Management / Ressources humaines - Stress, souffrance au travail... la fonction publique territoriale n'y échappe pas
Le Réseau des préventeurs et ergonomes des collectivités territoriales (Respect) organise, du 7 au 9 octobre à Paris, son septième congrès, sur le thème des risques psychosociaux. Pour le président de l'association, Elie Maroglou, les dirigeants territoriaux n'ont pas encore pris conscience de l'ampleur et de la gravité du problème, particulièrement mis en lumière dernièrement par l'affaire des suicides chez France Télécom.
Localtis : Que recouvre la notion de risques psychosociaux au travail ?
Elie Maroglou : Les risques psychosociaux ne constituent pas une famille de risques traditionnelle, comme le sont les risques machines, les risques liés au travail en hauteur, ceux qui sont liés aux produits chimiques ou au courant électrique... Leur caractéristique est qu'ils sont multiformes : sur le site de travail, on voit apparaître des tensions chez les individus (on parle alors de stress) ou au sein d'une équipe (dans ce cas, il s'agit d'un malaise). Les causes sont à rechercher par exemple du côté d'une surcharge de travail... ou parfois, au contraire, du côté d'une sous-charge de travail qui amène l'individu à se demander à quoi il sert. Cela correspond à l'expérience des salariés mis au placard. D'autres facteurs favorisent la survenue des risques psychosociaux, comme les conflits sur les valeurs, plus ou moins exacerbés en fonction des méthodes de management. Quoi qu'il en soit, ces risques nous interrogent : peut-on considérer qu'ils puissent être traités comme d'autres risques tels que le port de charges lourdes ou risques électriques par exemple ? C'est de ce sujet que nous allons débattre lors de notre congrès.
Comment ces risques ont-ils évolué ces dernières années ?
Les risques psychosociaux explosent dans tous les secteurs, et c'est un phénomène auquel la fonction publique n'échappe pas. Aujourd'hui, ils sont à l'origine de 20 à 40% de l'absentéisme. Un virage a été pris dans les années 1980 avec la dérégulation et la déréglementation de plus en plus poussées. On nous rabâche qu'il faut faire des gains de productivité, on veut maximiser les profits. Les jeunes sortis des écoles de commerce deviennent des managers à qui l'on demande de dégraisser les effectifs… Du coup, les salariés, qui servent de variables d'ajustement, se retrouvent dans des situations de souffrance extrême.
Les dirigeants territoriaux ont-ils pris conscience de la gravité de ces risques ?
La haute administration est encore loin de la prise de conscience du phénomène. J'ai même déjà entendu certains dirigeants dire que les risques psychosociaux sont dus à la fainéantise des agents. Il est vrai que certaines collectivités mettent en place des actions de prévention. C'est le cas de la mairie de Lyon, dont le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail comporte une commission spécialisée dédiée à ce thème. Mais ce type d'initiative est encore relativement peu répandu et il est essentiellement le fait de grandes collectivités. C'est pourquoi notre association va démultiplier son action en organisant en région des journées d'information.
Propos recueillis par Thomas Beurey
Le Réseau des préventeurs et ergonomes des collectivités territoriales (Respect) regroupe depuis 1996 des techniciens et des ingénieurs qui élaborent et pilotent les politiques de santé et de sécurité au travail dans la FPT, en appui des élus et des dirigeants territoriaux. Les responsables de l'association interviennent en tant qu'experts permanents auprès du Fonds national de prévention (FNP) géré par la Caisse des dépôts.