Etablissements - Réforme de la tarification : le projet de décret soumis au Conseil d'Etat
Le Comité national de l'organisation sanitaire et sociale (Cnoss) a examiné, le 11 mars, le projet de décret relatif à la tarification des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes et à la réglementation financière et budgétaire des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Ce projet de texte, dont l'élaboration se révèle une oeuvre de longue haleine (voir nos articles ci-contre), a fait l'objet de plusieurs propositions d'amendements. Il a également suscité les réserves de plusieurs grandes associations du secteur, comme la Fédération hospitalière de France (FHF). Celles-ci s'inquiètent notamment de plusieurs points : l'absence de coordination entre la réforme de la tarification des Ehpad et la mise en place éventuelle du cinquième risque, l'absence de clarification sur la gouvernance de certains outils comme les grilles Pathos, le manque de liens entre le nouveau mode de tarification et les dispositifs contractuels comme les conventions tripartites ou les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM)...
Le projet de décret précise notamment les modalités de détermination des tarifs dépendance et hébergement, fixés tous deux par le président du conseil général. Sur ce point, l'exposé des motifs du projet de décret prend bien soin de préciser que "les périmètres de prise en charge par les forfaits soins et dépendance sont inchangés dans le dispositif pérenne par rapport à la situation existante : les charges que ces forfaits ont vocation à couvrir sont strictement identiques à celles antérieurement listées à l'article R314-162 [du Code de l'action sociale et des familles, NDLR]". Traduction : le gouvernement reste ferme sur l'imputation sur la section dépendance des dépenses de psychologues en Ehpad, alors que la logique plaiderait plutôt pour la section soins, financée par l'assurance maladie. Cette affirmation de stabilité par l'exposé des motifs ne remet toutefois pas en cause l'expérimentation de suppression de la clé de répartition 70/30 entre section soins et section dépendance pour le recrutement des aides soignants et des aides médico-psychologiques (AMP). Les fédérations d'établissements craignent précisément que les départements, en difficulté financière, en profitent pour se désengager totalement de cette dépense, sans compensation par l'assurance maladie.
Le montant du forfait dépendance sera calculé par le président du conseil général du lieu d'implantation de l'établissement lors du renouvellement de la convention pluriannuelle ou de la signature d'un CPOM. Ce forfait sera calculé sur la base des charges autorisées par ce même président du conseil général au cours de l'année précédente, mais avec une homogénéisation progressive des tarifs dans le cadre d'une politique de convergence tarifaire départementale, grâce à la fixation d'une valeur départementale de référence du point dépendance.
Côté hébergement, le tarif fixé par le président du conseil général dans les établissements habilités à l'aide sociale sera calculé sur la base des charges nettes d'exploitation autorisées. Le pouvoir du président du conseil général sera toutefois encadré "afin d'éviter les augmentations importantes pour les résidents en cours de séjour". Le tarif hébergement ne pourra en effet évoluer que sur la base d'une progression moyenne fixée chaque année par un arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances. Il pourra toutefois être dérogé à cette règle dans le cadre de la mise en oeuvre d'un plan pluriannuel d'investissement (impactant par conséquent les charges d'exploitation) approuvé par le président du conseil général.
Le projet de décret prévoit également que la réforme de la tarification des Ehpad entrera en vigueur de façon progressive - ce qui ne devrait pas faciliter le travail des services de tarification des départements - au fur et à mesure du renouvellement des conventions tripartites. Il en ira de même pour la présentation des budgets en EPRD (état des prévisions de recettes et de dépenses) - l'autre volet de la réforme. Celle-ci n'entrera en vigueur que le 1er janvier 2012. Elle s'appliquera alors aux Ehpad, mais a vocation à s'étendre à d'autres établissements sociaux et médicosociaux comme les établissements et services d'aide par le travail (Esat) dont les tarifs sont supérieurs aux tarifs plafonds.
Le projet de décret est désormais soumis à l'avis du Conseil d'Etat, qui pourrait y apporter quelques modifications en reprenant des suggestions du Cnoss. Une fois le décret publié, il restera encore à prendre de nombreux arrêtés pour parachever le cadre juridique de la réforme.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : projet de décret relatif à la tarification des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes et à la réglementation financière et budgétaire des établissements et services sociaux et médicosociaux.