus faible que la moyenne nationale et d'augmenter le taux de TP de 1.5 fois l'augmentation moyenne des taux ménages ou du taux de taxe d'habitation).
Au-delà, la fixation du taux 2010 sert également à la fixation des taux de référence 2010 appelés à servir au calcul des garanties de ressources devant s'appliquer de 2011 à 2030 avec une extinction progressive par palier.
On soulignera que cette possibilité de majoration du taux de la TP ne s'applique pas pour les départements et les régions. De même, alors que l'une des versions de l'avant-projet de loi prévoyait une augmentation des taux de TP de ces collectivités à hauteur de la moyenne des augmentations décidées par les communes et EPCI, cette disposition ne semble pas reprise dans le projet finalement présenté en Conseil des ministres.

Difficultés et interrogations soulevées

Dans une certaine mesure, le mécanisme proposé pour 2010 peut s'avérer intéressant pour les collectivités. En effet, exceptionnellement, si les collectivités augmentent leur taux de TP en 2010, elles n'auront pas d'impacts négatifs au niveau de leur ticket modérateur 2010. Cette caractéristique constitue un avantage indéniable dont elles auraient tort de se priver compte tenu des perspectives financières peu réjouissantes pour le secteur public local à moyen terme…
En revanche, deux difficultés semblent apparaître. Tout d'abord, dans le cas où la compensation relais serait déterminée par rapport au montant des bases 2010 multipliées par le taux 2008, la commune ou l'EPCI perdrait, dans la plupart des cas de figure, le bénéfice de la croissance de son taux 2009.
Par ailleurs, la compensation relais 2010 est calculée en multipliant les bases déclarées par les entreprises par les taux adoptés par les collectivités dans les conditions décrites plus haut. Sachant que la réforme se profile, les entreprises seront-elles honnêtes dans la déclaration de leurs bases taxables ? De même, sachant que 2010 est la dernière année de la TP actuelle, les services de l'Etat seront-ils incités à appliquer les vérifications d'usage ? Comment les collectivités - et avec quels moyens juridiques – peuvent-elles s'organiser pour ne pas perdre de produits fiscaux en 2010 ?

Une sécurisation... pas absolue

Cette crainte est d'autant plus vive que les acteurs concernés (Etat et entreprises) pourraient imputer la baisse éventuelle ou la moindre croissance du produit fiscal à la crise qui, en la matière, aurait bon dos. Pour faire taire les critiques qui commençaient ici et là à poindre dans les collectivités, une sécurisation a été mise en place en prévoyant que la compensation relais puisse être équivalente au produit fiscal 2009. Malgré cette protection, certaines collectivités pourraient être flouées, non seulement de leur augmentation de taux 2009, mais aussi de la croissance des bases. Il ne faudrait donc pas que cette sécurité donne bonne conscience aux services de l'Etat et les incite à ne pas réaliser les contrôles de bases TP qui leur incombent.

Ainsi, si les conséquences financières de la réforme sur l'année 2010 semblent relativement bien appréhendées, de réelles inquiétudes demeurent quant aux modalités concrètes d'application. Or, en tout état de cause, pour les taux comme pour les montants, l'année 2010 est fondamentale. En effet, comme le prévoit le projet de loi, les données de cette année serviront ensuite de base pour le calcul des garanties de ressources.

Finances Territoriales
 

 

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