Ressources humaines - Rapport annuel sur la fonction publique : au-delà des discours, les chiffres
La Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) vient de publier son rapport annuel 2008-2009 sur l'état de la fonction publique. Deux volumes qui dressent un panorama complet sur l'emploi public et permettent de mieux comprendre l'actualité des politiques de modernisation en matière de ressources humaines. La fonction publique d'Etat (FPE) fait l'objet des analyses les plus complètes mais les fonctions publiques territoriale (FPT) et hospitalière ne sont pas oubliées. Au sommaire, l'ensemble des données disponibles en matière de décompte et d'évolution des emplois et des effectifs, ainsi que sur les questions de recrutement, de départs à la retraite, de parcours professionnel, de rémunération, de diversité, de formation ou de relations sociales. Si plusieurs études avaient déjà été rendues publiques ces derniers mois, leur publication en deux gros volumes facilite nettement leur lecture et confrontation.
Pourquoi consulter ces 1.337 pages plutôt que la synthèse en 50 pages publiée par le ministère du Budget en juillet dernier lors du passage du rapport devant le Conseil supérieur de fonction publique de l'Etat ? Simplement car les données fournies, principalement dans le volume 1, permettent d'aller au-delà des discours convenus sur ces questions de ressources humaines.
Comprendre l'augmentation des effectifs de la FPT
Eric Woerth, dans sa synthèse publiée en juillet dernier, affirmait : "Tandis que les effectifs de la fonction publique d'Etat baissent de 2,4% en 2007 (+0.3% en moyenne annuelle sur 10 ans), ceux de la fonction publique territoriale continuent de progresser : 5,2% sur un an (contre 3% en moyenne annuelle sur 10 ans)." Le rapport complet permet de comprendre comment est mesurée l'évolution des effectifs, sujet hautement polémique ces temps-ci (voir nos articles ci-contre).
Premièrement, une évidence : ces pourcentages ne sont pas calculés sur la même base. La FPE compte 2.484.484 personnes, la FPT 1.748.378 personnes. En effectifs, l'écart est déjà nettement moins impressionnant : - 61.607 personnes dans la FPE, + 86.018 personnes dans la FPT (volume 1, p.32).
Deuxièmement, l'exclusion des contrats aidés du mode de calcul a un effet direct sur le résultat : les emplois aidés dans la FPT ont diminué de 12,4%. Emplois aidés compris, la progression des effectifs de la FPT diminue de près d'un point : + 4,4% (soit + 77.000 agents).
Troisièmement, les évolutions au sein de la FPT sont très variables suivant le type de collectivité : + 1,6% pour les communes, + 15% pour les départements, + 110,1% pour les régions entre 2006 et 2007 (volume 1, p.39). De même pour l'Etat, s'il y a baisse pour les ministères et les services déconcentrés, les établissements publics administratifs voient leurs effectifs augmenter.
Quatrièmement, en 2007, les flux d'entrées se sont fortement accrus essentiellement du fait des transferts de compétence de l'Etat vers les collectivités territoriales : ce sont les conseils régionaux et généraux qui se partagent à part égales ces nouvelles arrivées (agents techniques et ouvriers de service de l'Education nationale). Curieusement, au vu de la précision des autres chiffres, nous n'avons pas trouvé le nombre d'agents transférés en 2007. On apprend seulement (volume 1, p.103) que 34% des recrutés par la FPT en 2007 sont entrés par un contrat de non-titulaire, 22,6% par transfert de compétence et 21,2% par recrutement.
Enfin, les structures par âge des deux fonctions publiques sont très différentes. Et par conséquent les nombres de départs à la retraite absolument pas comparables. En 2008, 78.359 titulaires et militaires de la FPE ont été admis à la retraite (volume 1, p.117). Dans la FPT, seuls 32.000 agents sont partis en retraite. Autant d'éléments qui invitent à une lecture attentive des chiffres fournis pour comprendre l'évolution des effectifs.
50% des agents à temps complet touchent moins de 1.539 euros nets par mois
De même pour les rémunérations : les études proposées permettent de mieux comprendre l'écart entre le salaire net moyen dans la FPE, 2.244 euros, et dans la FPT, 1.709 euros (vol 1, p.148). La structure des effectifs est un élément essentiel à prendre en compte : dans la FPE, près d'un agent sur deux (49,7%) est de catégorie A en raison du poids des enseignants notamment. Dans la FPT au contraire, seuls 8,7% des agents étaient cadre A en 2007. Autre facteur déterminant la rémunération, le sexe : en 2006, en moyenne une femme gagnait 2.048 euros dans FPE, un homme 2.368 euros. Dans la FPT, l'écart est moins important même s'il reste sensible : 1.600 euros pour les femmes, 1.800 pour les hommes.
Enfin, l'étude permet également d'y voir plus clair sur les écarts de rémunération au sein de chacune des fonctions publiques (vol 1, p.154). Ainsi, 10% des salariés à temps complet des collectivités territoriales touchent moins de 1.191 euros net en moyenne chaque mois. 10% des salariés touchent plus de 2.415 euros nets. 50% des salariés des collectivités territoriales touchent moins de 1.539 euros nets par mois. Des statistiques qui ne prennent pas en compte les agents à temps partiel.
Un outil précieux pour les candidats aux concours
La lecture de ce rapport est également à recommander à toute personne souhaitant préparer des concours : de nombreux chiffres sur les concours et les possibilités de mobilité sont disponibles. De même, nous conseillons vivement la lecture des tableaux (vol.1, p.24 et suivantes) qui expliquent sous quel statut et à quel droit sont soumis les agents des différentes institutions publiques et parapubliques. Enfin, le volume 2 permet de tout savoir sur les tendances actuelles en matière de gestion du personnel. Intitulé "Politiques et pratiques", il présente – certes essentiellement pour la FPE - les chantiers en cours sur la modernisation de la gestion des ressources humaines (GRH). Quatre thèmes sont abordés : s'adapter aux besoins et à l'évolution des services ; personnaliser la GRH et accompagner les agents ; piloter le changement ; professionnaliser la GRH.
Hélène Lemesle